Cette commission d'enquête comporte deux volets, qui répondent à une demande sociétale et démocratique très forte, notamment de la société insulaire – mais pas seulement : faire la lumière sur ce qui s'est passé, en parallèle d'autres initiatives ; émettre des recommandations pour les politiques publiques à venir.
Je comprends votre propos liminaire, selon lequel il ne faudrait pas que nos travaux contribuent à une aggravation de l'évolution sécuritaire en prison. Néanmoins, le contexte que vous avez décrit doit être confronté à la trajectoire particulière de ces individus et à des faits qui, pour certains, ne concordent pas avec ce paysage général.
Ainsi, vous faites état de problématiques psychiatriques. Nous avons échangé avec la cheffe du pôle psychiatrique de la maison centrale d'Arles ainsi que des acteurs du renseignement et de l'administration pénitentiaire sur l'état psychique de Franck Elong Abé tel qu'il était perçu. La cheffe du pôle psychiatrique a évoqué les problèmes de moyens et de prise en compte de la santé mentale en prison. Cependant, s'agissant du cas particulier de Franck Elong Abé, elle a indiqué que s'il avait été suffisamment troublé pour ne pas aller en QER – comme l'ont dit un certain nombre d'acteurs –, sa place n'était pas en détention ordinaire et il aurait dû être hospitalisé. Son état ne justifiait donc pas l'absence de transfert en QER. Son avis médical était très clair, et allait à rebours des propos de certains acteurs selon lesquels les troubles psychotiques de ce détenu représentaient un risque de déstabilisation du fonctionnement du QER – évoquant même, pour certains, une schizophrénie.
Je souhaite revenir sur le contentieux concernant la gestion des DPS insulaires, liés au « commando Érignac ». Certains acteurs, comme le garde des Sceaux et l'administration pénitentiaire, estiment qu'il était impossible de lever le statut de DPS parce que ces détenus étaient toujours soumis à une période de sûreté. Or il ne s'agit pas d'un critère de maintien du statut de DPS. Par ailleurs, selon eux, leur transfert vers le centre de détention de Borgo était impossible, puisque ces détenus devaient être incarcérés en maison centrale. Pourtant, l'instruction précise que l'orientation en maison centrale est privilégiée, sans exclure la capacité de les transférer. La question relative à ce contentieux est importante afin de solder ce qui a été fait, et qui aurait pu être fait autrement.