Le logement est la pierre angulaire de l'insertion : sans toit, pas d'accès à l'emploi, à la scolarité ou à la santé. Pourtant, nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à éprouver des difficultés à se loger. Les zones tendues, qui se cantonnaient jusqu'alors à quelques villes, s'étendent à de nouveaux territoires, en particulier à toutes nos zones touristiques. Les prix des loyers grimpent et jamais nos concitoyens n'ont consacré autant d'argent pour disposer d'un simple toit. Cette situation pèse sur leur pouvoir d'achat. Alors que les alertes se multiplient, l'exécutif ne semble pas toujours prendre la mesure de la crise qui couve ! La politique du logement menée par le Gouvernement nous mène vers des difficultés. Le choc de l'offre promis par le Président de la République lors du premier quinquennat n'est jamais arrivé, et ce second mandat démarre avec des chiffres de construction au plus bas : moins de 100 000 agréments ont été accordés pour des logements sociaux en 2022, alors qu'on nous avait promis 125 000 logements par an !
Vous me direz que cette proposition de loi n'a pas vocation à répondre à la crise du logement en France. Pour ma part, je considère que nous ne pouvons légiférer en oubliant ce contexte critique. Nous ne pouvons rester sourds aux alertes des associations, qui s'inquiètent d'une précarisation des locataires les plus fragiles. Rappelons-le : l'inflation, qui se répercute sur les coûts de l'énergie et sur les loyers, rend difficilement soutenables les fins de mois pour une partie des Français. Ce n'est une surprise pour personne, le risque d'impayé des charges et des loyers augmente.
Dans ce contexte, la volonté initiale de criminaliser les locataires en difficulté était très contestable. Fort heureusement, les discussions à l'Assemblée puis au Sénat ont permis de supprimer cette disposition problématique et de revenir à un texte globalement plus équilibré. Notre groupe LIOT remercie les sénateurs d'avoir aussi ajouté un volet relatif à l'accompagnement des locataires en difficulté. Le texte renforce désormais la capacité d'action des acteurs du logement avec une intervention plus rapide des CCAPEX, un délai allongé à trois mois au lieu de deux pour le diagnostic social et financier, ou encore le renforcement des pouvoirs du juge pour maintenir l'APL ou pour demander le versement des aides directement au bailleur.
Il reste tout de même quelques interrogations. Le texte accélère certains délais de traitement des arriérés de loyers. Il faut désormais s'assurer que les services sociaux et les CCAPEX disposent d'effectifs suffisants pour systématiser les diagnostics sociaux et financiers, sur lesquels les juges ne peuvent aujourd'hui s'appuyer pour rendre leur décision que dans 30 % des cas. Il faudrait pourtant qu'ils les aient automatiquement à disposition afin d'identifier les causes de l'impayé et de proposer le dispositif de prévention le plus adapté à la situation de l'occupant.
S'agissant des mesures relatives aux squatteurs, nous y étions dès le début favorables. Certains individus continuent de se jouer des failles de la loi pour se maintenir illégalement dans des logements qui ne leur appartiennent pas. La loi Asap avait proposé de corriger quelques écueils relatifs à la procédure d'évacuation accélérée du logement par décision administrative. Cette proposition de loi vient combler les dernières lacunes. Deviennent ainsi éligibles à la procédure d'évacuation forcée les logements occupés par des squatteurs entre deux locations ou juste après l'achèvement de la construction, avant que le propriétaire n'ait eu le temps d'emménager. La proposition de loi opère également une dissociation entre l'introduction par voie de fait, d'une part, et le maintien dans les lieux par voie de fait, d'autre part. Cela devrait permettre de sanctionner le squatteur qui resterait dans le logement par la contrainte mais qui serait entré en trouvant, par exemple, la porte ouverte.
Nous considérons que ce n'est pas aux petits propriétaires d'endosser les conséquences de la crise du logement et de la politique défaillante du Gouvernement en la matière. La majeure partie des dispositions de cette proposition de loi permet désormais, après réécriture, de préserver l'équilibre entre droit de propriété et droit au logement, et nous y sommes favorables. Néanmoins, nous avons besoin d'avancer sur le sujet du logement, en particulier dans les zones tendues. Les élus locaux le demandent, les citoyens également. Cela passe par des aménagements fiscaux et par des outils visant à limiter les locations de courte durée, par exemple. Nous avons besoin d'adaptations législatives et réglementaires dans ce domaine ; j'espère, monsieur le ministre délégué, qu'elles arriveront très prochainement.