Publié le 8 juin 2023 par : M. Di Filippo, M. Bazin, M. Bourgeaux, M. Cinieri, M. Cordier, M. Kamardine, Mme Frédérique Meunier, M. Minot, M. Nury, M. Seitlinger, Mme Anthoine, M. Boucard, Mme Gruet, M. Hetzel, M. Portier, M. Vatin.
Supprimer cet article.
L'article 60 du code des douanes sur les contrôles a été jugé contraire à la Constitution en septembre dernier.
Cet article, pourtant essentiel, est celui qui autorise les agents des douanes à procéder à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes . En vigueur depuis 1948, quand notre Constitution date de 1958, il avait déjà été attaqué plusieurs fois en QPC, mais il avait toujours été jugé conforme.
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel a considéré que le législateur « n'avait pas assuré une conciliation équilibrée entre la recherche des auteurs d'infractions et la liberté d'aller et de venir et le droit au respect de la vie privée », et que, par conséquent, les dispositions contestées devaient être déclarées « contraires à la Constitution. », demandant au gouvernement de réécrire cet article.
Malheureusement, le nouveau texte qui nous est proposé dans l’article 2 de ce projet de loi affaiblit considérablement les capacités d’action des personnels de douanes. Ce texte prévoit par exemple que, en dehors du « rayon » d'action aux abords des frontières (qui sera porté à 40 kilomètres au lieu de 20 aujourd'hui), les douaniers devront soit procéder à une information préalable du Parquet, soit pouvoir justifier de « raisons plausibles de soupçonner une infraction ».
Dans la région Grand est, particulièrement touchée par les trafics de tabac, de stupéfiants et les opérations de blanchiment d’argent, les résultats en termes de saisies de stupéfiants et de détection des fraudes masquées sont excellents, malgré des effectifs réduits. Cela est dû à la possibilité donnée par l’article 60 de contrôler tout le monde en tout lieu du territoire. « sans accord de la personne concernée, ni autorisation préalable de l'autorité judiciaire » et sans disposer d'indice d'une infraction. Ce cadre d'intervention très souple tient à la nature même de la mission douanière, qui vise des produits de contrebande, donc des marchandises dissimulées.
L'article révisé rappelle aussi que le maintien à disposition des personnes n'est possible que le temps « strictement nécessaire aux opérations de visite ». Il figera dans la loi la jurisprudence selon laquelle, au-delà de quatre heures, les douaniers doivent prévenir le procureur.
De tels changements vont rendre le métier des douaniers incontestablement plus compliqué et entraver des actions pourtant essentielles à la protection de la population, mais aussi de l’environnement et de l’économie.
Les 10.000 douaniers qui effectuent ces contrôles ont déjà constaté les effets délétères de la décision du Conseil constitutionnel : depuis l'automne dernier, diverses procédures en justice ont été perdues par les douanes, entraînant l'annulation de saisies de cocaïne ou de cannabis.
Nous assistons actuellement à une véritable dérive vers la sacralisation de droits individuels qui ne bénéficient pas aux libertés collectives et qui constituent même une menace pour la sécurité publique.
Il est essentiel de rappeler que l’une des missions de la douane est de lutter contre les trafics, la criminalité organisée et le financement du terrorisme. Elle assure ainsi plus de 80% des saisies de stupéfiants et 100% des saisies de tabac. En 2015, les fouilles que l’article 60 lui donnait le droit d’effectuer ont permis l’arrestation de terroristes.
Le fait de préserver les libertés individuelles ne doit pas empêcher d’assurer la sauvegarde de droits et de principes eux aussi de valeur constitutionnelle et de faire face à des enjeux de sécurité publique absolument fondamentaux. Entraver les saisies d’armes ou de stupéfiants, par exemple, peut avoir des conséquences dramatiques pour la protection de la vie même nos concitoyens.
Le rôle de nos douaniers en faveur de la sécurité de tous et du maintien de l’ordre public ne doit pas être entravé au prétexte que le cadre applicable pour les opérations qu’ils ont à mener serait insuffisamment précis et menacerait nos libertés. Le respect de l’ordre public correspond lui aussi à une « exigence constitutionnelle », exigence qui accorde une permission au législateur de limiter les droits fondamentaux en vue de poursuivre d'autres finalités.
Cet article 2 affaiblit considérablement pour nos agents des douanes les pouvoirs indispensables au bon exercice de leurs fonctions. C’est pourquoi cet amendement propose de le supprimer.
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