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Encadrer l'intervention des cabinets de conseil privés — Texte n° 366

Amendement N° CL159 (Adopté)

Sous-amendements associés : CL167 CL166

Publié le 23 janvier 2024 par : M. Millienne.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia 

Rédiger ainsi cet article :

« I. – Avant chaque prestation de conseil, le prestataire et les consultants adressent à l’administration bénéficiaire une déclaration d’intérêts qui atteste de l’absence de conflits d’intérêts au sens du I de l’article 9 de la présente loi, ou qui identifie, le cas échéant, les potentiels conflits d’intérêts les concernant, dans les conditions prévues au II et III du présent article.
« En cas de modification substantielle des intérêts détenus au cours de la prestation, le prestataire et les consultants actualisent leur déclaration dans un délai de quinze jours et selon les mêmes modalités.
« Lorsqu’un consultant est affecté à la réalisation d’une prestation de conseil en cours de réalisation, celui-ci adresse la déclaration d’intérêts prévue au premier alinéa avant le début de sa mission.
« II. – Lorsque le prestataire estime être en situation de conflit d’intérêts potentiel, il en indique dans sa déclaration d’intérêts les raisons, qui portent notamment sur :
« 1° Les prestations réalisées au cours des cinq dernières années auprès d’un client dont les intérêts entrent en interférence avec ceux de l’administration bénéficiaire et dont l’objet est en lien avec celui de la prestation de conseil concernée ;
« 2° Les prestations réalisées, dans les mêmes conditions, par la société qui contrôle, directement ou indirectement, le prestataire au sens de l’article L. 233‑3 du code de commerce, ainsi que par les filiales du prestataire.
« III. – Lorsque le consultant estime être en situation de conflit d’intérêts potentiel, il en indique dans sa déclaration d’intérêts les raisons, qui portent notamment sur :
« 1° Les activités professionnelles ayant donné lieu, au cours des cinq dernières années, à rémunération ou à gratification ;
« 2° Les prestations réalisées au cours des cinq dernières années auprès d’un client dont les intérêts entrent en interférence avec ceux de l’administration bénéficiaire et dont l’objet est en lien avec celui de la prestation de conseil concernée ;
« 3° Les participations, au cours des cinq dernières années, aux organes dirigeants d’un organisme public ou privé ou d’une société dont les intérêts entrent en interférence avec ceux de l’administration bénéficiaire et qui intervient dans un domaine en lien avec celui de la prestation de conseil concernée ;
« 4° Les participations financières directes détenues dans une société dont les intérêts entrent en interférence avec ceux de l’administration bénéficiaire et qui intervient dans un domaine en lien avec celui de la prestation de conseil concernée ;
« 5° Les activités professionnelles exercées, à la date de la prestation, par le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ;
« 6° Les fonctions bénévoles susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts à la date de la prestation ;
« 7° Les fonctions et mandats électifs exercés au cours des cinq dernières années.
« L’appréciation du conflit d’intérêts potentiel tient compte des responsabilités passées et présentes du consultant. »
« IV. – En cas de doute sur l’appréciation du risque de conflit d’intérêts au sens du I de l’article 9 de la proposition de loi, ou sur l’exactitude ou la sincérité d’une déclaration d’intérêts, l’administration bénéficiaire saisit le référent déontologue. Si le doute persiste, le référent déontologue saisit la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, qui en assure le contrôle en application de l’article 12.

« IV bis. – Les déclarations d’intérêts sont conservées, selon des modalités garantissant leur confidentialité, jusqu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la fin de la réalisation de la prestation. Elles sont alors détruites dans le respect de la confidentialité des éléments qu’elles contiennent.

« Toutefois, en cas de poursuites fondées sur un manquement en lien avec des éléments contenus dans les déclarations d’intérêts, la destruction de ces documents est suspendue jusqu’à l’expiration du délai au terme duquel les voies de recours contre la décision éventuellement prise à l’issue de la procédure engagée sont épuisées.

« IV ter. – Au 1° de l’article L. 311‑5 du code des relations entre le public et l’administration, après les mots : « Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, », sont insérés les mots : « les déclarations d’intérêts mentionnées à l’article 10 de la loi n° - du encadrant l’intervention des cabinets de conseil privés dans les politiques publiques, ».

