Publié le 28 décembre 2022 par : M. Neuder, Mme Bonnivard, M. Jean-Pierre Vigier, Mme Dalloz, M. Seitlinger, Mme Petex-Levet, M. Ray, Mme Corneloup, Mme Gruet, M. Dubois, M. Taite, M. Boucard, Mme Anthoine, Mme Bazin-Malgras, Mme Louwagie, M. Dive, M. Di Filippo, Mme Duby-Muller, M. Brigand, M. Gaultier, M. Juvin, M. Bazin, M. Descoeur, M. Forissier.
Dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport mesurant les impacts de la réforme d’accès aux études de santé.
Ce rapport rend notamment compte des inégalités entre les étudiants, des disparités sur le terrain, de l’impact du manque de transparence sur le nombre de places ouvertes et sur les modalités, d’évaluation ainsi que de la non budgétisation des besoins de formation.
Ce rapport fait l’objet de propositions pour remédier aux manquements déjà observés de ladite réforme et peut faire l’objet d’un débat au Parlement.
Cet amendement d’appel vise à attirer l’attention du Gouvernement et de l’ensemble de la Représentation nationale sur les impacts de la réforme du numerus clausus. Un enjeu directement lié à la présence de médecins dans nos territoires, alors même que l’Assemblée nationale s’apprête à autoriser l’accès direct pour les paramédicaux, face à des déficits nombreux.
De l’avis unanime de tous les interlocuteurs auditionnés, la mise en œuvre de la réforme se caractérise par des manquements en termes de communication sur ses enjeux et ses modalités, observables à plusieurs niveaux :
D’abord, à l’égard des étudiants. Les objectifs ont été mal présentés, en particulier le passage à une logique de progression dans les études, et ses modalités insuffisamment expliquées, notamment la seconde chance d’accès à la deuxième année via la L.AS 2 ou la L.AS 3.
Ces défaillances sont à l’origine de mauvaises interprétations de la part de certains étudiants et/ou de certains parents (comme celle selon laquelle la PASS est la nouvelle PACES) ; d’incompréhensions, surtout par rapport à la non-concomitance des dates de publication du numerus clausus pour les doublants PACES et du numerus apertus pour les étudiants de PASS et de L.AS mais aussi de choix de filière par défaut (certains étudiants préférant aller en PASS avec une mineure non souhaitée plutôt qu’en L.AS.).
La conjugaison de toutes ces manifestations a contribué à une mauvaise acceptabilité de la réforme par les premiers concernés :
· Entre acteurs universitaires. La réforme n’a pas suffisamment été présentée ni expliquée aux facultés « hors santé ». Preuve en est les réticences de certains de leurs doyens à ouvrir la deuxième année de licence à des étudiants venant de PASS et n’ayant suivi la discipline qu’en « mineure », par crainte d’un niveau insuffisant.
· A destination des professionnels de santé. Bien que ceux-ci soient aussi concernés par la réforme, notamment en tant qu’encadrants des futurs étudiants stagiaires, il n’y a pas eu de processus formalisé de consultation et d’information sur le contenu de la réforme et ses modalités de mise en œuvre.
Par ailleurs, on distingue un manque inacceptable de transparence sur le nombre de places ouvertes en filières MMOP, qui a suscité beaucoup d’inquiétude chez les étudiants et leurs parents.
Les textes réglementaires de la réforme prévoyaient que le nombre de places ouvertes en deuxième année d’études de santé à la rentrée 2021 devait être publié par les universités au plus tard le 31 mars 2020. Un an et un mois plus tard, alors que la deuxième session d’examen de première année était déjà en cours, toutes les universités n’avaient pas encore rendu public leur numerus apertus.
Autrement dit, des étudiants passent leurs examens sans connaître leur chance de succès pour accéder à la deuxième année des études de santé.
De même, le report, répété et non expliqué, de la publication des numerus apertus a des effets d’autant plus délétères que les doublants PACES ont eu, eux, connaissance dès janvier 2021 du numerus clausus qui leur était appliqué. Plusieurs recours contentieux ont ainsi été déposés par des collectifs de parents à l’encontre d’universités n’ayant pas respecté la date butoir prévue réglementairement.
