Qui plus est, bien sûr, vous méprisez encore et toujours la démocratie parlementaire. Les dernières semaines nous ont montré à quel point vous excellez aussi dans cet exercice. Cette fois, notre assemblée est sommée de légiférer dans l'urgence, à la va-vite, pour que le contrôle douanier reste effectif à la fin de l'été.
En ayant sciemment attendu le dernier moment, le Gouvernement nous soumet à un double chantage. D'abord, comme je l'ai évoqué, il nous met au pied du mur à deux mois de l'abrogation définitive de l'article 60. Ensuite, il exige une fois de plus une habilitation à légiférer par ordonnance ; si celle-ci était adoptée, elle priverait encore un peu plus notre assemblée de son pouvoir.
Le sujet est trop important. Vous en êtes conscient, car vous avez toutes et tous rendu hommage au travail des douaniers, hommage auquel je m'associe bien évidemment. Toutefois, avant de se targuer de donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces, encore faudrait-il leur donner des moyens tout court !
Permettez-moi de citer quelques chiffres édifiants. Nos douanes comptent 17 000 agents, contre 48 000 en Allemagne. Ainsi, il y a 2,3 fois moins de douaniers par habitant en France qu'outre-Rhin, alors que notre pays compte 3,9 fois plus de kilomètres de frontières et que sa superficie terrestre et maritime est 29 fois supérieure ! Dès lors, la douane, cette « police des marchandises » si essentielle à l'intérêt général, a du mal à accomplir ses missions. Par exemple, alors que la fraude à la TVA fait perdre chaque année 25 milliards d'euros aux caisses de l'État, seul un conteneur sur mille quittant notre pays est contrôlé, faute d'effectifs suffisants. Les délinquants peuvent donc se faire rembourser indûment des sommes colossales de TVA, en toute impunité. Telle est la réalité du contrôle douanier dans notre pays.
En réalité, il n'est pas question de moyens dans votre projet de loi, si ce n'est dans son titre. En effet, les moyens, ce sont essentiellement des effectifs et des investissements. Or, ici, on ne prévoit pas de plan d'embauche massif pour combler le sous-effectif, ni d'investissements stratégiques qui permettraient aux fonctionnaires d'accomplir leurs missions avec efficacité. Tout ce que vous nous proposez, c'est la création d'une réserve opérationnelle, composée d'agents peu formés ou de retraités épuisés.