« V. – Le modèle, le contenu et les modalités de transmission, de mise à jour et de conservation des déclarations d’intérêts sont fixés par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »

Exposé sommaire :

L’article 10 prévoit la remise d’une déclaration d’intérêts à l’administration bénéficiaire par les prestataires et les consultants, et ce, avant le début de chaque prestation de conseil.

Pour les prestataires, la déclaration d’intérêts comporterait la déclaration des missions réalisées par le prestataire, par ses filiales et par sa société mère.

Pour les consultants, le contenu de la déclaration d’intérêts exigée par le présent article serait aligné sur celui des déclarations que les responsables publics (et notamment les membres du Gouvernement) doivent transmettre à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Cette obligation paraît disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi et présente plusieurs difficultés :

- elle exige la transmission systématique de nombreuses informations, même dans les cas où les risques de conflit d’intérêts seraient limités voire inexistants, et risque notamment de porter atteinte à la vie privée des consultants ;

- elle constitue une formalité administrative très lourde, tant pour les prestataires et les consultants que pour les administrations bénéficiaires, et pourrait dissuader certains cabinets de réaliser des prestations de conseil pour l’administration ;

- elle implique que l’administration bénéficiaire soit en mesure d’analyser l’intégralité des déclarations reçues, et fait peser sur elle l’appréciation du risque de conflit d’intérêts potentiel, alors même qu’elle ne possède pas des moyens juridiques de contrôler la déclaration ;

- elle présente le risque d’engorger la HATVP (qui serait seule dotée des moyens de contrôler la déclaration) ;

- enfin, les prestataires et les consultants deviendraient les seuls cocontractants de l’administration pour lesquels une déclaration d’intérêts est exigée, sans que cette situation ne semble justifiée. Ils seraient par ailleurs soumis à des obligations déclaratives approfondies même lorsque la prestation concernée ne présente pas de risque particulier d’influence sur la décision publique, et feraient de ce fait l’objet d’obligations bien plus lourde que les représentants d’intérêts, dont l’activité principale ou régulière est pourtant d’influer sur la décision publique.

Afin d’assurer un juste équilibre entre la volonté d’assurer un meilleur contrôle du risque de conflit d’intérêts des prestataires et des consultants, la recherche d’un formalisme adapté, et la préservation de la vie privée des consultants, il paraît plus pertinent de prévoir la remise d’une déclaration attestant l’absence de conflit d’intérêts.

Lorsque le prestataire ou le consultant estimerait être en situation de potentiel conflit d’intérêts, il devrait alors en déclarer les raisons à l’administration bénéficiaire : seules les informations pertinentes seraient transmises à l’administration.

Le document n’en resterait pas moins opposable : en cas de déclaration insincère, les sanctions prévues par la proposition de loi seraient bien applicables (et notamment l’amende administrative et l’exclusion des marchés publics).

Enfin, l’appréciation du conflit d’intérêts potentiel tiendrait compte des responsabilités passées et présentes du consultant, le risque de conflit d’intérêts lié à l’activité des consultants les moins expérimentés ne devant bien évidemment pas être apprécié de la même manière que celui des dirigeants.

Le présent amendement opère par ailleurs plusieurs précisions par rapport à la rédaction issue du Sénat :

- il prévoit la possibilité de saisir le référent déontologue en cas de doute concernant l’appréciation du risque de conflit d’intérêts ou sur l’exactitude ou la sincérité d’une déclaration d’intérêts, et de saisir la HATVP à titre subsidiaire, si le doute persiste ;

- il renforce les garanties de confidentialité applicables à la conservation des déclarations d’intérêts ;

- il substitue à la notion de « mission réalisée dans le même secteur que la prestation de conseil » celle de « prestation réalisée auprès d’un client dont les intérêts entrent en interférence avec ceux de l’administration bénéficiaire et dont l’objet est en lien avec celui de la prestation de conseil concernée », qui paraît à la fois plus large et mieux ciblée ;

- il clarifie la situation du consultant qui commence sa mission après le début de la prestation et précise qu’il est également soumis à l’obligation de transmettre une déclaration d’intérêts.

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