L'accès à l'examen du permis de conduire et plus généralement à la mobilité est un sujet majeur qui conditionne très souvent, cela a été rappelé, un parcours de vie. Vous avez très justement souligné dans l'exposé des motifs du texte que près de 7 millions de personnes connaissent des difficultés à se déplacer, soit environ 20 % de la population en âge de travailler, et surtout que 28 % des personnes en insertion professionnelle abandonnent leur emploi ou leur formation pour des raisons de mobilité. C'est pourquoi l'extension des possibilités d'utilisation du compte personnel de formation à toutes les catégories de permis de conduire nous semble une proposition pragmatique, qui va dans le bon sens, tout comme celle de créer une plateforme numérique nationale, gérée par l'État, qui centraliserait l'information sur l'ensemble des dispositifs de financement du permis proposés aux particuliers, y compris les aides des collectivités locales – j'espère que la plateforme sera lisible, madame la secrétaire d'État… J'ai moi-même fait cette démarche dans ma propre commune, à La Châtre, dans l'Indre. Enfin, le fait d'élargir la possibilité de faire passer les examens à des agents publics ou contractuels, en cas de problème ou de manque de personnel, est, là aussi, une mesure de bon sens.
L'an dernier – vous le savez, monsieur le rapporteur –, j'avais déposé une proposition de loi sur ces sujets. C'est entre autres en s'inspirant de ce texte que les membres de mon groupe ont déposé des amendements pour améliorer le texte qui nous est soumis et dont nous partageons, je le répète, pleinement la philosophie et les objectifs. Certains de nos amendements visaient à rendre possible la cession de tout ou partie du CPF au sein de la famille nucléaire afin de permettre aux parents d'utiliser les sommes créditées sur ce compte pour financer la formation de leurs enfants au permis de conduire. Ces amendements ont été déclarés irrecevables pour des raisons que nous connaissons, mais je voudrais à nouveau ouvrir ce débat parce que je crois que c'est un sujet essentiel. Il faudra bien qu'on arrive, après étude, à des solutions.
Actuellement, les parents ont une capacité inégale à fournir une aide à leurs enfants pour l'obtention du permis de conduire : 74 % des jeunes dont les parents font partie des 20 % des ménages les plus aisés détiennent un permis de conduire, tandis que ce n'est le cas que de 51 % des jeunes issus des 20 % des ménages les moins aisés. Ces chiffres parlent. Le montant moyen de l'aide parentale, lorsqu'elle existe, est de 1 402 euros, alors que, d'après l'étude menée par UFC-Que choisir, le coût moyen du permis de conduire est de 1 804 euros, voire 2 000 euros selon d'autres études, auxquels s'ajoutent évidemment de nombreuses autres dépenses nécessaires pour avoir effectivement accès à la conduite. Aussi, faute de moyens de transport adaptés, un quart des jeunes de 18 à 30 ans ont-ils déjà renoncé à un emploi, et plus d'un jeune sur deux a dû restreindre sa vie sociale ou ses activités de loisirs – et, je le dis à mon tour en tant qu'élu rural, c'est particulièrement vrai dans le monde rural et dans les zones périurbaines.
Il faut donc aller beaucoup plus loin dans l'aide à l'obtention du permis de conduire. L'accès au permis et donc à son financement est un levier puissant d'insertion sociale, mais aussi le sésame pour entrer dans la vie, pour construire son parcours personnel. C'est pourquoi il nous paraît essentiel de trouver un outil puissant qui ne reposerait pas pour l'essentiel sur les finances publiques de l'État.
Pour parvenir à cette solidarité intergénérationnelle et pour concentrer l'allocation des ressources sur les besoins de formation les plus urgents – car, au fond, quel est le rêve le plus important pour des parents, sinon celui de pouvoir aider leurs enfants à entrer dans la vie ? –, nous proposons deux amendements pragmatiques et réalistes : le premier demande au Gouvernement de poursuivre la réflexion en remettant un rapport sur la cessibilité de tout ou partie du compte personnel de formation ; le second ouvre une autre porte, que j'ai évoquée avec plusieurs membres des cabinets ministériels concernés, en demandant un rapport sur la possibilité de procéder à une avance sur le CPF des parents, avance qui serait ensuite compensée une fois que le jeune, au fur et à mesure de sa vie professionnelle, aura acquis lui-même des droits sur son propre CPF. Je précise que j'avais aussi prévu, dans ma proposition de loi, des solutions pour les enfants sans parent ou dont le schéma familial ne permet pas une telle démarche. Je crois vraiment que nous devons avancer sur ces questions car c'est un problème réel et majeur, particulièrement dans le monde rural et dans les zones périurbaines.