Les présidents des groupes Renaissance et Horizons et apparentés ont déposé le 4 avril dernier la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur la structuration, le financement, l'organisation des groupuscules et la conduite des manifestations illicites entre le 16 mars 2023 et le 4 avril 2023. Cette proposition ne se faisant pas dans le cadre du droit de tirage, nous devons en examiner la recevabilité juridique, ce qui est classique, mais aussi l'opportunité.
Sa recevabilité juridique est soumise à trois conditions par notre règlement.
D'abord, il faut que les faits formant l'objet de l'enquête soient précis. En l'espèce, il me semble que cette condition est remplie. Elle l'est sur le plan matériel : la commission d'enquête viserait la structuration, le financement et l'organisation des groupuscules qui se livrent à des actions et à des mobilisations violentes. Elle l'est sur le plan temporel : la période visée s'étendrait du 16 mars au 4 avril, date de dépôt de la proposition de résolution – je vous proposerai de l'étendre un peu.
Ensuite, il faut qu'aucune commission d'enquête n'ait été réunie sur le même objet dans les douze mois qui précèdent. Tel est le cas. La plus récente a été, en 2019, la commission d'enquête sur la lutte contre les groupuscules d'extrême droite en France, présidée par notre ancienne collègue Muriel Ressiguier et dont le rapporteur était notre ancien collègue Adrien Morenas.
Enfin, il faut que la commission d'enquête n'interfère avec aucune procédure judiciaire en cours. Sur ce point, nous avons reçu le 28 avril la réponse du garde des sceaux à la demande exprimée par la présidente de l'Assemblée. De façon très classique, il constate que le champ de la commission d'enquête serait susceptible de recouvrir certaines procédures diligentées, mais dans des conditions très différentes : il va de soi qu'il n'incombera à la commission d'enquête ni de rechercher les auteurs de faits spécifiques précisément identifiés, ni de se livrer à une qualification pénale des faits portés à sa connaissance. En 2019, la commission d'enquête sur les attaques à la préfecture de police de Paris, dont j'étais le rapporteur, a mené ses investigations sur cet événement tragique sans interférer avec la procédure judiciaire en cours.
S'agissant de l'opportunité de la proposition de résolution, qui nourrira sans doute nos débats, elle ne fait aucun doute à mes yeux, compte tenu des scènes particulièrement violentes, graves et répétées dont les Français ont été les témoins en marge, à côté et pendant des manifestations et rassemblements. Bien entendu, il faut distinguer les manifestants des groupes insurgés – car tel est bien le nom qu'ils méritent. Un citoyen mécontent n'est ni un ennemi ni un insurgé, mais un acteur de la démocratie sociale, de la démocratie tout court. Il va de soi que nous ne visons pas les manifestants, mais les groupes violents, organisés, qui se rendent aux rassemblements armés de bidons d'essence, de cocktails Molotov et de boules de pétanque. Leur choix est d'en découdre, notamment avec les forces de l'ordre.
Nos collègues Jérémie Iordanoff et Éric Poulliat mènent une mission d'information sur l'activisme violent qui ne donne pas lieu à un recoupement général avec la commission d'enquête telle qu'elle est proposée : elles sont complémentaires plutôt que concurrentes.
Mes chers collègues, je vous propose de donner un avis favorable à la proposition de résolution.