Publié le 7 mars 2024 par : Mme Stambach-Terrenoir, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot, Mme Amrani, M. Arenas, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Bex, M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Caron, M. Carrière, M. Chauche, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel, M. Corbière, M. Coulomme, Mme Couturier, M. Davi, M. Delogu, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Etienne, M. Fernandes, Mme Ferrer, Mme Fiat, M. Gaillard, Mme Garrido, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hignet, Mme Keke, M. Kerbrat, M. Lachaud, M. Laisney, M. Le Gall, Mme Leboucher, Mme Leduc, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Pascale Martin, Mme Élisa Martin, M. Martinet, M. Mathieu, M. Maudet, Mme Maximi, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Obono, Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, M. Rome, M. Ruffin, M. Saintoul, M. Sala, Mme Simonnet, Mme Soudais, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé, M. Vannier, M. Walter.
Supprimer les alinéas 4 à 12.
Cet amendement du groupe LFI-NUPES s'oppose au transfert de l'actuelle DEND (direction de l'expertise nucléaire de défense) de l'IRSN au Commissariat à l'énergie atomique (CEA), et vise, a minima, si la création de l'AISNR prévue dans ce projet de loi était concrétisée, à maintenir intégrées les activités liées aux installations de défense et aux installations civiles.
En effet compte tenu de leur lien avec les activités scientifiques et techniques de l’IRSN devant être reprises au sein de l’AISNR, maintenir l’ensemble de l’expertise et de la recherche sur la sûreté civile et défense, la sécurité et la non-prolifération au sein de l’AISNR permet d’en conserver l’efficience actuelle tant en termes de ressources et de compétences que de cohérence dans les positions techniques sur la maitrise des risques nucléaires. Notamment cela permet de :
- Maintenir une expertise intégrée de l’ensemble des dimensions relatives à la conception et l’exploitation des installations civiles sur les aspects sûreté, sécurité et non-prolifération, en particulier sur des SMR (démarche Safety, Security, Safeguards -3S intégrée, soutenue par l’AIEA) ;
- Maintenir la mutualisation des moyens d’expertise et de recherche entre les installations civiles et celles relevant de la défense ainsi que les transports de matières nucléaires, qui sont similaires voire identiques ou implantées sur un même site nucléaire ;
- Maintenir la mutualisation de la capacité d’appui technique aux pouvoirs publics en situation de crise, pour l’ensemble des installations civiles et de défense, ou dans des cas tel que Fukushima, pour des grands événements tels les JO, pour répondre à des situations d’attentat NRBC ou à des questions concernant des installations nucléaires en zone de guerre comme actuellement en Ukraine ;
- Simplifier le projet en évitant un sous projet complet devant examiner les ressources, moyens, droits, obligations et statuts et convention des personnels lié au découpage de l’IRSN. Et éviter l’écriture de nombreux textes réglementaires prévus par le projet de loi et une Convention entre l’AISNR et l’entité accueillante de la DEND (pour garantir l’accès aux experts spécialistes, à leurs outils, aux référentiels de sûreté, aux expertises de l’AISNR…et permettre le partage de documents classifiés avec l’AISNR), donc fluidifier les processus.
André-Claude Lacoste, ancien président de l'ASN, expliquait lui-même "Si jamais il survient un problème de sécurité, traiter la sécurité et la sureté séparément sera considéré comme une faute majeure. Il y a besoin d’échange entre sécurité et sureté, et le PJL crée artificiellement une séparation. Dans le monde au sein des systèmes de gouvernance du nucléaire, la sécurité et la sureté sont traités ensemble."
Cet amendement limite la dispersion des compétences techniques rares actuellement présentes à l’IRSN, dans le contexte connu de tension sur l’emploi et les compétences. Plus généralement, cette dispersion est d’autant plus dommageable en terme d’efficience que la nature des installations (réacteurs de puissance, usines de fabrication de combustibles, entreposage et traitement de déchets…) est la même entre le domaine civil et celui de défense, dans le domaine de la sûreté et de la sécurité – et de la non-prolifération -, et que des problématiques communes et transverses doivent être traitées (dérèglement climatique, vieillissement des installations, démantèlement, gestion des déchets, sites « mixtes », cybersécurité…). En particulier, le projet de loi actuel prévoit, sur l’expertise de sûreté défense, de transférer environ 31 ETPT vers un service du DSND et 23 vers l’AISNR (les experts spécialistes de risques spécifiques tels que l’incendie, la mécanique, etc. allant à l’AISNR).
Ce constat ne fera que se renforcer dans le contexte du développement des projets liés aux SMR, dont le concept de type « réacteur compact » est proche pour certains de celui des réacteurs embarqués de la marine. En restant mutualisées, les deux sphères d’expertise continueront de bénéficier du partage direct de leur expérience réciproque. De plus, en termes de sécurité, les SMR ont vocation à pouvoir être installés dans des lieux variés ne bénéficiant pas du même niveau de protection que les sites nucléaires existants. De ce fait, la sécurité ne pourra pas s’appuyer autant sur la protection de site (clôtures, etc.) et devra être prise en compte dès la conception, en identifiant très tôt les équipements et fonctions de sûreté dont l’endommagement pourraient conduire à des conséquences inacceptables (exemple : cybersécurité des systèmes de contrôle-commande qui pourraient être téléopérés et donc plus facilement piratables, etc.). La prise en compte de la sécurité à la conception est indispensable avant que les concepts de sûreté ne soient figés et vice-versa. Disposer des experts des deux domaines dans une même entité permet ainsi de bénéficier d’une approche intégrée sûreté, sécurité et non-prolifération (démarche Safety, Security, Safeguards -3S intégrée, soutenue par l’AIEA).
A noter également que le projet de loi transfère ces salariés au CEA (pour les mettre à disposition de l’autorité défense). Des experts salariés du CEA se verraient donc confier des missions d’expertise en sûreté d’installations du CEA. Ce serait revenir 25 ans en arrière, avant la sortie de l’IPSN du CEA et la séparation stricte contrôleur-contrôlé.
Enfin le Gouvernement prétend que l’AISNR « ne peut pas se voir confier les compétences régaliennes de la DEND ». Mais cet amendement ne porte pas atteinte au maintien du caractère régalien des décisions relatives à la sûreté de défense, à la sécurité et la non-prolifération qui relèvent d’autorités spécifiques. En effet, le régalien reste à la charge de ces autorités (dépendantes des différents ministères qui bénéficient actuellement de l’expertise de l’IRSN) ; les experts de l’IRSN n’apportant que leur concours scientifique et technique sur les sujets qui leurs sont confiés.
A souligner également que l’organisation prévue par le projet de loi conduit d’ores et déjà à affecter au sein de l’AISNR des experts apportant une expertise spécialisée (par exemple dans les domaines de l’incendie, de la mécanique, de l’étude des accidents graves) dans les domaines de la sûreté de défense, la sécurité et la non-prolifération.
Cet amendement est issu d'une proposition de l'intersyndicale de l'IRSN.
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