La proposition de loi que je vous présente ce matin tend à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire, dont nous célébrons le centenaire. Elle comporte trois articles et vise un triple objectif : rendre le permis moins cher, plus simple et plus rapide.
Cette ambition, nous la déployons de longue date, puisqu'elle a été initiée en 2015 par Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, à travers la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, qui avait permis de réduire significativement les délais d'obtention du permis de conduire, en faisant passer le délai médian entre deux présentations de soixante-cinq jours en 2014 à quarante-deux jours en 2018. Ce résultat avait été obtenu en partie grâce à l'externalisation de l'épreuve théorique du permis de conduire et au recentrage des missions des inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière (IPCRS) sur le passage de l'épreuve pratique, étant entendu qu'elles comprennent aussi le contrôle des fraudes, notamment à l'obtention du code, ainsi que l'accompagnement des auto-écoles, dont elles permettent de s'assurer de la qualité des formations dispensées.
En 2019, à la suite du rapport de notre ancienne collègue Françoise Dumas, le Gouvernement a mis en œuvre un plan de dix mesures afin de garantir un meilleur accès au permis de conduire, d'en diminuer le coût et d'en poursuivre la simplification.
Le présent texte s'inscrit dans la continuité de cet effort, d'autant que le contexte inflationniste n'épargne pas le secteur des auto-écoles ; le coût de l'acquisition du permis de conduire atteint désormais 2 000 euros, voire davantage, avec de fortes disparités territoriales. Les délais d'obtention se sont en outre allongés, du fait de la crise du covid : ils étaient de soixante-trois jours en 2020 et de cinquante-trois en 2021.
Il nous faut mesurer l'inquiétude des jeunes, qui sont les principaux concernés : 80 % des lauréats de l'examen pratique du permis B ont moins de 25 ans et 86 % d'entre eux pensent qu'il s'agit d'un outil indispensable dans la vie d'un jeune adulte, qu'elle soit personnelle ou professionnelle. Je veux leur envoyer le message que nous leur faisons confiance.
J'ai aussi en tête les autres défis auxquels nous sommes confrontés. Nous nous préoccupons de la réouverture des petites lignes ferroviaires, de la remise en fonctionnement des trains de nuit, du développement des transports en commun, du soutien aux collectivités territoriales, du financement du plan Vélo… Le permis de conduire n'est qu'un élément parmi d'autres, quoique déterminant pour l'émancipation et l'accès des jeunes à l'autonomie : 20 % des personnes en âge de travailler, soit 7 millions de Français, rencontrent des difficultés pour se déplacer et un tiers des personnes interrogées ont dû refuser un travail ou une formation professionnelle pour cette raison.
Pour que le permis soit à la fois plus simple et moins cher, nous devons renforcer l'information et favoriser l'accès aux nombreuses aides proposées par l'État, ses opérateurs et les collectivités territoriales – notamment les communes. Cela permettrait de réduire le reste à charge, sans pour autant dégrader la formation. Tel est le sens de l'article 1er, qui prévoit la création et la gestion par l'État d'une nouvelle plateforme numérique, « 1 jeune, 1 permis », laquelle aura vocation à recenser l'intégralité de ces aides ; elle est inspirée de la plateforme « 1 jeune, 1 solution », dont chacun a salué la réussite en matière de promotion des dispositifs pour l'emploi des jeunes.
Un dispositif législatif est nécessaire pour s'assurer de la collecte auprès des établissements publics et des collectivités de l'intégralité des informations indispensables à la création de la plateforme. Je proposerai en outre un amendement visant à articuler celle-ci avec la plateforme « Auto-écoles » relative au choix de son établissement de la conduite –elle mentionne par exemple les auto-écoles certifiées, certaines aides y étant conditionnées – et avec « RdvPermis », outil destiné à rationaliser l'inscription à l'examen pratique.
L'article 2 traite d'un outil incontournable : le compte personnel de formation (CPF), qui a permis de financer 322 000 permis de conduire en 2021, soit 28 % des permis délivrés cette année-là, les deux tiers des bénéficiaires étant des personnes âgées de moins de 35 ans. Il s'agit de surcroît de la formation la plus financée sur le site « Mon compte formation ».
Pour l'heure, seuls trois types de permis sont éligibles au CPF : le permis B, le permis poids lourds et le permis bus. Je vous propose d'étendre cette possibilité à l'ensemble des catégories du permis de conduire. J'ai passé pour ma part le permis A1, pour pouvoir rejoindre avec une petite moto la ville-préfecture, distante de 30 kilomètres et qui n'était pas reliée à mon domicile par des transports en commun. Dans les agglomérations, beaucoup de jeunes utilisent quotidiennement les deux roues : il vaut mieux, pour des raisons de sécurité, que ces personnes détiennent un permis A. Le permis remorque est quant à lui très intéressant pour les artisans.
Certains d'entre vous auraient souhaité aller plus loin mais le président de la commission des finances a déclaré, de manière tout à fait fondée, irrecevables au titre de l'article 40 des amendements portant notamment sur la cessibilité du CPF entre parents et enfants. Cette mesure, j'avais moi-même eu l'intention de la proposer avant d'y renoncer à l'issue des auditions, et cela pour trois raisons : premièrement, le caractère personnel et incessible du CPF ; deuxièmement, le coût qu'elle représenterait et les fraudes auxquelles elle pourrait donner lieu ; troisièmement, et surtout, l'inégalité sociale qu'elle susciterait : il est en effet plus aisé de céder ses droits au CPF à son enfant pour un cadre que pour un salarié non qualifié, qui en a besoin pour lui-même.
Je souhaiterais également que l'aide de 500 euros au financement du permis de conduire pour les apprentis soit créditée sur le CPF. Il n'a pas été possible, en raison de l'article 40, d'inscrire cette disposition dans le texte, mais je soumettrai la proposition au Gouvernement à l'occasion de l'examen en séance publique. Il en va de même pour le déplafonnement du permis à 1 euro par jour : 1 200 euros, ce n'est pas suffisant pour financer, aujourd'hui, le coût du permis de conduire.
L'article 3 vise à réduire les délais d'attente entre deux présentations à l'examen pratique, ce qui n'est pas sans lien avec les aspects financiers : plus longtemps on se forme, plus on prend d'heures de cours, plus le coût de la formation augmente.
Il y a huit ans, nous avions autorisé le recours, dans les départements où le délai d'attente entre deux présentations à l'examen est supérieur à quarante-cinq jours, à des examinateurs du permis de conduire, en plus des inspecteurs. Je pense que cette mesure, qui permet d'offrir aux candidats un plus grand nombre de créneaux d'examen, peut être généralisée et qu'il n'est plus pertinent de limiter le recours au dispositif.
L'objectif n'est pas pour autant d'externaliser l'épreuve pratique du permis de conduire des véhicules du groupe léger. D'abord, cela conduirait à une désorganisation des services. Ensuite, le contrôle des compétences dans une optique de sécurité routière relève d'une mission de service public. En revanche, cette mesure s'inscrit dans la continuité de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI), qui prévoit le recrutement de 100 IPCSR supplémentaires sur quatre ans.
Voilà les mesures pragmatiques, utiles et attendues que je vous soumets. Elles entendent répondre aux difficultés que j'ai pu identifier dans mon département, la Vienne, mais j'imagine que vous y êtes confrontés également dans vos territoires. Les solutions ont été construites collectivement et localement, notamment avec les moniteurs d'auto-école. J'espère qu'elles rencontreront, ce matin, un large consensus.