…mais ils se heurtent douloureusement au principe de réalité. Vous dites dans la même phrase qu'il faut encadrer les élus et que 10 000 communes ont consommé moins de 1 hectare ces dix dernières années. Mais si elles ont consommé moins de 1 hectare, c'est que l'ensemble des communes soumises au RNU se sont vu opposer des refus de permis de construire par les préfets. Voilà la réalité ! Les DDTM – directions départementales des territoires et de la mer – regardent sur Google Maps les projets de construction entrepris par les communes ; elles voient les dents creuses quand ça les arrange et repoussent la quasi-totalité des droits à construire des communes rurales.
Deuxièmement – vous l'avez dit –, vous allez conditionner la garantie rurale à la mise en place d'une carte communale. Mais le problème, c'est que les toutes petites communes, celles qui n'ont pas beaucoup d'argent, n'ont pas les moyens de développer l'ingénierie nécessaire. Une carte communale, ça coûte 14 000 euros ! Que mettez-vous sur la table pour la financer ? Que mettez-vous sur la table pour permettre aux communes rurales de faire jouer le droit de préemption et ainsi d'acquérir un bien délabré, afin d'y construire un logement sain et respectueux des normes environnementales ? Que mettez-vous sur la table pour financer le fonds « friches », alors que le pays compte 75 000 hectares de friches ? Pour le maire d'une commune de 500 habitants, mobiliser l'établissement public foncier (EPF), préempter et effectuer un montage pour déterminer ce qu'il est possible de faire de la friche en question, tout cela relève du parcours du combattant et s'avère immensément difficile.
Voilà ce que le droit à une ruralité vivante implique ! J'ai dit que votre texte s'efforçait de faire sauter des verrous technocratiques, mais dans la réalité concrète, quand le maire d'une commune rurale n'a pas le droit de construire deux ou trois maisons qui respectent pourtant l'identité de son village et ses paysages, que se passe-t-il ? Dès l'année suivante, le Dasen – directeur académique des services de l'éducation nationale – ferme son école, parce que la tendance est de construire de gros collèges ; et l'année d'après, La Poste ferme son bureau de poste, parce que sa fréquentation est trop basse. Et par la suite, les commerces ferment à leur tour les uns après les autres. C'est ainsi que la ruralité dévisse, et c'est cette dynamique que nous souhaitons inverser ! En effet, si nous voulons que l'aménagement du territoire soit équilibré et que la République soit la même partout et pour tous, nous devons répondre concrètement à ces questions.