Je vous remercie.
Nous restons un peu sur notre faim, comme d'ailleurs à l'issue d'autres auditions. Quatre incidents se sont produits à Arles, dont l'un lors de la formation jardin-espaces verts, que l'ancienne directrice a relativisé, considérant qu'il n'était pas grave de donner un coup de tête à un autre détenu, et un autre à l'encontre d'un personnel. Ils ont fait l'objet de sanctions disciplinaires. Le DLRP, sur le logiciel du renseignement pénitentiaire, a également fait part d'une pression exercée en septembre 2021 par Franck Elong Abé sur des détenus pour obtenir le poste d'auxiliaire mais, là encore, cette attitude a été relativisée.
À cela s'ajoutent les remontées formulées sur le logiciel Genesis dont les agents nous ont fait part hier concernant le comportement de Franck Elong Abé – qui se laissait pousser la barbe, qui dénonçait cent fois par jour les « mécréants », qui ne serrait pas la main des femmes, qui était solitaire – ainsi que les conclusions des cinq CPU, dont on se demande comment elles ont pu ne pas circuler : je rappelle tout de même qu'en mai 2021, il affirmait vouloir mourir par l'islam. Les agents de trois syndicats différents nous ont dit hier qu'ils le jugeaient plus dissimulateur, manipulateur et dangereux que fou, et ils l'ont fait savoir. Compte tenu de toutes ces informations, comment a-t-il pu être maintenu, au forceps, en détention ordinaire et en emploi général ? Quelque chose ne va pas.
J'entends qu'il y a eu la crise du covid-19, que vous avez privilégié les détenus radicalisés plutôt que les TIS, comme l'atteste le rapport de l'IGJ, mais tout de même, 487 TIS ont été en QER ou en QPR, dont quelques-uns ne devaient pas être très équilibrés psychiquement. Treize n'y sont pas allés, dont Franck Elong Abé. Si l'on tient compte de ceux qui étaient malades ou handicapés, il est peut-être le seul à se situer en haut du spectre à ne pas y avoir été, malgré cinq recommandations en ce sens dans le cadre des CPU. Cela fait beaucoup.
Je ne nie pas la difficulté de votre mission, que vous avez exposée très précisément, mais quelque chose n'a pas fonctionné, c'est le moins que l'on puisse dire. En tant que président, je ne peux pas me satisfaire, globalement, y compris de la part du PNAT, de propos selon lesquels Elong Abé était connu comme étant très dangereux et, en même temps, de la préoccupation obsessionnelle d'une orientation vers la sortie, même s'il devait faire l'objet de mesures individuelles de contrôle et de surveillance.
Pourquoi un tel dysfonctionnement ? Le rapport de l'IGJ, en tout cas, fait état d'un effacement de la ligne hiérarchique entre la direction de l'établissement, la direction interrégionale et la direction centrale.
Les explications ont un goût d'inachevé mais cette conclusion, un peu amère, n'enlève rien à la qualité de vos propos.