Notre commission d'enquête chargée d'établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique a le plaisir d'accueillir aujourd'hui un ancien collègue en la personne de François Brottes, au titre des fonctions qu'il a exercées à la présidence du directoire de la société anonyme Réseau de transport d'électricité (RTE).
Monsieur Brottes, vous connaissez très bien le système énergétique français. En effet, lorsque vous étiez député et président de la commission des affaires économiques de notre Assemblée, vous avez activement participé aux travaux parlementaires qui s'y rapportaient. Vous avez également présidé plusieurs commissions d'enquête, notamment sur les tarifs de l'électricité et sur les coûts de la filière nucléaire. Vous avez par ailleurs présidé la commission spéciale sur le projet qui deviendra la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) de 2015. Avant d'être nommé conseiller-maître à la Cour des comptes, vous avez exercé de 2015 à 2020 les responsabilités de président du directoire de RTE et avez été auditionné le 9 avril 2019 par la commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité des politiques de transition énergétique. Le compte-rendu de cette audition constitue d'ailleurs une source d'information précieuse pour notre commission d'enquête.
La situation énergétique actuelle de la France a mis en évidence le rôle majeur incombant à RTE. Son activité ne se limite pas au dispositif Ecowatt, qui devient progressivement familier à nos compatriotes. Chargé d'assurer l'équilibre de la production et de la consommation sur le réseau électrique, RTE constitue un maillon essentiel de notre système énergétique français.
Au cours de votre mandat à la direction de RTE, plusieurs faits marquants se sont produits : l'ouverture du capital de RTE, initialement détenu à 100 % par EDF ; le déploiement des interconnexions avec nos partenaires européens ; le raccordement sur le réseau de sources d'énergies renouvelables intermittentes et disséminées ; l'émergence d'un principe de solidarité entre les pays de l'Union européenne ; la mise en place d'outils de planification régionale et la programmation de fermetures de sites de production électrique, lesquelles n'étaient pas toujours justifiées par un objectif de décarbonation.
RTE doit composer non seulement avec les ministères, mais aussi avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) pour son programme d'investissement et pour la fixation du tarif d'utilisation du réseau public électrique (Turpe). Il doit aussi compter sur les subventions européennes, accordées notamment pour les interconnexions, en se conformant aux schémas définis par les instances européennes. Ces financements doivent soutenir son fonctionnement et ses investissements. RTE est une filiale d'EDF, mais jouit d'une autonomie fonctionnelle et décisionnelle vis-à-vis de cette entreprise. Ainsi, en vertu des textes européens, les ressources et les charges de RTE et d'EDF sont distinctes, mais partiellement interdépendantes.
La crise actuelle a montré qu'outre la quantité d'électrons consommée, éventuellement économisée, produite, importée et exportée, les questions liées aux tarifs et aux prix exigeaient également une plus grande transparence.
Enfin, c'est sous votre mandat qu'a été lancée l'étude « Futurs énergétiques 2050 », qui envisage une augmentation de la consommation d'électricité et étudie diverses options, dont celle d'un scénario 100 % d'énergies renouvelables. Ce travail suit celui réalisé en 2017, pendant l'exercice de votre mandat au sein de RTE, sur les perspectives électriques de la France de 2017 à 2035, qui prévoyait une stabilité, voire, une baisse de la demande électrique qui aurait permis d'atteindre les objectifs de la loi évoquée précédemment. Ces tendances ont néanmoins été contredites par les textes ultérieurs et par les faits.
Je rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».