Lorsqu'un parent ou un proche offre un smartphone à un enfant, le plus souvent de moins de 10 ans, il ne mesure guère les dangers auxquels il l'expose. Je pense en particulier aux dangers des réseaux sociaux : la Cnil constate que la première inscription à ces plateformes intervient en moyenne vers 8 ans et demi, et que plus de la moitié des 10-14 ans y sont déjà inscrits. Ces canaux, dits de divertissement et de création de liens, ne sont pas inoffensifs : ils sont responsables de nombreux troubles, dont les conséquences peuvent être dramatiques.
L'addiction constitue l'un des principaux dangers qui guettent les enfants en cas de surexposition – ce qui survient rapidement. En découvrant les réseaux sociaux, l'enfant risque d'accéder à des contenus inappropriés pour son âge, mais aussi mensongers, trompeurs voire complotistes. Seul devant son écran, il visionne des images possiblement violentes ou pornographiques, faisant la promotion de drogues ou exposant d'autres dérives de notre société. Malgré la prétendue politique des réseaux sociaux visant à protéger la sensibilité de leurs utilisateurs, l'exposition des enfants à des contenus parfaitement inadaptés à leur âge est réelle et permanente. L'algorithme de recommandation peut les entraîner d'un match de football à un match de boxe, puis à un match de rue, à des bagarres, à des accidents de rue et à des violences urbaines, voire à des meurtres.
Sur les réseaux sociaux, les enfants peuvent également entrer en contact avec des individus malveillants, véritables prédateurs qui recourent à des stratégies variées, dont l'usurpation d'identité, pour rester dans l'anonymat et solliciter des mineurs. Les conséquences de ces rencontres peuvent virer au cauchemar.
Les réseaux sociaux sont aussi, hélas, une porte d'entrée pour le cyberharcèlement, qui prend la forme de moqueries, d'insultes ou de menaces. Une chanson de Calogero l'illustre parfaitement : « La rumeur est lâchée, prête à lyncher ; / Et plus certains démentent, et plus ça l'alimente ; / La rumeur est lâchée, ton nom taché. / Elle balance et elle crache, ce sont des vies qu'elle gâche. » Il en résulte des blessures indélébiles qui mènent parfois à des drames.
Les jeunes manquent souvent de connaissances sur les arborescences des réseaux, et en ont une compréhension insuffisante. Ils ne mesurent pas l'aspect intemporel de leurs publications, qui reviendront tôt ou tard les hanter comme des boomerangs. La notion de temporalité dans leur vie amicale et affective leur échappe : ils pensent communiquer en vase clos avec leurs amis, mais nous, adultes, savons que les amis d'aujourd'hui peuvent devenir les ennemis de demain.