Publié le 29 septembre 2023 par : Mme Belluco, M. Taché, M. Raux, Mme Arrighi, M. Bayou, M. Ben Cheikh, Mme Chatelain, M. Fournier, Mme Garin, M. Iordanoff, M. Julien-Laferrière, Mme Laernoes, M. Lucas, Mme Pasquini, M. Peytavie, Mme Pochon, Mme Regol, Mme Rousseau, Mme Sas, Mme Sebaihi, Mme Taillé-Polian, M. Thierry.
I. – Le patrimoine numérique individuel est constitué de l’ensemble des productions, échanges, données générées par une personne physique, qu’ils soient conservés par cette personne, publiés sur Internet ou stockés dans un service d’informatique en nuage.
Ce patrimoine numérique appartient en propre à l’individu. Il ne peut être utilisé, cédé ou approprié sans son accord explicite et sans une rétribution, le cas échéant.
Ces dispositions s’appliquent également aux données collectées par les opérateurs et entreprises fournissant l’ensemble des services utilisés par la personne sur Internet ou tout autre réseau interconnecté.
Selon des conditions précisées par décret, une exception peut être accordée à des fins de recherche académique pour le patrimoine numérique individuel de personnes interagissant dans un cadre collectif, et constituant un corpus de recherche cohérent. Il ne peut être fait commerce des données collectées ni des résultats des recherches sur lesquelles elles sont basées.
II. – En conséquence, l’article L. 34‑1 du code des postes et des communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute collecte, transmission ou utilisation de données personnelles à des fins commerciales, par des entreprises de fourniture, d’édition ou de distribution au public de services de communications électroniques ainsi que par des opérateurs de plateformes en ligne, leurs clients ou leurs partenaires, est interdite. »
L’objet de cet amendement d’appel est de reconnaître un patrimoine numérique aux individus. Aujourd’hui, les contenus que nous partageons sur certains réseaux sociaux deviennent la propriété des entreprises qui les gèrent, et peuvent être utilisés, y compris commercialement, par celles-ci, sans que le producteur desdits contenus ne puissent en obtenir une rétribution.
Ainsi, il est possible pour Facebook, Instagram ou Twitter de modifier et d’utiliser gratuitement et dans le monde entier chaque texte et chaque image publiés. Les principaux réseaux sociaux et leurs partenaires peuvent de plus accorder des sous-licences, c’est-à-dire mettre à la disposition de tiers le droit d’utiliser toute publication. Enfin, il est possible pour les réseaux sociaux de monnayer nos données personnelles auprès d’autres sociétés, à des fins publicitaires. Tout ceci est rendu possible grâce aux fameuses CGU (conditions générales d’utilisation) que peu d’utilisateurs prennent le temps (lorsqu’ils les trouvent !) de consulter. Quand bien même, ils voudraient s’y opposer, ils ne le peuvent pas sous peine de ne pas pouvoir accéder au réseau social.
Les individus devraient pouvoir être décisionnaires de l’utilisation de leurs données et productions, et ceci dans un cadre contractuel clair et équitable.
Enfin, il pourrait exister une exception à des fins de recherche académique concernant des corpus cohérents de productions dont la consultation est ou a été possible librement sur Internet. C’est le cas récent des Skyblogs qui ont été retirés d’Internet et archivés par l’INA en accord avec le Code du patrimoine, afin que des chercheurs puissent en analyser les contenus, reflets d’une époque. Ceux-ci ont par ailleurs été librement récupérables par les individus qui les ont produits.
La notion de patrimoine numérique individuel devrait être reconnue en droit français afin de permettre aux personnes, d’une part de prendre conscience que leurs productions constituent leur patrimoine personnel qui est potentiellement digne de transmission, y compris s’il est sous format numérique. Et d’autre part, cette reconnaissance est aussi importante pour mettre un terme aux conditions excessives imposées par les géants du numérique, à commencer par les principaux réseaux sociaux.
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