Ce déficit de transparence concerne aussi les modalités d’évaluation qui, dans certaines universités, n’ont pas été communiquées à temps ou de manière suffisamment étayée, s’agissant des compétences précisément évaluées ou de la manière dont elles le seront. Ce constat porte particulièrement sur les épreuves orales, dont la mise en œuvre a été et reste encore très floue.
En conséquence, les étudiants ont eu le sentiment d’être maintenus dans une incertitude permanente, de découvrir les règles au fil de l’eau, ce qui génère de l’incompréhension, du stress, de la colère.
Ces nombreux manquements de la part du ministère et des universités sont à l’origine
de nombreuses disparités sur le terrain. Tout d’abord entre universités puisque les formules qu’elles ont choisies sont en effet nombreuses et variées. Certaines proposent le double parcours PASS/L.AS, avec un nombre de mineures en PASS et un nombre de L.AS très différents, tandis que d’autres n’ont mis en place que des L.AS.
Des disparités s’observent aussi dans le contenu pédagogique des enseignements : alors que certaines universités ont fait l’effort de refondre les programmes, d’autres ont repris celui de l’ancienne PACES pour l’appliquer au PASS ; en outre, la charge de travail des mineures disciplinaires en PASS s’avère d’ampleur inégale, de même que celle des L.AS.
Enfin, les modalités d’évaluation sont, elles aussi, très diverses : des universités ont instauré des notes éliminatoires pour le PASS - ce qui est contraire à l’esprit de la réforme -, quand d’autres permettent la compensation des résultats entre les semestres ; certaines prennent en compte la mineure pour la validation de l’année de PASS, alors que d’autres n’ont pas fait ce choix.
Toutes ces disparités dans l’organisation du nouveau système créent des inégalités entre étudiants d’universités différentes, mais aussi entre étudiants d’une même université, pouvant engendrer une concurrence entre, conduire à des chances de réussite très variables pour la validation de l’année universitaire et pour l’accès à la deuxième année des études de santé, favoriser des stratégies opportunistes dans le choix des mineures en PASS ou du calendrier de validation de la « mineure santé » en L.AS.
À ces disparités viennent s’ajouter des dysfonctionnements dont les étudiants sont les premières victimes :
· Dans certaines universités, une absence de choix de la mineure disciplinaire en PASS ou de la L.AS : des étudiants n’ont pas eu la possibilité de choisir leur mineure en PASS ou leur L.AS à cause d’une offre trop limitée ou d’un nombre de places insuffisant dans des filières déjà en tension. Ce choix imposé est contraire à l’un des fondamentaux de la réforme, celui d’une orientation des étudiants vers la voie la plus adaptée à leur projet d’études ;
· Un manque d’adaptation des programmes : nombre de témoignages révèlent des situations très douloureuses d’étudiants devant mener de front deux années en une - le PASS et la mineure disciplinaire ou la L.AS et la « mineure santé » - parce que les programmes n’ont pas ou peu été adaptés. Non seulement cette surcharge de travail va à l’encontre de l’objectif de mettre fin au
« bourrage de crâne » du précédent système et d’améliorer les conditions d’études des étudiants en santé, mais elle contribue en outre à pérenniser le recours aux préparations privées, que la réforme souhaitait pourtant combattre ;
· Des incertitudes sur la gestion des « flux » et des réorientations : faute d’anticipation et de préparation, les flux d’étudiants vers la deuxième année de L.AS et les réorientations en licence première année constituent un point d’inquiétude majeur.
En outre, nous retiendrons aussi la non-budgétisation des besoins de formation. Les montants engagés à ce jour en lois de finances ne sont clairement pas à la hauteur des besoins de
formation générés par l’ampleur de la réforme. Aussi, il y a comme une forme de schizophrénie à avoir voulu réorganiser en profondeur le système, sans avoir pensé la question des capacités de formation et celle de leur financement.
L’augmentation du nombre d’étudiants accueillis en deuxième année du premier cycle a en effet pour corollaire inévitable la hausse des besoins de formation en deuxième et troisième cycles, qu’il s’agisse des locaux, des matériels de travaux pratiques, des terrains de stage ou des personnels hospitalo-universitaires encadrants. Faute d’une véritable budgétisation de ces besoins, c’est la qualité de la formation qui risque in fine de se voir affectée.
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