Le permis de conduire est le premier examen de France puisqu'il concerne un million et demi de candidats chaque année. C'est un rite de passage obligatoire avant l'entrée dans la vie active. En conséquence, sa bonne organisation et la maîtrise de son coût sont un impératif d'intérêt général, et c'est à lumière de ces considérations qu'il convient d'apprécier la proposition de loi de notre collègue Sacha Houlié.
Le permis de conduire est, dans les faits, un véritable diplôme, plus difficile à obtenir que le baccalauréat, comme l'atteste son taux de réussite qui baisse chaque année : 57 % en 2022. Ne pas en être titulaire, c'est vivre ce que le sociologue Éric Le Breton appelle « l'assignation territoriale » et qui concerne plus d'un cinquième de la population, essentiellement des jeunes en zones rurales ou périurbaines, mais aussi d'autres personnes à faibles revenus. Toutes ces réalités justifient que le législateur se préoccupe d'éliminer les obstacles qui empêchent l'accès au permis en permettant aux candidats de présenter l'examen dans des délais raisonnables et à un coût soutenable. Tels sont les objectifs de cette proposition de loi.
L'article 1er prévoit ainsi la création d'une nouvelle plateforme numérique nationale d'information, justifiée par la nécessité de donner une visibilité nationale aux aides disponibles, tout en répondant au profil géographique et personnel de chaque candidat. Nous savons que l'accès à la préparation au permis est directement conditionné à son coût, de l'ordre de 1 800 euros pour 35 heures de conduite. Ce coût empêche de nombreux jeunes de profiter de cette formation, pourtant utile pour obtenir un emploi. L'enjeu est bien l'égalité des chances : la plateforme, qui offre aux candidats un maximum de visibilité sur l'ensemble des aides de tous niveaux auxquelles ils peuvent prétendre, est conçue comme un outil de service public. Elle facilitera aussi la réduction du reste à charge, premier obstacle pour nombre de postulants. L'objectif de visibilité sera d'ailleurs renforcé par le lien établi entre cette plateforme et la plateforme auto-écoles, qui donne aux candidats une vue globale de l'offre d'enseignement et de sa qualité – j'en vois l'intérêt pour les administrés de ma circonscription.
L'article 2 est consacré à l'élargissement très opportun du compte personnel de formation, au nom des nouvelles mobilités. Les statistiques de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) indiquent que plus de la moitié des personnes ayant mobilisé leur CPF ont vu leur situation professionnelle s'améliorer, le CPF facilitant leur retour à l'emploi. Le compte personnel de formation constitue le premier levier de formation au permis de conduire. Encore faut-il pouvoir le mobiliser, ce qui n'est pas le cas pour trop de jeunes non actifs. Si l'utilisation du CPF peut être élargie, la question de la place du permis à 1 euro par jour, dont le montant est intégralement à la charge du candidat, se posera avec encore plus d'acuité.
J'en viens à l'article 3 et à l'objectif de réduction du délai de passage du permis. Lorsque je pense à la situation de mon département de la Loire, je me félicite de la suppression du délai médian actuel de 45 jours entre deux présentations d'un même candidat à l'épreuve pratique. Par ailleurs, nous saluons le recrutement complémentaire d'examinateurs.
D'autres leviers pourraient être renforcés pour réduire le taux d'échec à l'examen. Je pense aux formules qui permettent, dès 15 ou 18 ans, une plus grande expérience de conduite au moyen d'un apprentissage renforcé. Le taux de réussite de ceux qui les ont adoptées est bien au-dessus de la moyenne nationale – de l'ordre de 75 % pour la conduite accompagnée, alors qu'elle ne concerne que 20 % des jeunes. Quasi unique en Europe, elle bénéficie de peu d'aides : il conviendrait donc d'y remédier. Il en est de même de la conduite supervisée, qui s'adresse aux élèves dont les familles n'ont pas de voiture.
Enfin, le groupe Démocrate a déposé un amendement traduisant son souhait de renforcer, à l'épreuve théorique du permis, le thème de la conduite sous l'emprise d'alcool ou de stupéfiants. L'augmentation très inquiétante de ce type de comportements à risque nous paraît le justifier.
Notre groupe votera cette proposition de loi.