Publié le 24 novembre 2022 par : M. Iordanoff, Mme Arrighi, M. Bayou, Mme Belluco, M. Ben Cheikh, Mme Chatelain, M. Fournier, Mme Garin, M. Julien-Laferrière, Mme Laernoes, M. Lucas, Mme Pasquini, M. Peytavie, Mme Pochon, M. Raux, Mme Regol, Mme Rousseau, Mme Sas, Mme Sebaihi, M. Taché, Mme Taillé-Polian, M. Thierry.
L'article unique est ainsi rédigé :
L'alinéa 2 de l'article 1er de la Constitution est ainsi rédigé :
« Elle garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse »
Le présent amendement est le fruit d’une réflexion collective visant à établir une rédaction susceptible de rencontrer un large consensus sur les bancs de l’Assemblée nationale.
Cette rédaction permet de reconnaître le droit à l’IVG comme un principe fondamental de nature constitutionnelle et d’y apporter une protection élevée contre de futures atteintes. La formulation renvoie également à la loi le soin d’en garantir l’effectivité et l’égal accès. Elle envoie enfin un signal au reste du monde en faisant de la France le premier pays à inscrire l’IVG dans son texte fondamental.
Par rapport à la proposition de loi constitutionnelle initiale, cette rédaction est plus ambitieuse. Il ne faut pas se contenter d’une constitutionnalisation a minima qui n’apporterait que peu de garanties contre une éventuelle régression. La seule reconnaissance du droit à l’IVG ne suffit pas si les conditions de son exercice sont trop limitatives. Il faut se donner une norme avec un peu de consistance et définit les conditions dans lesquelles une loi serait inconstitutionnelle. C’est pourquoi il est fait référence à « l’effectivité et l’égal accès » à ce droit. La notion d’effectivité exige qu’il s’agisse d’un droit réel (délai d’au moins quatorze semaines, absence d’obligation en matière de délai de réflexion ou de consentement des représentants légaux, existence de professionnels disponibles et formés). L’égal accès renvoie à la possibilité pour toute personne qui en fait la demande de réaliser une IVG, quelle que soit sa situation géographique, familiale ou financière, ce qui suppose notamment la gratuité de cet acte et l’existence d’un maillage territorial suffisant avec des professionnels acceptant de réaliser les IVG. Enfin, le caractère « volontaire » de l’interruption volontaire de grossesse renvoie à la liberté de choix des personnes qui décident d’y recourir. L’interruption ne peut leur être imposée et est nécessairement consentie dès lors que la personne en fait la demande, sans que ce consentement ne doive faire l’objet d’une vérification particulière.
Enfin, le choix d’inscrire cette protection à l’article 1er de la constitution permet de donner tout son sens et sa cohérence à cette constitutionnalisation. A vrai dire, on peine à saisir la pertinence d’une telle consécration au titre VIII de notre Constitution consacré à l’autorité judiciaire dans la mesure où le droit à l’avortement s’exerce en dehors de toute procédure judiciaire. Le droit à l’avortement gagnerait, au contraire, à être gardé dans le corps de l’article 1er de la Constitution et ce, au moins pour deux raisons : d’abord parce qu’il est devenu, au fil des révisions, le lieu d’inscription des droits et libertés. Nous y faisons figurer l’égalité, la laïcité, et la parité. Il serait logique que les choix souverains des individus en matière de procréation le soient aussi ; par ailleurs, il ne faut pas voir la question de l’IVG uniquement sous l’angle de l’autonomie personnelle mais aussi de la pleine égalité entre les hommes et les gemmes. Ainsi que l’indiquent les juristes Stéphanie Hennette-Vauchez et Diane Roman, « il y a un intérêt fort qui s’attache au fait d’affirmer l’avortement non pas seulement comme un droit d’autonomie et de vie privée, articulé à titre principal à une décision des femmes, mais comme l’une des conditions de la pleine égalité entre les personnes : c’est seulement si les femmes se voient reconnaître une autonomie reproductive et les coûts de la reproduction humaine sont socialement équitablement distribués que tous et toutes pourront authentiquement prendre part à parts égales à la vie sociale, politique, économique et civile ».
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