C'est avec grand plaisir que je vous retrouve aujourd'hui au terme d'une procédure législative dense, qui s'est achevée jeudi 30 mars par une commission mixte paritaire (CMP) conclusive. Avant de revenir sur le contenu du texte que nous nous apprêtons à voter, je tiens à en redire le contexte.
La presse est aujourd'hui dans une situation très critique : elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures qui viennent s'ajouter aux fragilités structurelles du secteur. En 2022, 3,6 millions d'exemplaires des titres de la presse régionale étaient imprimés chaque jour, contre 5,6 millions dix ans auparavant. Ce seul chiffre illustre la baisse des ventes et la raréfaction du lectorat.
Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Selon les estimations de la filière, la hausse du coût du papier pourrait représenter un manque à gagner de 120 millions. Si l'ensemble du secteur de la presse est touché à des degrés divers, la presse quotidienne régionale, dont la pagination est importante, l'est particulièrement. La hausse du coût de l'énergie affecte également les coûts de la distribution, du transport et de fabrication. La presse numérique n'est pas épargnée et subit l'augmentation des tarifs des hébergeurs. En somme, si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts – grâce notamment à l'augmentation des prix et à une réduction de la pagination déjà mise en œuvre par une majorité d'entre eux –, le risque de déstabilisation est réel pour tout le secteur.
En parallèle, il convient de rappeler que la presse est, depuis 2017, incluse dans la filière à responsabilité élargie des producteurs des papiers graphiques. La responsabilité élargie des producteurs (REP) – c'est-à-dire la gestion des produits par les producteurs, de leur mise sur le marché à la fin de leur cycle de vie – est la mise en œuvre du principe pollueur-payeur, dont la France est un pays moteur. Nous sommes en effet les premiers en Europe à avoir mis en place le système de REP.
La presse est donc incluse depuis 2017 dans la filière REP des papiers graphiques, mais, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible au même titre que les livres, elle bénéficiait d'une dérogation lui permettant de contribuer à la filière sous la forme de prestations en nature, par la mise à disposition d'encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier. Ce système existait bien avant 2017, mais, à partir de cette date, il est devenu une alternative obligatoire au paiement d'une écocontribution à l'éco-organisme. La loi du 10 février 2020, relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi Agec, a mis un terme à ce régime dérogatoire. Elle prévoit que, à compter du 1er janvier 2023, l'écocontribution de la presse doit être numéraire. La charge que représente ce financement direct pour la presse est estimée entre 15 et 22 millions d'euros.
J'en viens maintenant au contenu de ce texte. La commission mixte paritaire, qui s'est tenue le 30 mars dernier, a été conclusive : députés et sénateurs sont parvenus à se mettre d'accord sur un texte qui, tout en étant le résultat d'un compromis, répond à l'objectif d'un soutien efficient à la presse au sein de la filière REP.
La principale évolution du texte aujourd'hui soumis à votre approbation, par rapport à sa version initiale, tient sans nul doute dans le maintien de la presse au sein de la filière REP. Il s'accompagne de la mise en œuvre d'une écomodulation pour les produits de la REP contribuant à une information d'intérêt général du public sur la prévention et la gestion des déchets, notamment grâce à la mise à disposition gratuite d'encarts d'information, sous réserve que les produits respectent bien par ailleurs des critères de performance environnementale.