Je tiens tout d'abord à remercier le rapporteur Jean-Victor Castor et le groupe GDR d'avoir inscrit la présente proposition de loi à notre ordre du jour, pour clore enfin, je l'espère, nos débats sur l'obligation vaccinale contre le covid visant les soignants et les personnels médicaux.
Que de temps perdu par notre pays ! L'Espagne, le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Belgique n'ont jamais suspendu leurs soignants non vaccinés. Quant à l'Italie, qui avait franchi ce cap rigoriste, elle les a réintégrés en novembre dernier, et cela s'est bien passé.
Le 30 mars, la HAS a finalement sonné le glas de cet immobilisme, en préconisant la levée de l'obligation vaccinale. Son avis doit être suivi sans délai, comme la loi le prévoit. Pourtant, dans votre instruction datée du 2 mai, monsieur le ministre, les modalités de réintégration des soignants nous paraissent encore floues. D'après cette instruction, les soignants suspendus seront considérés comme réintégrés « le lendemain » de la parution du décret levant l'obligation vaccinale, prévue le 14 mai prochain. D'autre part, les chefs d'établissement public devront « au plus tôt, et si possible dans un délai de deux semaines, contacter chaque professionnel suspendu afin de lui signifier la fin de la suspension et si possible lui indiquer le poste d'affectation et la date de reprise du travail ».
« Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement », monsieur le ministre. Les personnels soignants suspendus ne peuvent demeurer plus longtemps dans cette incertitude et cette situation instable.
C'est la raison pour laquelle nous soutenons la proposition de loi : elle vise à abroger purement et simplement l'obligation vaccinale tandis que le Gouvernement ne souhaite que « suspendre » celle-ci par le biais d'un décret dont les conditions d'application sont contrariantes.
Le parallélisme des formes nous commande de défaire par la loi ce qui a été fait par la loi. Conserver la possibilité d'imposer de nouveau cette obligation sans repasser par la loi maintient les personnels, comme les établissements de santé, dans une constante incertitude. Ce n'est pas acceptable.
Bien trop de professionnels et de patients ont pâti de cette situation. Vingt mois de suspension et de privation de rémunération – comment font-ils ? – sur fond de crise économique : pour beaucoup, ce fut une éternité.
Nous continuons de penser que, compte tenu de la situation de nos établissements de santé, nous ne pouvons nous priver d'aucun personnel. En outre-mer particulièrement, où nos territoires sont touchés par le phénomène des déserts médicaux, la suspension a eu des effets brutaux.
Pire, le Gouvernement a poussé ces professionnels à partir définitivement. Or, en Guadeloupe, d'où je viens, le délai moyen d'attente pour un rendez-vous chez un cardiologue est de dix mois. En Guyane, 59 % des postes de praticien en milieu hospitalier ne sont pas pourvus. À Saint-Pierre-et-Miquelon, ce taux s'élève à 78 %, contre 27 % à l'échelle nationale. Dans ces territoires, lorsqu'un seul cardiologue, un seul ophtalmologiste ou un seul gynécologue manque, ce sont des centaines de patients qui sont sacrifiés – et, parfois, le pire arrive.
En préférant la suspension à la suppression, vous aggravez une insécurité sanitaire que ces Français ne peuvent se permettre. Ainsi, nous estimons que si de nouvelles mesures de lutte contre l'épidémie étaient étudiées, elles devraient faire l'objet d'un véritable débat au Parlement.
Par ailleurs, je veux rendre hommage, comme vous, à tous ceux qui se sont vaccinés,…