Le travail du rapporteur nous permet de mesurer à quel point les conditions de recevabilité ne sont pas au rendez-vous. Je le dis clairement, c'est la première fois que je vois une proposition de résolution dont le champ soit aussi large. Je plains le garde des Sceaux, qui a dû faire la liste des affaires judiciaires liées à des « ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères – États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées – visant à influencer ou à corrompre des relais d'opinion, des dirigeants ou des partis politiques français ». Je ne vois pas comment il a pu répondre à cette question, sauf à embarquer tous les dossiers de la chancellerie…
Mes réserves, nombreuses, portent aussi sur le libellé de l'exposé des motifs, qui juge utile de préciser que « la commission pourra être amenée à connaître de graves manquements, de délits voire de crimes qui devront immédiatement être confiés à la Justice ».
Je vous rejoins totalement sur l'opportunité d'une telle commission, monsieur Tanguy. Je serai toujours au côté des groupes qui veulent travailler sur l'éthique en politique, sur la déontologie et la transparence – travaux que je mène depuis plusieurs décennies.
Mais s'agissant de la recevabilité de la proposition, la condition de l'article 137 du règlement n'est pas remplie. Nous n'avons aucun contour qui nous permette de déterminer où la commission d'enquête ira chercher, quels sont les points qu'elle entendra soulever. Je le dis de manière constructive car je crains que le sérieux des travaux de l'Assemblée nationale ne soit entaché et que le futur président de la commission d'enquête ne soit confronté à des difficultés.
Le groupe Rassemblement national exerçant son droit de tirage, nous considérons que nous n'avons pas à nous opposer à la création de la commission d'enquête. Mais nous estimons que la commission des lois, tirant les conséquences de cet épisode, doit penser à faire évoluer le règlement. Une proposition de résolution qui pose des problèmes de recevabilité devrait faire l'objet d'un nouvel examen par la commission, pour vérifier que ses préconisations ont bien été prises en compte. Dans le cas d'espèce, un périmètre plus restreint nous permettrait de mieux comprendre l'objet de cette commission et d'y participer activement.
Le groupe Socialistes et apparentés s'abstiendra.