Publié le 30 janvier 2023 par : M. Juvin, Mme Anthoine, M. Hetzel, M. Nury, M. Viry, Mme Louwagie, M. Ray, M. Dubois, M. Vincendet, Mme Corneloup, M. Thiériot, M. Brigand.
I. – Après l’article L. 351‑1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 351‑1‑1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 351‑1‑1 A. – Il est institué, en vue de l’acquisition de droits à la retraite, pour l’ensemble des assurés du privé, un fonds public d’épargne retraite souverain collectif obligatoire, par points, provisionné et par des cotisations prélevées sur la part salariale et la part employeur du salaire brut.
« Le pourcentage du salaire brut ainsi prélevé est fixé par décret en Conseil d’État et ne peut dépasser 2 % du salaire brut. Les cotisations sont réparties à parts égales entre les employeurs et les salariés.
« La liquidation des droits des bénéficiaires est subordonnée à la condition qu’ils aient atteint l’âge mentionné à l’article L. 161‑17‑2 du code de la sécurité sociale et aient été admis à la retraite.
»Les bénéficiaires de ce fonds bénéficient des cotisations minorées prévues à l’article L136‑8 du code de la sécurité sociale selon des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Les droits à la retraite prévus par ledit article viennent en complément du régime général et des régimes complémentaires.
« La retraite mise en paiement par le fonds public d’épargne retraite est servie en rente. Toutefois, pour les bénéficiaires ayant acquis un nombre de points inférieur à un seuil déterminé par décret en Conseil d’État, elle est servie en capital.
« Ce fonds est géré par un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle de l’État. Il est administré par un conseil d’administration composé, notamment, de représentants des employeurs et de représentants des bénéficiaires cotisants.
« Cet établissement est doté d’un règlement intérieur qui fixe les conditions d’utilisation du fonds, les modalités de placement de celui-ci et garantit son utilisation aux seules fins de bonifier le capital en vue de son versement aux assurés. Toute autre utilisation du fonds est interdite.
« Le capital de ce fonds public d’épargne retraite souverain collectif obligatoire est garanti d’année en année par l’État. »
II. – Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État.
III. – Le présent article entre en vigueur le 31 décembre 2023.
IV. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Considérant les limites d’un système de retraites par répartition et le vieillissement de la population, les cotisants ne sont plus assez nombreux pour assurer aux retraités un niveau de pension constant tout en maintenant des comptes équilibrés.
Les Français peuvent certes déjà compléter leur future retraite par des mécanismes d’épargne. Mais ceux-ci sont individuels (par exemple l’assurance-vie), donc réservés à ceux qui peuvent cotiser, et coûtent cher en frais de gestion (à titre d’exemple, la gestion du Fonds de réserve pour les retraites est de l’ordre de 0,15 % là où les frais d’assurance-vie s’élèvent de 1 % à 3 %). Seul le caractère collectif et obligatoire permettra à tous d’en bénéficier.
Dans les pays où ils existent, ces fonds ont une double utilité. Ils complètent les retraites par répartition et ils investissent à long terme les sommes collectées dans l’économie. Ils créent de la richesse pour le pays, ce que ne peut faire un système par répartition pur, qui dépense immédiatement l’argent ponctionné. Les actifs collectés représentent en moyenne 64 % de la valeur du PIB dans les pays de l’OCDE dotés de ces fonds. En Norvège, le fonds de pension souverain pèse 280 % du PIB… Dans le passé, c’est grâce à de tels capitaux longs que le rail et les canaux de la révolution industrielle, et, plus récemment, l’industrie numérique américaine, ont pu se développer.
C’est pourquoi, il est urgent d’introduire – sur le modèle du fonds de pension des fonctionnaires (ERAFP) – une capitalisation collective. Cette épargne collective épaulera la répartition et donnera accès à tous les salariés de France aux rendements des marchés financiers, ce qui permettra de généraliser le partage des profits par le haut.
Tel est par exemple aussi le modèle des pharmaciens qui ont introduit en 2009 une capitalisation collective qui finance aujourd’hui 50 % de leurs retraites. Pareil pour le Sénat et la Banque de France, qui, protégés par leur indépendance, ont développé leurs capitalisations collectives depuis plus d’un siècle.
L’objet du présent amendement est ainsi de proposer que chaque salarié du privé bénéficie d’un compte personnel, alimenté tous les mois par des cotisations patronales et salariales, de même proportion du salaire brut. Le nombre de points attribué chaque année sera égal au rapport entre les cotisations versées et la valeur d’acquisition du point pour l’année considérée.
Pendant de la Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), ce fonds public d’épargne retraite souverain collectif obligatoire, sera géré sur le modèle de l’Agirc-Arrco, ce qui permettra de bénéficier des avantages d’une gouvernance paritaire au sein d’une caisse de retraite ayant une forte légitimité. Comme pour le RAFP, les cotisations seront placées afin de les bonifier, aux seules et uniques fins d’être versées aux bénéficiaires – le FRR a échoué dans ses objectifs initiaux par la volonté des gouvernements successifs qui ont largement prélevé celui-ci à des fins d’expédients budgétaires. Cette disposition vise à protéger l’argent des Français contre l’État.
Au moment du départ à la retraite, le retraité bénéficiera d’une rente garantie à vie par l’État, en complément de la rente versée par répartition qu’elle ne vient pas remplacer. Cette rente sera représentée par le fruit du placement de ses versements bonifiés. Les salariés du privé bénéficieront ainsi des mêmes avantages que les fonctionnaires (cotisations salariales déductibles du revenu, possibilité de sortie en capital en deçà d’un certain montant de droits accumulés, fiscalité de la rente, reversions…).
Cette réforme doit se faire selon un principe de « neutralité pour la fiche de paie ». La création de ce fonds se fera concomitamment à la réduction de la CSG-CRDS sur les salaires et/ou des cotisations patronales, pour éviter toute dégradation de la compétitivité ou du pouvoir d’achat.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.