Madame Taubira, je vous souhaite la bienvenue au nom de la commission, et vous remercie de vous être rendue disponible, en dépit des difficultés que connaît le transport aérien.
Il nous a semblé indispensable de vous entendre compte tenu de votre riche expérience en tant que responsable politique de premier plan. Vous avez été ministre de la Justice entre 2012 et 2016. À ce titre, vous avez une connaissance approfondie des problématiques relevant de ce ministère et, singulièrement, des sujets relatifs à l'administration pénitentiaire. Nous souhaitons connaître votre sentiment et vos analyses à la lumière des faits qui se sont produits le 2 mars 2022 à la maison centrale d'Arles et des travaux qui ont déjà été menés, notamment le rapport établi par l'Inspection générale de la justice (IGJ).
Nous voudrions également vous entendre sur la politique de lutte contre la radicalisation en prison. Certains acteurs de l'administration pénitentiaire auditionnés par notre commission d'enquête nous ont indiqué que vous n'étiez pas particulièrement favorable, à l'époque, à la mise en place de structures spécifiques pour gérer les détenus terroristes ou radicalisés. Vous aurez sans doute à cœur de nuancer cette appréciation et d'apporter des compléments d'information.
Le drame qui s'est joué à Arles concerne deux détenus particulièrement signalés (DPS), statut qui a été appliqué aux trois membres du commando dit Érignac. Nous souhaiterions savoir comment vous avez eu à gérer leur situation et à évaluer les demandes des intéressés, de leurs familles et de la société insulaire, tendant à lever ce statut pour permettre le rapprochement familial. À quel niveau et selon quelles modalités ces dossiers étaient-ils traités ? Sans rien enlever à la gravité des faits pour lesquels ces trois hommes ont été condamnés, pensez-vous que leur maintien sous le statut de DPS a répondu à des considérations uniquement juridiques ? Auraient-elles pu également être d'ordre symbolique ou politique ?
Plus globalement, estimez-vous nécessaire de faire évoluer le régime encadrant ce statut, afin d'objectiver les décisions prises dans ce cadre ? Selon le directeur de l'administration pénitentiaire, trois critères seulement sur les six en vigueur relèvent de l'appréciation de cette même administration, les trois autres étant « larges », de nature judiciaire, notamment, et davantage sujets à interprétation – de quoi nourrir un soupçon d'arbitraire selon les détenus concernés. Certains acteurs ont pris position pour que cet office soit confié à l'autorité judiciaire plutôt qu'au pouvoir réglementaire du ministère de la Justice.
Notre rapporteur vous a adressé un questionnaire pour vous permettre de préparer cette audition. Je vous remercie de bien vouloir transmettre ultérieurement à la commission les éléments de réponse écrits ainsi que tout autre élément d'information que vous jugeriez pertinent.