Un dernier mot sur le prétendu laxisme de la justice. Tous les chiffres, monsieur Guitton, démontrent le contraire. Nicole Belloubet n'a accordé aucune faveur aux détenus. Elle a pris une mesure sanitaire qui a permis de sauver des vies – ce qui ne vous intéresse peut-être pas. La surpopulation carcérale est bien la preuve que la justice n'est pas laxiste !
Madame Martin, je tiens à vous rassurer sur le choix de l'ordonnance. L'objectif n'est pas d'exclure le Parlement, mais la réécriture du code de procédure pénale à droit constant est un travail technique, qui prendra vraisemblablement dix-huit mois à deux ans. Compte tenu de sa complexité, j'ai d'ailleurs mis en place un comité scientifique.
S'agissant des cadres d'enquête, nous voulons procéder à une simplification. Le code de procédure pénale est devenu illisible. Tous les délais ne se calculent pas de la même façon. Certains articles renvoient à quatre autres articles. Les professionnels ne s'y retrouvent plus, entre le dies a quo et le dies ad quem, la prise en compte ou non des jours chômés, etc.
Le Parlement sera associé à la réécriture du code de procédure pénale, conformément au souhait du Président de la République. Les parlementaires pourront suivre l'avancée des travaux. Les modalités seront précisées prochainement, mais tous ceux qui voudront participer à la démarche en auront la possibilité.
Certaines de ces mesures opérationnelles seront inscrites dans le dur de la loi ; elles ont toutes pour but de donner aux magistrats les moyens supplémentaires, la simplification et la pause législative qu'ils réclament, sans modification, donc, du code pénal. Dans une démocratie, n'est-on quand même un peu obligé de consulter le Parlement – les mesures réglementaires mises à part – pour abroger des dispositions législatives ? Pour simplifier le cadre législatif, je suis donc bien obligé de vous soumettre une loi nouvelle : il ne s'agit pas du tout d'ajouter de la complexité. Si nous voulons éviter que trois magistrats soient obligés de se réunir pour modifier un contrôle judiciaire, par exemple, nous n'avons pas d'autre solution.
S'agissant du partenariat entre la PJJ et l'armée, il ne s'adressera qu'à de jeunes volontaires. Le dispositif associera l'expertise de la première et l'autorité bienveillante – mais autorité tout de même, je le concède – de la seconde, qui transmettra les valeurs qui sont les siennes, comme le dépassement de soi et la solidarité. L'expérimentation menée à Coëtquidan a fonctionné. Placer tous les délinquants dans des casernes ne peut pas être une solution mais, pour certains d'entre eux, cette expérience peut s'avérer très bénéfique.
Nous allons également profiter des Jeux olympiques et paralympiques pour mettre en place des partenariats entre la PJJ et le monde du sport. La création de centres éducatifs fermés doit en outre se poursuivre, parce que les résultats obtenus sont encourageants.
Monsieur Gosselin, j'ai bien aimé votre référence au juge de paix. Je défends totalement cette idée, car les justiciables considèrent à la fois que la justice est trop lente et qu'elle ne les écoute pas.
En matière de procédure pénale numérique (PPN), des avancées ont déjà eu lieu, notamment concernant le classement, et des évolutions importantes interviendront fin 2023.
Les tribunaux paritaires des baux ruraux ne seront pas remis en cause, car cette juridiction fonctionne.
Vous connaissez déjà ma réponse s'agissant des peines planchers. Si je pensais qu'une telle mesure était utile, je la mettrais en place. Mais les résultats n'ont pas été probants. Je suis en outre attaché à la liberté juridictionnelle. Or les peines planchers y sont une entrave, même si, dans le dispositif que vous aviez instauré, les juges avaient la possibilité d'y déroger. Dans ce cas, quel est l'intérêt d'une telle mesure ?
