Publié le 26 avril 2024 par : M. Armand, Mme Chantal Bouloux, M. Cormier-Bouligeon, M. Cosson, Mme Delpech, Mme Dubré-Chirat, M. Emmanuel, M. Fait, Mme Firmin Le Bodo, M. Gernigon, M. Giraud, Mme Iborra, Mme Klinkert, Mme Lasserre, Mme Lingemann, M. Margueritte, M. Mazars, M. Pacquot, M. Padey, Mme Panosyan-Bouvet, Mme Poussier-Winsback, Mme Riotton, M. Rousset, M. Travert, M. Vuibert.
Le dernier alinéa de l’article L. 427‑6 du code de l’environnement est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour l’application du présent article aux grands prédateurs terrestres, soit les loups, les ours et les lynx, toute attaque sur les troupeaux domestiques ouvre droit à indemnisation. Dans les zones où la présence de grands prédateurs est avérée, tout fait de morsure, de blessure, de mort, de dérochement ou de disparition d’un animal domestique est présumé causé par l’attaque d’un loup, d’un ours ou d’un lynx, sauf preuve du contraire dans un délai de quinze jours. Les personnes victimes d’une prédation reconnue au titre de cet alinéa sont indemnisées par l’administration dans un délai raisonnable n’excédant pas soixante jours. Un décret précise les modalités de mise en œuvre de la procédure d’indemnisation.
« En ce qui concerne le loup, les tirs dérogatoires sont conditionnés par la nécessité de prévenir une attaque. Conformément à l’article 16, b) de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages qui affirme une logique préventive, l’absence d’attaque répertoriée sur un troupeau n’est pas un motif valable pour refuser une dérogation de tirs. »
Sur le I : jusqu’à ce jour, la procédure de constat visant à déterminer l’existence d’une prédation peut aboutir à trois conclusions :
- Mortalité non liée à une prédation ne donnant pas lieu à indemnisation,
- Mortalité dont la cause est indéterminée ne donnant pas lieu à indemnisation sauf appréciation contraire liée au contexte local de prédation,
- Mortalité liée à une prédation non écartée.
La complexité de ces distinctions interroge sur la façon dont l’administration procède, notamment pour déterminer si une prédation est non-écartée (c’est-à-dire probable) ou indéterminée dans les zones avérées de présence des prédateurs. La notion « non-écartée » laisse en effet place à l’incertitude et la frontière est mince avec le cas d’une prédation indéterminée.
Certains critères utilisés par les agents réalisant les constats d’attaque ne sont pas toujours communiqués ni même adaptés pour une telle procédure. A titre d’exemple, les morsures de loup à la trachée des ovins sont souvent caractéristiques, pour autant elles ne sont pas systématiques et la plupart du temps absentes pour des bovins. Le risque d’avoir une appréciation erronée, partielle ou partiale des réalités de terrain est grand, et le sentiment d’opacité dans l’action de l’administration n’en n’est que renforcé chez les personnes confrontées au problème.
L’instauration d’une présomption de prédation dans les zones avérées de présence des prédateurs permettrait de rééquilibrer un rapport actuellement désavantageux pour les éleveurs victimes d’attaques. L’ajout d’un délai de deux semaines pour renverser la présomption permettrait d’assurer la réalisation des constats d’attaques sous 15 jours (actuellement, on compte en moyenne trois semaines – un mois pour avoir les résultats) et d’accroître la sécurité juridique des éleveurs prédatés. Par ailleurs, la présomption serait encadrée aux faits spécifiques qui caractérisent la majorité des prédations : morsure, blessure, mort, dérochement ou disparition.
Est proposée la fixation d’un délai de 60 jours pour le versement des indemnisations afin de sécuriser économiquement les éleveurs prédatés, pour lesquels les délais de versement dépassent la plupart du temps les 100 jours.
Sur le II : l’article 16 de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite « habitats », affirme explicitement que des dérogations sont admises afin de prévenir les dommages causés par la prédation aux troupeaux. L’ampleur de ces dommages n’est plus à démontrer (plus de 12 000 bêtes attaquées par an) et la population de loups a doublé en l’espace de cinq années.
La règlementation française n’applique pas le principe de prévention pour les bovins, les équins et les asins. En passe d’être reconnus comme ne pouvant pas être protégés, ceux-ci ne peuvent cependant être défendus à l’aide de tirs qu’après la survenue d’une première attaque. La logique préventive s’efface complètement derrière une action purement réactive.
Cela interroge d’autant plus que la jurisprudence européenne a déjà admis qu’en cas de circonstances exceptionnelles et à certaines conditions, des dérogations peuvent être octroyées malgré l’état de conservation défavorable d’une espèce (affaire C-342/05, CJUE). Le seuil de 500 loups avait été arrêté concernant la viabilité de l’espèce, nous en sommes à plus de 1100 individus officiellement décomptés sur le territoire national.
Il est donc proposé de réaffirmer le principe de prévention des attaques dans la politique de défense létale des troupeaux afin d’observer une cohérence avec le droit communautaire.
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