Publié le 29 septembre 2023 par : Mme Belluco, M. Taché, M. Raux, Mme Arrighi, M. Bayou, M. Ben Cheikh, Mme Chatelain, M. Fournier, Mme Garin, M. Iordanoff, M. Julien-Laferrière, Mme Laernoes, M. Lucas, Mme Pasquini, M. Peytavie, Mme Pochon, Mme Regol, Mme Rousseau, Mme Sas, Mme Sebaihi, Mme Taillé-Polian, M. Thierry.
L’article L. 32‑3 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Le III est ainsi rédigé :
« III. – Tout dispositif automatisé de lecture, détection et analyse des échanges entre internautes, réalisés au moyen de services de messagerie, y compris lorsque ces échanges sont protégés par des dispositifs de chiffrement, est interdit. »
2° Le IV est abrogé.
L’objet de cet amendement d’appel est de prévenir le déploiement de technologies qui pourraient scanner automatiquement les messageries privées, au détriment du droit fondamental au respect de sa vie privée.
Ces dernières années, plusieurs propositions ont vu le jour pour autoriser le déploiement de dispositif automatisé de lecture, détection et analyse des échanges entre internautes réalisés au moyen de services de messagerie, y compris les messageries protégées par un chiffrement. Le plus souvent, celles-ci sont justifiées par le volonté de lutter contre certains contenus – par exemple, terroristes ou à caractère pédopornographique. Encore récemment, le Gouvernement britannique a renoncé à une telle mesure inscrite dans l’Online Safety Bill.
En effet, de telles normes paraissent disproportionnées par rapport à l’objectif qu’elles poursuivent. Quelle que soit la messagerie, les données qui s’y trouvent, et dont le caractère peut-être particulièrement sensible, pourraient ainsi être détectées et analysées, ce qui serait une atteinte grave et manifeste au respect de la vie privée. Cela l’est d’autant plus que le caractère suspect des messages sera détecté par un algorithme ; qu’une fois ce caractère suspect établi, le personnel en charge aura directement accès à ces données. Un mauvais ciblage pourrait compromettre de
nombreuses données intimes, que nos concitoyens tiennent particulièrement à ne pas voir tomber entre les mains d’individus qu’ils ne connaissent pas.
Concernant les messageries chiffrées, elles permettent à leurs utilisateurs de prévenir la surveillance, et certains piratages ou hameçonnage. Au nom de la non-prolifération de contenus illicites, certaines méthodes pour prévenir d’autres délits seraient affaiblies. Face à ces arguments et à une vive opposition de la population britannique, le Gouvernement a dû faire marche arrière. Il en irait vraisemblablement de même en France puisque 69 % des Français « affirment être attentifs au traitement qui est fait de leurs données personnelles lorsqu’ils utilisent Internet » (sondage IFOP, 2021).
Plus globalement, il s’agirait d’une porte ouverte pour la surveillance des messageries privées. Des autorités moins scrupuleuses pourraient utiliser cet outil pour surveiller massivement les opinions politiques des citoyens, par exemple.
Afin d’acter que ce type de technologies ne doit pas pouvoir voir le jour en France, il convient dès à présent de l’inscrire dans la loi.
Tel est l’objet de cet amendement.
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