L'urgence énergétique se fait de plus en plus pressante, dans tous nos territoires. Le constat est le même partout : l'explosion des tarifs de l'électricité et du gaz grèvent les budgets publics, et l'état de certains bâtiments est plus qu'inquiétant. Cet hiver, nous avons tous été choqués de constater que certains locaux d'administration, de services publics, voire certains lycées, n'étaient pas chauffés.
Pourquoi ce retard ? Il faut sans doute chercher du côté du manque de moyens : rénover près de 380 millions de mètres carrés de bâtiments publics est un défi coûteux, c'est indéniable. Mais le coût de l'inaction est tout aussi élevé.
Votre texte présente des avancées et un nouvel outil au service des élus locaux, en ouvrant le tiers-financement aux collectivités pour la rénovation énergétique de leurs bâtiments. Cependant, soyons réalistes, ce n'est pas avec cette proposition de loi, modeste, que nous accélérerons la transition énergétique du parc public.
Lors des débats sur le budget 2023, et c'est un rappel utile, plusieurs amendements de toutes les oppositions avaient été adoptés afin de renforcer les efforts budgétaires en faveur de la rénovation thermique. Ils n'ont malheureusement pas été repris suite à l'utilisation de l'alinéa 3 de l'article 49 de la Constitution par le Gouvernement.
Le groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires salue l'adoption de la présente proposition à l'unanimité des groupes présents, tant à l'Assemblée qu'au Sénat. C'est un signal positif, même si le rythme des rénovations dans le parc public est encore trop modeste. À qui la faute ? Après dix ans d'existence, les CPE n'ont, semble-t-il, pas convaincu. L'Observatoire des CPE identifie seulement une petite quarantaine de contrats en 2021, alors qu'ils génèrent en moyenne des économies d'énergie de l'ordre de 30 %, ce qui est loin d'être négligeable.
En dépit de leur promesse de performance thermique, les CPE ont un inconvénient de taille – leur coût. Notre groupe a entendu la demande de certaines collectivités en faveur de davantage de souplesse. En l'espèce, le recours au tiers-financement, avec paiement différé, a l'avantage de ne pas conduire à un décaissement initial substantiel et permet d'étaler le paiement des travaux après leur réalisation, et donc de bénéficier des économies d'énergie qui en résultent.
Le mécanisme est intéressant, mais notre groupe a exprimé quelques réserves en première lecture. La première tenait à la trop grande proximité avec les marchés de partenariat – on ne peut passer sous silence les risques qui entourent ces marchés. Il y a quelques années, le Sénat leur avait consacré un rapport dans lequel il les qualifiait de bombe à retardement. Notre groupe salue la réécriture proposée par le rapporteur, qui améliore la lisibilité du dispositif, tout en différenciant clairement CPE et partenariats public-privé.
Deuxième réserve, il ne faut pas oublier que le paiement différé que le texte autorise donnera lieu à un remboursement, certes étalé, mais avec des intérêts. Concrètement, nous autorisons les collectivités à investir au-delà de leur capacité budgétaire, ce qui peut constituer un risque. Il faudra de la prudence. En ce sens, notre groupe salue la rédaction issue de la CMP, qui limite le recours au tiers financement aux seuls cas où l'étude préalable aura démontré qu'il s'agit de l'option la plus favorable pour opérer les rénovations. Ce cadre permettra de préserver à la fois la recherche de performance thermique et la bonne gestion des deniers publics.
Enfin, il ne faut pas oublier que les collectivités ne sont pas toutes égales face à ces travaux. Sur ce point, le choix du Sénat d'inclure pleinement les intercommunalités dans le texte va dans le bon sens. La mutualisation des moyens ainsi permise sera utile, en particulier pour des contrats globaux qui concernent la rénovation de plusieurs écoles, dans les communes les plus modestes ou situées en zone rurale. Néanmoins, ce dispositif ne résout pas tout ; des fractures territoriales persisteront. Ancien élu local d'un petit territoire, je connais les difficultés, en matière de financement comme de technicité de la commande publique, qui peuvent constituer autant d'obstacles pour les collectivités locales. Il faudra que l'État accompagne vraiment les collectivités pour assurer l'ingénierie de ces contrats.
En dépit de ces réserves, en grande partie déjà levées, le groupe LIOT salue le choix d'introduire une expérimentation raisonnable de cinq ans, avec la remise d'un rapport à mi-parcours. Nous voterons donc le texte.