Mme Danielle Brulebois alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le projet de directive sur le devoir de vigilance européen (CS3D). Toutes les entreprises sont d'accord sur les objectifs. Cependant, l'approche réglementaire, administrative et bureaucratique risque d'être trop contraignante et complexe pour les entreprises intermédiaires à partir de 1 000 salariés. L'on peut s'interroger sur leur capacité à auditer dans des conditions raisonnables et efficaces des dizaines de milliers de références, des milliers de fournisseurs, des chaînes de valeur qui ne sont pas limitées dans la profondeur. Le texte français, qui préexistait, ne concernait que les entreprises de plus de 5 000 salariés, qui avaient déjà d'énormes difficultés à remplir leurs obligations. Les entreprises françaises engagées dans la RSE font de leur mieux et sont attentives à leurs partenaires et fournisseurs. La France ne peut être la seule à faire courir un risque juridique à ces entreprises, quand les entreprises américaines ou chinoises n'y sont pas exposées. La souveraineté est un enjeu majeur réaffirmé dans la déclaration d'Anvers et avec le soutien à Mme Van der Leyen. La meilleure façon de décarboner la planète, c'est de produire plus en Europe et en particulier en France, puisque le point de PIB de cette dernère est le plus décarboné du monde et son énergie la plus décarbonée des grands pays européens. Aussi, elle lui demande donc ce que le Gouvernement compte faire pour que ces dispositions qui, par leur complexité, leur applicabilité et leur coût, ne découragent pas les entrepreneurs français à fabriquer en France.
En 2017, la France a été le premier pays au monde à adopter une directive sur le devoir de vigilance. Depuis cette date, elle a seulement été suivie par deux États : l'Allemagne et la Norvège. La directive sur le devoir de vigilance permettra donc de rétablir des conditions de concurrence équitables au sein du marché intérieur. La directive s'applique aussi directement aux sociétés de droit étranger qui présentent un lien de rattachement suffisant au territoire de l'Union. Fort de son expérience, le Gouvernement a défendu des règles proportionnées et opérationnelles au niveau européen. L'accord qui a été endossé par les États membres de l'Union européenne le 15 mars dernier atteint cet équilibre. En effet, la directive couvre les entreprises de plus de 1 000 salariés avec un chiffre d'affaires supérieur à 450 millions d'euros. Un calendrier d'application progressive est également prévu en fonction de la taille des entreprises. Les plus petites d'entre elles auront cinq ans pour se conformer à la directive, à compter de son entrée en vigueur. En outre, la directive laisse de la flexibilité aux entreprises pour définir et mettre en œuvre une procédure de vigilance. Les entreprises devront cartographier les activités auxquelles elles sont liées et analyser de façon approfondie celles qui remplissent des facteurs de risque. Ainsi, les entreprises ne devront pas auditer tous leurs partenaires commerciaux. De plus, elles pourront prioriser les incidences négatives à traiter. Enfin, les entreprises seront seulement tenues d'adopter les mesures de prévention et d'atténuation qui sont raisonnablement disponibles. La directive ne définit pas ces mesures de façon exhaustive. Elle laisse donc une place importante au développement de bonnes pratiques, par les entreprises et la société civile. Plus largement, la directive reflète la volonté de la France et de l'Union européenne d'imposer les mêmes standards à toutes les entreprises actives au sein du marché intérieur, qu'elles soient européennes ou non. Les fournisseurs et sous-traitants français sont plus performants sur les plans social et environnemental que leurs concurrents de pays tiers. Amener les donneurs d'ordres européens à tenir compte de ces aspects est donc dans l'intérêt de notre économie et de sa réindustrialisation.
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