Nous auditionnons, à huis clos, les supérieurs directs et collègues ou anciens collègues de la surveillante que nous avons entendue la semaine dernière et qui avait formulé un certain nombre d'observations avant le drame du 2 mars 2022.
Messieurs, votre audition nous a semblé indispensable pour comprendre précisément comment ont été gérées, au sein de la détention, les différentes observations effectuées par votre collègue quelques semaines avant l'agression mortelle d'Yvan Colonna et jusqu'à la veille de celle-ci. Nous nous interrogeons sur le sort qui leur a été réservé, notamment sur ce qui a conduit à les inscrire, ou non, dans le logiciel Genesis. D'autres surveillants nous ont en effet confirmé qu'elles pouvaient remonter par différents canaux en dehors du logiciel, soit verbalement, soit au moyen de comptes rendus professionnels (CRP).
Votre collègue nous a indiqué qu'elle n'avait pas fait état, dans Genesis, de l'échange auquel avait participé Franck Elong Abé et au cours duquel les mots « Je vais le tuer » avaient été prononcés, au motif qu'il était impossible d'identifier leur auteur. Nous en prenons acte, même si nous avons notre avis sur cette question. Elle nous a dit avoir fait remonter cette observation oralement.
On retrouve en revanche dans ce logiciel la mention du don de paquets de pâtes par M. Elong Abé à un autre détenu, tel qu'évoqué dans les CRP de votre collègue des 11 et 21 mars 2022. Il ne s'agit pas de l'observation la plus intéressante a priori mais elle y figure.
Enfin, votre collègue a fait état d'un changement d'attitude de M. Elong Abé quelques semaines avant l'agression, celui-ci semblant faire le vide dans sa cellule. Or, sauf erreur, cette observation ne figure pas dans l'extraction Genesis qui nous a été communiquée par la direction de l'administration pénitentiaire (DAP). Votre collègue nous a dit avoir, peut-être, fait une mauvaise manipulation ou mal validé l'inscription mais, en tout état de cause, elle affirme en avoir informé ses supérieurs et elle a réitéré l'avoir enregistrée dans le logiciel.
À ce stade, j'aurai une première question : que savait la direction de ces différentes observations – le changement d'attitude et la conversation – et à quel moment en a-t-elle été informée ? Si des comptes rendus ont été rédigés a posteriori, il semble que ces éléments aient bien remonté la chaîne hiérarchique, par des canaux directs, oralement.