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Intervention de Stéphane Delautrette

Séance en hémicycle du mardi 31 janvier 2023 à 15h00
Fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et des producteurs de papier — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Delautrette :

L'examen du texte en commission a permis d'établir un fait : cette proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d'emballages ménagers et des producteurs de papier porte mal son nom. Nos débats n'ont d'ailleurs pas porté sur ce sujet, mais bien sur la sortie de la presse de la REP papiers, car il s'agit là du cœur du texte.

Soyons clairs : personne ne met en doute les difficultés que connaît le secteur de la presse depuis plusieurs années. Je souhaite d'ailleurs exprimer mon soutien à la presse nationale et régionale, essentielle à notre démocratie. En effet, la diffusion d'une information objective et le pluralisme d'opinion sont les conditions même de la liberté d'expression inhérente à notre modèle républicain.

Néanmoins, si nous partageons la volonté de protéger la presse écrite, nous n'approuvons pas la méthode promue par ce texte. En effet, faire sortir ce secteur de la filière REP papiers enverrait un très mauvais signal aux acteurs qui mettent sur le marché des produits générant des déchets. Cela risque par ailleurs d'entraîner un effet boule de neige s'étendant à tous les secteurs en difficulté, ce qui irait à rebours de nos objectifs de recyclage, alors même qu'il convient d'accélérer en la matière.

À l'heure actuelle, la filière REP papiers fonctionne convenablement, grâce à la gestion saine qu'assurent conjointement les collectivités et l'éco-organisme Citeo, qui permet d'ailleurs, grâce aux gestes de tri des citoyens, d'atteindre un taux de recyclage d'environ 62 %. Jusqu'au 31 décembre 2022, la presse écrite pouvait, au choix, s'acquitter financièrement de son écocontribution ou s'en acquitter en nature, en mettant à disposition des encarts publicitaires. Si votre proposition de loi est adoptée en l'état, Citeo ne pourra plus réclamer d'écocontribution à ce secteur, ce qui aura pour conséquence directe la baisse des moyens alloués aux collectivités territoriales chargées de la prévention, de la collecte, du tri et du recyclage du papier. C'est d'ailleurs pour cette raison que les trois associations Cercle national du recyclage, Amorce et Intercommunalités de France s'opposent à ce texte, arguant qu'il va « à l'encontre de la dynamique de recyclage, du financement de la collecte, du tri et du recyclage des papiers ».

Pour justifier votre proposition de loi, vous invoquez la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets, qui, d'après votre lecture, imposerait un règlement en numéraire de l'écocontribution, excluant ainsi la possibilité d'une contribution en nature. En clair, vous dites : pour soutenir économiquement la presse, sortons-la de la REP papiers et évitons de lui demander une contribution financière à la protection de l'environnement.

Ayant lu attentivement cette directive, nous pensons qu'il existe une solution plus responsable, une solution de compromis, qui permettrait de maintenir le secteur de la presse au sein de la REP papiers tout en adaptant notre droit aux réalités économiques du secteur, mais aussi aux règles européennes en vigueur. Celles-ci autorisent en effet la presse à s'acquitter de son écocontribution à la fois financièrement et en nature, en contribuant à hauteur de 50 % par des encarts destinés à la communication environnementale des collectivités territoriales, et à hauteur de 50 % par des versements à l'éco-organisme. J'ajoute que le Gouvernement pourrait également renforcer les subventions allouées à la presse pour l'aider à verser son écocontribution – je pense notamment à la presse quotidienne régionale.

Nous comptons vous soumettre par voie d'amendement cette solution de compromis qui permet à la fois de soutenir la presse et de consolider la filière REP papiers, ce qui nous rapprochera de nos objectifs en matière de recyclage. Elle est plus rigoureuse et plus robuste que le système de conventions de partenariat promu dans le texte, qui n'a pas réellement convaincu en commission. Elle répond également aux inquiétudes dont nous ont récemment fait part les collectivités, les associations et les éco-organismes.

Ne faisons pas d'économies de bouts de chandelle sur un modèle de développement durable qui fait ses preuves.

Nous espérons vivement être entendus. Autrement, le groupement Socialistes et apparentés votera contre ce texte, qui n'apporte aucune solution ambitieuse et exigeante pour consolider et préserver la filière REP papiers.

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