L'examen de la proposition de loi constitutionnelle visant à garantir le droit à l'interruption volontaire de grossesse, déposée par Mme Aurore Bergé, Mme Marie-Pierre Rixain et les membres du groupe Renaissance, a lieu au lendemain du cinquantième anniversaire du procès de Bobigny, au cours duquel Gisèle Halimi a défendu Marie-Claire Chevalier, jugée pour avoir avorté après avoir été violée, ce qui a ouvert la voie à la légalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Il intervient aussi concomitamment aux élections de mi-mandat aux États-Unis. Plusieurs de nos collègues ont déposé des propositions de loi constitutionnelles à ce sujet pour protéger, dans notre pays, ce qui est remis en cause, de façon inattendue, dans d'autres.
Dans l'arrêt rendu le 24 juin dernier, la Cour suprême des États-Unis a considéré que l'avortement n'est pas protégé par la Constitution fédérale, revenant sur une jurisprudence établie et solide qui, depuis 1973, offrait au droit à l'avortement une protection fédérale. Ce revirement spectaculaire ne peut que nous mettre en garde contre la possibilité d'une mise en cause, ailleurs dans le monde, des jurisprudences les plus établies.
Certes, la décision d'une juridiction étrangère est sans conséquence sur notre ordre juridique interne. Toutefois, cet arrêt procède d'un mouvement insidieux de remise en cause du droit à l'avortement, observable par exemple dans certains pays d'Europe centrale et orientale. Depuis 2020, en Pologne, l'IVG n'est plus possible en cas de malformation du fœtus. En Hongrie, les femmes souhaitant avorter doivent désormais écouter le cœur de leur fœtus avant de procéder à l'IVG. Quant à la position personnelle d'opposition à l'IVG de la nouvelle présidente du conseil italien, Mme Meloni, elle ne peut que nous inquiéter, s'agissant d'un pays où l'accès concret à l'avortement reste compliqué.
Pour ces raisons, les auteurs de la proposition de loi constitutionnelle visant à garantir le droit à l'interruption de grossesse en avaient déposé une première version dès le 30 juin dernier, et ce texte sera le premier texte inscrit à l'ordre du jour de la première semaine de l'Assemblée de la XVIe législature. D'autres groupes ont déposé des propositions de lois similaires, présentées notamment par Mme Panot et par Mme Untermaier. Toutefois, le règlement interdit, depuis 2010, l'examen concomitant de plusieurs propositions de loi dont l'objet est identique.