Publié le 5 avril 2024 par : Mme Sas, Mme Arrighi, Mme Belluco, M. Ben Cheikh, Mme Chatelain, M. Fournier, Mme Garin, M. Iordanoff, Mme Laernoes, M. Lucas-Lundy, Mme Pasquini, M. Peytavie, Mme Pochon, M. Raux, Mme Regol, Mme Rousseau, Mme Sebaihi, M. Taché, Mme Taillé-Polian, M. Thierry.
Le livre II du code de commerce est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 22‑10‑10, il est inséré un article L. 22‑10‑10‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 22‑10‑10‑1. – I. – Le présent article s’applique aux sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé et qui entrent dans le champ d’application de la directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises.
« Ces sociétés publient chaque année une mise à jour de leur stratégie en matière de durabilité en conformité avec les obligations d’information prévues par l’article 19 bis de la même directive afin de s’assurer que le modèle et la stratégie de l’entreprise sont compatibles avec les objectifs de transition vers une économie durable et de limitation du réchauffement planétaire à 1,5° C, conformément à l’accord de Paris et à l’objectif d’atteinte de la neutralité climatique tel qu’établi dans le règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) 2018/1999.
« Cette stratégie doit notamment inclure les indicateurs suivants :
« 1° Les émissions de gaz à effet de serre directes et indirectes de l’entreprise en valeur absolue et relative, et leur évolution sur les trois dernières années ;
« 2° Les objectifs de réduction des gaz à effet de serre de l’entreprise, formulés en valeur absolue et relative pour ses émissions directes et indirectes à court terme, moyen terme et long terme ;
« 3° Les dépenses d’investissements prévues à court et moyen terme de l’entreprise, et les contributions au financement de l’investissement en valeur absolue et relative pour les entreprises financières, et leur répartition par activité et nature ;
« 4° Les dépenses opérationnelles de l’entreprise en valeur absolue et relative et leur répartition par activité ;
« 5° Le ou les scenarios de références utilisés pour déterminer les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et la stratégie de l’entreprise ;
« 6° La contribution éventuelle des émissions de gaz à effet de serre capturées par l’entreprise à l’atteinte des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre en valeur absolue et relative ;
« 7° Une explication de l’intégration des enjeux climatiques sur la gouvernance et la gestion des risques ;
« 8° Une évaluation de l’alignement des 1° à 7° avec l’objectif de limitation du réchauffement planétaire à 1,5 degrés Celsius reposant sur un scénario avec peu ou pas de dépassement et un recours limité aux technologies à émissions négatives ;
« 9° Une explication de la contribution éventuelle de la compensation carbone à la stratégie de l’entreprise.
« II. – Chaque année, deux projets de résolutions sont soumis à l’approbation de l’assemblée générale des actionnaires dans les conditions prévues aux article L. 225‑98 et L. 22‑10‑32 :
« 1° Un projet de résolution sur la stratégie mentionnée au I ;
« 2° Un projet de résolution sur la mise en œuvre de cette stratégie.
« Le projet de résolution mentionné au 1° du présent II indique également de quelle manière ont été pris en compte le vote des actionnaires et, le cas échéant, les avis exprimés lors de l’assemblée générale des actionnaires précédente.
« III. – Lorsque l’assemblée générale des actionnaires n’approuve pas à une majorité qualifié des deux tiers des votes exprimés au moins un des deux projets de résolution mentionnées au II, les composantes variable et exceptionnelle de la rémunération du président du conseil d’administration, du directeur général et de chaque directeur général délégué est diminuée d’au moins 50 % par rapport à ce que prévoit la politique de rémunération prévue par l’article L. 22‑10‑18, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État. »
2° Au deuxième alinéa du I de l’article L. 225‑100, après le mot : « article », est insérée la référence : « L. 22‑10‑10‑1 ».
Cet amendement vise à rendre obligatoire, pour les sociétés cotées soumises à la directive sur l’information en matière de durabilité par les entreprises – dite Corporate sustainabilité reporting directvie (CSRD) – la publication d’une stratégie de transition complète contenant une série d’indicateurs clés sur lesquels pourront s’appuyer les actionnaires pour juger de la crédibilité des mesures prises par l’entreprise pour respecter ses engagements climatiques ou ses obligations en la matière. Par cet amendement, nous visons à établir une balance équitable entre les avantages octroyés par le présent texte aux entreprises et investisseurs – par exemple en facilitant leur accès au financement à moindre coût et en offrant aux investisseurs une transparence accrue sur les prix des actions ainsi qu’une flexibilité dans leur participation – et nos préoccupations climatiques. En effet, afin d’assurer une transition écologique efficace, il est impératif d’accompagner ces avantages par des engagements climatiques car il est clair que la transition écologique de notre pays dépend en grande partie de l’engagement des entreprises et des investisseurs dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la préservation de la biodiversité.
Ainsi, la liste des indicateurs est largement inspirée des propositions de la Commission Climat et finance durable de l’Autorité́ des Marchés financiers (AMF) datant de mars 2023. Ils suivent la logique de la CSRD et des travaux en cours sur la directive sur le devoir de vigilance des entreprises (CSDDD).
Il est proposé également que cette stratégie soit soumise à un vote annuel des actionnaires à travers deux projets de résolutions distinctes (dit « Say on Climate ») :
i) l’une sur la stratégie de transition (ex-ante) ;
ii) l’autre sur la mise en œuvre de cette stratégie (ex-post).
En cas de rejet d’au moins une de ces deux résolutions, les parts variable et exceptionnelle de la rémunération des dirigeants de l’entreprise sont divisées par deux.
L’encadrement du contenu des plans de transition ainsi que la généralisation du Say on Climate est nécessaire pour que les investisseurs puissent répondre à leurs propres engagements climatiques, qu’ils aient été́ pris auprès de leurs clients ou au titre de l’article 29 de la loi énergie-climat relatif à la transparence extra- financière.
La réglementation européenne a beau progresser en matière de reporting extra-financier, et les écologistes en France et au Parlement européen en sont, et veulent, en être des moteurs essentiels, toutefois, à ce jour, nous devons demeurer extrêmement investis sur la finalisation et la transposition complète à venir des directives CSRD et CSDDD. »
Cette mesure s’inscrit également dans la lutte contre le « greenwashing » dans la mesure où les quelques « Say on Climate » présentés actuellement sont lacunaires et manquent de crédibilité́.
Enfin, cette proposition vise à attirer de nouveaux investissements dans les entreprises françaises grâce à un renforcement du dialogue actionnarial. En effet, en offrant davantage de moyen d’expression aux actionnaires pour juger de la qualité́ des plans de transition des entreprises qu’elles détiennent en portefeuille, les investisseurs désireux de décarboner leurs portefeuilles pourront améliorer l’efficacité́ de leur politique d’engagement et de de vote.
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