Intervention de Thomas Portes

Réunion du mercredi 29 mars 2023 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThomas Portes :

Je tiens à rendre hommage à Federico Martín Aramburú, joueur de rugby assassiné en plein Paris le 19 mars 2022 par des militants du Groupe union défense (GUD), groupuscule d'extrême droite.

Depuis plusieurs mois, nous assistons en Europe à une offensive réactionnaire et raciste particulièrement inquiétante avec l'arrivée de gouvernements d'extrême droite en Italie, en Hongrie et en Pologne, tandis qu'apparaissent en France de nombreux groupes d'extrême droite identitaires et néonazis.

Nous partageons les constats de cette proposition de loi : augmentation de la menace en provenance de l'extrême droite et hiatus entre, d'une part, la dangerosité de cette mouvance pour l'ordre public et, d'autre part, la tolérance dont ses idées bénéficient dans la société.

L'extrême droite prolifère dans toutes les sphères de notre pays, jusqu'aux services chargés de rendre compte de cette menace : police, gendarmerie, services de renseignement.

Cette menace regroupe une multitude de mouvances, des identitaires aux nationalistes en passant par les royalistes, les complotistes et les accélérationnistes, qui théorisent très clairement le passage à l'acte. Ce sont autant de menaces à l'encontre de notre principe constitutionnel de fraternité : je pense aux associations de solidarité, sans cesse attaquées – notamment SOS Méditerranée – ou aux déferlements de violences à Callac contre un projet d'accueil de réfugiés, que la municipalité a été contrainte d'abandonner. L'extrême droite fait également peser une menace sur les lieux culturels : attaques d'universités, de la librairie La Plume noire, à Lyon, ou du centre culturel kurde de Paris.

L'extrême droite, c'est le bras armé de l'islamophobie, donc une menace pour les lieux cultuels musulmans, comme en témoigne l'attentat commis contre une mosquée de Bayonne, en 2019, par un ex-candidat départemental du Front national.

L'extrême droite, ce sont des menaces ciblées contre des militants, des bénévoles d'associations ou des politiques : je pense à la mairie de Stains, attaquée en octobre dernier par l'Action française ou à l'incendie du domicile du maire de Saint-Brevin-les-Pins en raison de sa politique d'accueil des demandeurs d'asile.

L'extrême droite, c'est aussi la haine en ligne, notamment sur les réseaux sociaux, ce sont des sites comme Fdesouche ou Riposte laïque, qui appellent les citoyens à s'armer et les encouragent à passer à l'acte en identifiant des personnes cibles.

L'extrême droite, ce sont des menaces à peine voilées de coup d'État. En 2021, le site Valeurs actuelles, alors salué par Marine Le Pen, publiait un texte signé par vingt anciens généraux se concluant sur une menace de coup d'État militaire.

Parce qu'il est impossible d'être exhaustif, nous avons besoin d'un suivi continu et circonstancié de la menace d'extrême droite. Le Gouvernement se doit d'établir un état des lieux précis de ces menaces, comme nous l'avions demandé dans notre proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur la lutte contre les groupuscules d'extrême droite en France. Lui seul, en effet, détient des moyens dont nous ne disposons pas, notamment, grâce à la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

La lutte contre le racisme, toutefois, ne saurait se satisfaire de déclarations et de constats. Nous devons agir. Selon le ministère de l'intérieur, huit attentats fomentés par des mouvances d'extrême droite ont été déjoués depuis 2017, mais la réponse administrative et judiciaire est très insuffisante. Les groupuscules contournent les dissolutions en se reconstituant sous d'autres formes et d'autres noms. L'État doit prendre des mesures radicales pour protéger notre société de l'idéologie fasciste. Silence et inaction sont politiques. Nous invitons tous ceux qui sont attachés aux valeurs démocratiques et à l'État de droit à désapprouver l'extrême-droitisation de notre pays et, dans un premier temps, à se joindre à cette PPL.

Nous défendrons un certain nombre d'amendements, notamment afin d'élargir le périmètre aux groupuscules européens. Nous voterons bien entendu ce texte.

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