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Intervention de Benjamin Saint-Huile

Réunion du mercredi 31 mai 2023 à 9h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenjamin Saint-Huile, rapporteur :

Le présent texte a pour objet de revenir sur le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes. C'est une disposition technique, créée par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe. Chaque année depuis son adoption, nous avons eu à connaître de demandes d'adaptation de cette loi. Il s'agit ici d'y revenir.

Je veux dire, parce que je sens parfois la caricature poindre dans nos débats, qu'il ne s'agit pas de remettre en cause le fait intercommunal, nécessaire à la dynamique territoriale et qu'il faut pouvoir renforcer dans certains domaines. En l'occurrence, il s'agit d'apporter de la souplesse et de l'agilité à une compétence extrêmement technique, qui complique la situation dans la ruralité. Cela ne concerne donc pas les métropoles et les communautés d'agglomération, pour lesquelles certains ont déposé des amendements.

Cette compétence technique soulève le problème de la caractéristique de la ressource elle-même, l'eau, de la répartition des populations et de ses conséquences sur le périmètre des infrastructures, de l'état de ces dernières et de la contrainte financière.

Le présent texte vise à renouveler notre confiance aux maires. Il repose sur trois dispositions principales. La première met fin au transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes, compétences qui deviendraient facultatives. La deuxième organise leur restitution aux communes qui, les ayant déjà transférées, souhaitent les récupérer. Enfin, la troisième vise à assouplir la délégation de compétence en cas de changement dans l'organisation.

La principale disposition consiste donc en la fin du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement au profit des communautés de communes, décidé par la loi NOTRe. Les réactions assez vives à cette obligation ont conduit à l'adoption de la loi du 3 août 2018 repoussant son entrée en vigueur au 1er janvier 2026, à condition qu'une minorité de blocage s'exprime en ce sens dans les intercommunalités.

Puis la loi « engagement et proximité » – loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique – a allégé les procédures de mise en œuvre de la minorité de blocage et, de manière très encadrée et très dérogatoire, a ouvert la possibilité d'une délégation des compétences eau et assainissement au profit d'une commune membre de la communauté de communes ou d'un syndicat infracommunautaire, à condition que celui-ci soit existant au 1er janvier 2019 et que les intercommunalités soient d'accord pour que ce syndicat subsiste.

L'étau a encore été desserré avec la loi « 3DS » – loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale. Les syndicats d'eau infracommunautaires existant en 2019 sont maintenus après le 1er janvier 2026, sauf délibération contraire du conseil communautaire. À partir du 1er janvier 2026, les communautés de communes exercent les compétences même s'il y a une possibilité de délégation au profit d'une commune ou d'un syndicat infracommunautaire, créant ainsi une certaine confusion autour de la convention de délégation.

Si tant de reports ont été décidés et si nous en arrivons à cette proposition de loi, c'est en raison des difficultés techniques posées par cette disposition : le nombre élevé de services concernés ; le mode de gestion différent d'un territoire à l'autre ; la durée des contrats ; le risque que le transfert à la communauté de communes entraîne une augmentation tarifaire ; enfin, la qualité des infrastructures, puisque le niveau d'investissement n'a pas été le même dans tous les territoires – je précise qu'aucune étude ne démontre qu'une compétence intercommunale garantirait un meilleur état des réseaux.

Deuxième objectif de ce texte : la restitution des compétences eau et assainissement aux communes qui le souhaitent. Elle s'exerce à tout moment et se fait de manière automatique : si la moitié des conseils municipaux d'une intercommunalité se prononcent en faveur de la restitution, cela vaut pour toutes les communes. Pour celles qui voudraient rester dans le champ intercommunal, il existe une procédure simplifiée qui leur permet de retourner au niveau intercommunal. Si n'y a pas de majorité en faveur de la restitution, il demeure tout de même possible de sortir de l'intercommunalité, à la condition que le conseil communautaire l'autorise par une simple délibération.

Dernier objectif du texte : l'assouplissement des modalités de délégation de compétence à un syndicat infracommunautaire ou à une commune. Il sera possible de maintenir les conventions de délégation, même s'il y a un changement du titulaire de la compétence. Cela permet, avant la fin de la convention, de pouvoir se dessaisir si la commune le souhaite.

Je salue le travail de nos collègues sénateurs, qui ont adopté cette proposition de loi transpartisane en première lecture, le 16 mars. Je remercie l'auteur initial de la PPL, M. Jean-Yves Roux, et le rapporteur du texte, M. Alain Marc. Si des amendements de réécriture venaient à être adoptés, nous ne pourrions plus obtenir un vote conforme, ce qui relancerait la navette et prolongerait les débats. Nous souhaitons donc un vote conforme pour assurer aux maires d'avoir le pouvoir de choisir. Il ne s'agit pas d'exprimer de la défiance envers les intercommunalités mais de garantir aux territoires ruraux qu'ils pourront bénéficier d'une procédure dérogatoire pour exercer au mieux leurs compétences dans un domaine aussi technique et essentiel que la gestion de l'eau et de l'assainissement.

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