Notre deuxième réserve, c'est qu'il paraît étrange de cibler certaines infractions en les qualifiant de contraires aux valeurs de la République. À ma connaissance, tous les crimes et les délits sont contraires aux valeurs de la République, sans quoi ils ne seraient pas incriminés. Nous risquons alors de naviguer entre deux écueils : faire de toute condamnation correctionnelle une cause d'inéligibilité ou opérer une sélection fondée sur la morale entre les « bonnes » et les « mauvaises » infractions, ce qui n'est jamais bon signe en matière pénale.
Notre dernière réserve est que la proposition de loi couvre un très large champ infractionnel : les anciennes violences légères de nature contraventionnelle, y compris celles n'entraînant aucune ITT, rehaussées en délit à cause d'une circonstance aggravante, comme celle d'avoir été commises dans une station de métro ou sous un abribus, en feront désormais partie. Cela commence à faire beaucoup ! Limiter l'éligibilité n'est pas a priori un bon marqueur démocratique.
Pour conclure, je rejoins l'observation de mon collègue Emmanuel Mandon devant la commission des lois : « Il ne faudrait pas que, sous prétexte d'adapter le champ d'application de l'inéligibilité aux attentes de l'opinion publique, nous nous rapprochions du mandat révocatoire ». Le groupe MODEM et indépendants votera majoritairement contre la proposition de loi.