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Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mardi 7 mars 2023 à 15h00
Garantir le respect du droit à l'image des enfants — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

En cette veille de la Journée internationale des droits des femmes, le groupe LIOT tient à rappeler qu'il a toujours soutenu les textes tendant, d'une part, à renforcer le lien de confiance entre les citoyens et leurs représentants et, d'autre part, à apporter une protection effective aux femmes face au fléau que constituent les violences conjugales, sexuelles et sexistes. Depuis le début de la législature, nous tenons notre engagement en la matière, et nous entendons maintenir ce cap.

Au fond, quel est l'objet de ce texte ? Permettra-t-il réellement d'améliorer le sort des femmes ? Les débats en commission et les fortes réserves, émises à la fois par les groupes d'opposition et par les groupes minoritaires de la majorité, nous indiquent le contraire.

Nous vivons une période de défiance vis-à-vis des responsables politiques : dans ce contexte, le Parlement doit écrire le droit, pas se contenter de symboles politiques. Selon un sondage Ifop, 52 % des citoyens n'ont pas confiance en l'action des responsables politiques pour lutter efficacement contre les violences conjugales. En instrumentalisant la lutte essentielle contre les violences faites aux femmes à de simples fins politiques, ce texte risque donc d'envoyer un nouveau signal regrettable aux électeurs. Madame la rapporteure, personne n'est aveugle : même si son objet est louable, votre proposition de loi s'inscrit dans une démarche politicienne.

Nous sommes bien évidemment attachés au devoir d'exemplarité auquel sont tenus les parlementaires et les membres du Gouvernement. Nous devons tous être à la hauteur des missions que la Constitution nous assigne. Cette exigence n'est pas nouvelle, chacun le sait : la probité, la transparence et l'intégrité constituent une nécessité éthique, qui fonde notre contrat social. Et nous estimons que ces devoirs justifient de soumettre les responsables politiques à des règles strictes.

De fait, les violences intrafamiliales sont en totale contradiction avec le devoir d'exemplarité. Attendre d'un responsable politique qu'il s'engage pleinement contre ces violences relève du bon sens. La peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité constitue une mesure d'une sévérité particulière, limitée pour cette raison à certains faits graves d'atteinte à la probité, tels que la corruption, le favoritisme, le détournement de fonds publics, mais également aux agressions sexuelles ou aux violences aggravées, ayant entraîné plus de huit jours d'ITT.

Étendre ce caractère d'obligation à toutes les peines prononcées pour violences aggravées, y compris si celles-ci n'ont donné lieu à aucune incapacité de travail de la victime, c'est prendre le risque de dénaturer la sanction. Ainsi, pourquoi rendre obligatoire la peine d'inéligibilité pour des violences sans incapacité commises dans un moyen de transport collectif et pas dans la rue ?

Notre groupe rappelle fermement que, même en l'absence d'incapacité, toute forme de harcèlement, toute violence physique ou morale est inacceptable, à plus forte raison dans le cercle familial. Reste qu'en pratique, madame la rapporteure, la mesure que vous proposez n'aurait aucune portée dissuasive. Vous savez en outre fort bien que, si le code pénal prévoit une peine obligatoire, le juge aura toujours, pour des raisons constitutionnelles, la possibilité – et c'est heureux – d'y déroger, afin d'éviter des manipulations. Concrètement, le seul effet du texte serait donc de contraindre un peu plus la plume du juge, en le forçant à motiver davantage son choix. Doit-on y voir une nouvelle preuve de votre défiance envers le système judiciaire ?

Sur ce point et afin d'éclairer nos débats, mes chers collègues, permettez un peu d'histoire parlementaire. Dans un passé récent, tant le Gouvernement que la majorité ont appelé à la prudence en matière d'inéligibilité – la Constitution garantit le principe d'éligibilité, ce qui explique le petit nombre des exceptions. En 2017, la garde des sceaux s'opposait avec fermeté à l'extension de cette peine obligatoire hors du champ des manquements à la probité, c'est-à-dire en matière de violences et d'agressions sexuelles ; même l'actuelle présidente de notre assemblée, alors à la tête de la commission des lois, indiquait que notre rôle consistait à produire du droit, non des symboles, et signalait une difficulté de nature constitutionnelle.

Notre groupe regrette que ce texte, dont le contenu dissimule mal le caractère opportuniste, détourne un combat essentiel pour les femmes, au risque de détériorer encore l'image du monde politique.

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