Intervention de Anna Pic

Séance en hémicycle du mercredi 19 juillet 2023 à 15h00
Protocole sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages liés au transport de substances nocives — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnna Pic :

Le présent projet de loi vise à ratifier le protocole du 30 avril 2010 à la Convention internationale de 1996 sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses.

Ce texte vise à prendre en compte, au-delà des marées noires, les préjudices liés à la décomposition difficile dans le milieu marin de substances nocives qui peuvent contaminer l'ensemble de la chaîne alimentaire de mollusques ou crustacés.

La communication et le trafic maritime, maillon déjà crucial dans la mondialisation, sont appelés, compte tenu de la compétition pour la sécurité des routes maritimes, à voir les risques qui lui sont liés s'amplifier.

Au-delà, la sauvegarde des océans et la lutte contre leur pollution constituent un enjeu majeur pour la planète et l'ensemble des États.

Plusieurs avancées récentes témoignent de cette prise de conscience, comme la signature le 23 juin 2023 du premier traité international pour protéger la haute mer, qui représente 60 % de la surface des océans : il prévoit notamment la création d'aires marines protégées dans les eaux internationales pour sauvegarder la biodiversité.

Cependant, les océans sont soumis à des risques croissants de pollution de masse. Comment ne pas mentionner les dangers de l'exploitation des fonds sous-marins pour extraire des métaux rares, alors que l'absence actuelle d'un code minier agréé entre États pourrait conduire l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) à accorder à des entreprises des permis rendant possible l'exploitation sauvage des ressources du plancher océanique ?

Depuis le 10 juillet, trois semaines de négociations cruciales sont en cours à l'AIFM. Dans les tout prochains jours, il convient que la France pèse de tout son poids diplomatique pour obtenir un moratoire sur l'exploitation des fonds marins, en l'absence de règles établies et de code minier agréé.

Le 7 novembre 2022, le Président de la République a affirmé en marge de la COP27 en Égypte que « la France soutient l'interdiction de toute exploitation des grands fonds marins ». Qu'en est-il aujourd'hui de la parole présidentielle ? Madame la secrétaire d'État, quelle est la position de la France dans ces négociations ?

Il ne faudrait pas que le développement d'une économie décarbonée sur terre, reposant sur des technologies fortement consommatrices de métaux rares, contribue en retour à la pollution et à la dégradation irréversibles des océans, qui assurent un service écosystémique souvent négligé et également irremplaçable.

Revenons au texte que nous avons à ratifier : après que des produits dangereux ont été déversés dans la mer à plusieurs reprises dans les années 1990, une convention sur les SNPD a été conclue en 1996. Cependant, elle n'est jamais entrée en vigueur du fait de plusieurs obstacles que le présent protocole vient – légèrement – corriger.

Si la France est satisfaite des améliorations qu'il apporte sur les trois griefs qui l'avaient conduite à refuser antérieurement sa ratification, elle devra maintenant travailler à convaincre les autres États signataires de la convention de ratifier eux aussi le protocole. En effet, les conditions d'entrée en vigueur de ce texte sont particulièrement exigeantes. Il subsiste donc des incertitudes à cet égard.

In fine, le protocole apporte de réelles améliorations dans un domaine jusque-là non régulé par le droit et peu documenté malgré ses conséquences importantes pour la santé et l'environnement. Comme l'ont fait valoir les débats au Sénat, les conséquences de ce type de pollution restent très complexes à évaluer : « Entre 1998 et 2013, 1 560 000 mètres cubes de produits dangereux, autres que des hydrocarbures, se sont déversés en mer provoquant 126 accidents graves, ayant eu des effets sur la santé des personnes, sur l'environnement et de lourdes conséquences économiques, très difficiles à mesurer. »

L'entrée en vigueur de ce protocole constituerait donc une réelle amélioration par rapport à la situation actuelle. C'est la raison pour laquelle le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur de ce texte.

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