En première lecture, j'avais déjà exposé les réserves de La France insoumise concernant cette proposition de loi. Certaines d'entre elles demeurent après son passage en commission mixte paritaire. Rappelons que ce texte fusionne les filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers d'une part, et celles des producteurs de papier d'autre part.
Avant de s'interroger sur la pertinence d'une telle fusion, je voudrais revenir, monsieur le rapporteur, sur votre conception des déchets qui irrigue la proposition de loi et apparaît incompatible avec la nôtre. En effet, vous ne questionnez jamais l'ensemble du modèle de production et de consommation qui est à la source des déchets ; pire, comme les déchets sont valorisés, ils ne constituent plus un problème écologique mais deviennent une source de profits. Je tiens à rappeler l'absence de baisse du volume des ordures ménagères : les ménages français produisent 39 millions de tonnes de déchets par an aujourd'hui contre 36 millions de tonnes en 2005. Chaque Français peut d'ailleurs se rendre compte de la multiplication des emballages, notamment pour des raisons de marketing ou de packaging, et on demande au consommateur de payer le recyclage d'emballages qui, hélas, lui sont souvent imposés par la société de consommation et son lot de publicités.
C'est sur le cycle global des marchandises que nous devons travailler pour avancer vers la sobriété. Alors que le Giec – le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat – a rendu récemment encore un rapport alarmant sur le climat et qu'un vortex de déchets s'étend entre le Japon et les États-Unis sur une surface d'environ trois fois la France, nous devons de façon urgente changer de logiciel.
Il est essentiel de réduire la quantité de déchets que nous produisons, sachant que le meilleur déchet est celui qui n'est pas produit. Et des solutions existent : il est, par exemple, urgent d'interdire immédiatement les plastiques à usage unique et le suremballage, de rendre obligatoire le recyclage et le compostage, de généraliser les consignes et de développer les filières de réutilisation des matériaux. Mais rien dans cette proposition de loi ne permet d'avancer dans cette direction.
Venons-en à la fusion. La filière REP des emballages ménagers couvre cinq matériaux – papier/carton, plastique, acier, aluminium et verre –, alors que la filière REP papiers couvre tous les imprimés – papier gratuit ou non, ainsi que les publications de presse et les imprimés découlant d'une mission de service public. Ces deux filières sont très différentes, tant par le volume produit qu'en dynamique, leur fusion n'était peut-être pas une priorité et elle est difficile pour certaines raisons. Et puis surtout, le texte initial prévoyait que les publications de presse et les livres soient exemptés et ne soient pas soumis au régime de la responsabilité élargie du producteur mais, contre l'avis du groupe Renaissance, le texte issu de la CMP maintient la presse dans la filière REP comme nous le souhaitions. Néanmoins, ce résultat a été obtenu au prix d'un tour de passe-passe que je vais tâcher d'expliquer.