Ce site présente les travaux des députés de la précédente législature.
NosDéputés.fr reviendra d'ici quelques mois avec une nouvelle version pour les députés élus en 2024.

Intervention de Jean-Louis Bricout

Réunion du mercredi 14 décembre 2022 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Introduire une présomption générale de légitime défense pour les forces de l'ordre ne serait pas seulement contreproductif, cela porterait aussi atteinte aux fondements de notre justice pénale. Au sein du groupe LIOT, nous ne voyons dans cette proposition de loi ni une avancée pour les policiers et les gendarmes, ni une amélioration de notre procédure pénale. Nous discernons, au contraire, toutes les failles d'un texte écrit sous le coup de l'émotion, en réaction à l'actualité. Ce n'est pas ainsi que l'on modifie la loi, en particulier le code de procédure pénale. Le législateur doit toujours faire preuve de réserve, de recul et de précaution en la matière.

L'exposé des motifs s'appuie sur la recrudescence des violences subies par nos forces de sécurité intérieure. Au groupe LIOT, nous ne sommes pas dans l'angélisme : il est indéniable que policiers et gendarmes sont exposés au quotidien à des violences physiques et verbales. Nous savons à quel prix ils accomplissent souvent leur mission. Cependant, en quoi ce texte les aiderait-il ? En quoi leur apporterait-il appui et protection ? En quoi améliorerait-il leur quotidien ?

Contrairement à ce que vous laissez entendre dans votre exposé des motifs, afin de vérifier la mise en œuvre du principe de légitime défense, les juges prennent en compte la qualité de policier ou de gendarme. Il est donc faux de laisser penser que le droit actuel les met sur le même plan que les délinquants. En répandant cette idée, vous contribuez à alimenter la méfiance envers les juges.

Notre cadre juridique repose sur un équilibre strict. Les conditions actuelles de la légitime défense ne sont pas restrictives et permettent déjà de répondre aux atteintes portées à nos forces de sécurité. Outre le principe de légitime défense, policiers et gendarmes bénéficient, depuis 2017, de règles unifiées leur permettant d'utiliser leur arme dans des cas d'absolue nécessité, strictement encadrés. L'équilibre et la proportionnalité assurent un fonctionnement correct de notre justice pénale. Avec votre présomption générale et très vague, vous proposez tout l'inverse – un très mauvais signal à envoyer, selon notre groupe.

En réalité, votre proposition ne fait qu'inverser la charge de la preuve, et le parquet pourrait toujours prouver que les conditions de la légitime défense n'étaient pas réunies. Le texte fait simplement miroiter aux policiers et aux gendarmes une illusion de protection ; elle n'est qu'un écran de fumée.

Les membres de notre groupe ne seront pas les dupes d'une proposition de loi qui n'a que peu d'intérêt – plutôt qu'un marqueur politique, c'est un coup qui fait pschitt. Elle ne permettrait en rien de calmer les inquiétudes légitimes des policiers et des gendarmes, ni de répondre aux agressions qui mettent en péril leur vie ou celle d'autrui. Notre groupe votera donc contre ce texte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.