Sous-amendements associés : CE3405 CE3626 CE3606 CE3605 CE3647 CE3636 CE3649
Publié le 27 avril 2024 par : M. Girardin.
Compléter cet article par l’alinéa suivant :
« II. – Afin de garantir le renouvellement des générations d’exploitants agricoles et de pérenniser le modèle d’exploitation familiale, l’État se donne comme objectif de mener, en vue de son application dès 2025, une réforme de la fiscalité applicable à la transmission des biens agricoles, notamment du foncier agricole. Il veille notamment à conditionner les régimes spéciaux et d’exonération à des engagements de conservation des biens transmis pour une longue durée. »
Le présent projet de loi d’orientation s’inscrit dans un contexte ou le monde agricole est au croisement d’importantes mutations d’ordre climatiques, sociétales, environnementales, démographiques, économiques ou encore technologiques.
Parmi les grands défis que doit relever la ferme France, l’un des enjeux majeurs est celui du renouvellement des génération. En effet, l’étude des chiffres du dernier recensement agricole nous révèle que dans les dix prochaines années, un agriculteur sur deux devra prendre sa retraite dont 45 % d’entre eux d’ici 2026. Il y a urgence si nous voulons maintenir le nombre d’exploitation en France et continuer à créer de la valeur grâce au développement d’exploitations innovantes, résilientes et compétitives.
Or, si nous voulons atteindre un objectif de renouvellement des générations pour maintenir les près de 400 000 exploitations françaises, nous ne pouvons pas écarter la question de la fiscalité.
En effet, l’agriculture constitue un levier de développement économique sur les territoires en matière de consommation, d’investissement, de création d’emplois. C’est une activité pivot, structurante et incontournable de nombreuses filières économiques en amont et en aval.
L’activité agricole est une activité à fort investissement capitalistique, mais qui génère des revenus moyens d’activité assez faibles, certes avec des divergences en fonction des natures de production.
Dans le même temps, l’évolution du prix moyen du foncier constaté sur tout le territoire, combiné au poids de la fiscalité inhérente à la transmission, ralentissent le processus de cession.
L’observation de la fiscalité appliquée aux droits de mutation laisse apparaître les points saillants suivants :
- La France a le deuxième taux marginal d’imposition le plus élevé d’Europe en matière de droits de mutation à titre gratuit (DMTG).
- Le quatrième taux marginal d’imposition le plus élevé d’Europe en matière de droits de mutation à titre onéreux (DMTO)
- Le cinquième taux d’imposition le plus élevé sur les plus-values immobilières, avec des abattements extrêmement lents, 22 ans pour les plus-values elles-mêmes et 30 ans pour les prélèvements sociaux.
Par ailleurs, La France est aussi le seul pays dans lequel l’impôt sur la fortune immobilière s’applique uniquement sur le foncier, désavantageant les terres agricoles par rapport à d’autres placements financiers tels que les valeurs mobilières.
Et il est à noter que ces taxes, auxquelles s’ajoute la taxe pour les frais de chambre d’agriculture, sont non liées aux revenus.
S’agissant par ailleurs des revenus de fermage nous sommes l’un des cinq derniers pays européens à conserver la dualité de la taxe sur le foncier non bâti et l’imposition des revenus de fermage auxquels sont venus s’ajouter, en 1990, les prélèvements sociaux.
Ainsi, le Conseil des impôts démontrait que la pression fiscale annuelle moyenne sur les terres agricoles était beaucoup plus élevée en France que dans les trois autres pays pris en comparaison, en l’occurrence Allemagne, Royaume-Uni, États-Unis.
En 2013, un rapport IGF-CG2AER montrait que sur 20 ans en France :
- Les terres agricoles sont l’actif qui a le rendement le plus faible et ce rendement est le seul qui soit inférieur à l’inflation et est donc négatif en euros constants.
- Le niveau élevé à la fois de la taxation des droits de mutation et de l’imposition des revenus des terres agricoles embolisent considérablement la fluidité des transactions et la circularité des biens, même si nous avons amélioré depuis 2019 l’abattement sur le bail rural à long terme porté de 101 000 à corriger en 2019 à 300 000 euros, puis 500 000 euros applicables au 1er janvier 2023.
Mais si notre volonté est de faire de notre agriculture un intérêt général majeur pour notre pays, alors il nous faut, en amont, protéger les facteurs de production que sont les agricultrices et les agriculteurs ; les actifs immobilisés et circulants ; et enfin le foncier.
Sur la base de ces constats, nous devons pouvoir dès le projet de loi de finance pour 2025 intégrer les pistes d’amélioration suivantes :
1/ Harmoniser la fiscalité, quelle que soit la forme d’exploitation de l’activité agricole, individuelle ou sociétaire.
Par exemple, concernant le sujet des plus-values : l’acte de transmission d’une exploitation individuelle est considéré comme une cessation d’activité et entraîne donc une imposition des plus-values.
Par ailleurs, pour les plus-values professionnelles, il existe plusieurs régimes d’exonération en faveur des plus-values constatées et les bénéficiaires d’une donation ou succession peuvent alors, en cas de poursuite de l’activité, opter pour un report d’imposition des plus-values d’actifs constatées au jour de la transmission.
Ce report se transforme en exonération définitive si l’activité est poursuivie pendant au moins 5 ans par l’un des héritiers ;
2/ Poursuivre le processus d’harmonisation de la fiscalité des transmissions du foncier mis à disposition dans le cadre d’un bail rural à long terme avec le pacte du Dutreil ;
3/ Harmoniser l’exonération de l’impôt sur la fortune immobilière avec la fiscalité des transmissions du foncier mis à disposition dans le cadre d’un bail rural à long terme.
4/ Augmenter pour les donations l’abattement de droits communs de 100 000 euros en ligne directe pour le faire passer à 150 000 euros et réduire le taux d’imposition pour les transmissions d’oncles, tantes à neveux et nièces.
Ces libéralités doivent permettre d’accélérer le processus des opérations de transmission émanant des cédants. Il s’agit donc en quelque sorte d’un investissement fiscal pour l’avenir.
Dans ce contexte, le présent amendement programmatique prévoit que le Gouvernement s’engage à étudier dans le prochain projet de loi de finances des mesures fiscales pour libérer la transmission du foncier agricole loué par bail rural à long terme en contrepartie d’engagement de conservation, pour une longue durée, des biens par les bénéficiaires de la transmission ou par leurs ayant-droits. Il s’agira d’inciter les générations dotées de patrimoine à le transmettre de leur vivant afin d’assurer une meilleure circulation des richesses au profit des jeunes générations et ainsi de permettre aux nouveaux exploitants de financier la transformation de leurs exploitations pour les rendre plus résiliantes et compétitives.
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