Contrairement à ce que certains affirment, la justice n'est pas laxiste. En matière correctionnelle comme en matière criminelle, les peines ont augmenté en vingt ans. Lorsque certains disent que la justice est laxiste, ils visent le ministre. Ils oublient que le garde des sceaux ne donne aucun ordre aux magistrats, et qu'il en est très bien ainsi : cela s'appelle l'état de droit. Ceux qui critiquent en permanence la justice ont une piètre conception de ce dernier !
Je pense avoir tout dit au sujet du référentiel, Madame Untermaier. Nicole Belloubet a souhaité relancer cet outil, que certains avaient oublié mais qui est très utile. Je le répète, ce n'est pas en cachant les problèmes qu'on peut les régler.
Monsieur Pradal, je vous remercie pour vos propos encourageants. Je partage évidemment vos préoccupations concernant l'application des lois. Pour celles issues des états généraux de la justice, le Parlement sera étroitement associé à l'élaboration des textes réglementaires, de manière à préserver la cohérence de notre plan. De ce point de vue, je me suis déjà longuement attardé sur les mesures civiles.
Je souhaite développer les TIG. Cette peine existe depuis longtemps et elle est utile. Nous avons mis en place la plateforme 360°. Les associations qui auront reçu l'habilitation de la direction de l'administration pénitentiaire (DAP) pourront accueillir des tigistes. Dans ma dernière circulaire de politique générale, j'ai insisté sur l'intérêt des TIG, que je souhaite redynamiser. Depuis 2018, les offres ont augmenté de plus de 43 %. Aujourd'hui, 34 758 places sont disponibles et 26 000 postes sont actifs. Ils sont 3 456 à recevoir des mineurs, pour qui ils représentent souvent une première expérience professionnelle.
À la suite de la loi du 23 mars 2019 de programmation pour la justice et de la loi du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale, le recours aux TIG a été accru. Les prononcés de peine impliquant un TIG ont diminué en 2020, notamment durant la crise sanitaire. En 2021, ils se sont élevés à 24 000, soit un niveau comparable à 2019. Je souhaite que l'augmentation se poursuive, car cette peine favorise la réinsertion.
Monsieur Iordanoff, vous soulignez mon silence sur la réforme du statut du parquet, mais je vous rappelle que celle-ci est constitutionnelle et qu'une réflexion est en cours sur l'évolution de nos institutions.
J'entends souvent que le parquet ne serait pas indépendant, ce qui n'est pas l'avis des institutions européennes. Je me permets de le rappeler, puisque vous vous citez en permanence la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (Cepej). Je signale en outre que celle-ci a deux ans de retard et que seul son rapport de 2024 prendra en considération les dernières augmentations budgétaires que nous avons réalisées.
Nous ne cherchons pas à contourner les tribunaux, au contraire. Vous évoquez un possible déséquilibre entre les parties, mais vous oubliez, y compris dans le cadre de la césure, le rôle du juge et des avocats, qui bénéficieront en outre d'une aide juridictionnelle revalorisée. Si les justiciables sont insatisfaits de la médiation, ils pourront de toute façon quitter la procédure et revenir dans un schéma classique, c'est-à-dire à une procédure qui, au gré des mises en état, expertises et contre-expertises, dure deux ou trois ans. On ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre !
Nous ne pouvons pas considérer qu'une justice rendue dans un délai de deux ou trois ans est acceptable. En tout cas, elle ne l'est pas pour 77 % de nos compatriotes. Il faut donc encourager le développement des solutions amiables. Si vous m'aviez accompagné aux Pays-Bas et au Canada, vous auriez compris ce que nous souhaitons faire. Je vous invite à suivre ce que nous allons présenter le 13 janvier. Des professionnels de ces pays expliqueront à nos praticiens comment ces nouvelles procédures fonctionnent. Elles ont fait leurs preuves au Québec par exemple, où elles sont utilisées par 72 % des justiciables. La justice est mieux rendue, car elle est plus proche des citoyens, plus protectrice et plus rapide.
Quant aux seuils d'occupation carcérale, des réunions sont déjà organisées avec les chefs de cour ou de juridiction, tenus informés de la situation par la DAP.
Mme Faucillon m'a interpellé sur la situation particulière du tribunal de Nanterre.