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Michel Sala
Question N° 12583 au Ministère auprès de la ministre du travail


Question soumise le 31 octobre 2023

M. Michel Sala alerte Mme la ministre des solidarités et des familles sur la situation des travailleurs dans les établissement ou services d'aide par le travail (ESAT). Ces 1 400 structures accueillent plus de 120 000 travailleurs dont le système de rémunération assure un revenu à peine supérieur à la moitié du SMIC, en deçà du seuil de pauvreté. Ces travailleurs ne relèvent pas du code du travail, mais du code de l'action sociale et des familles, parce qu'ils sont considérés comme des usagers des établissements avec lesquels ils ont signé un contrat. La rémunération moyenne des personnes travaillant en ESAT est de seulement 800 euros net mensuels pour 35 heures de travail par semaine. Dans la circonscription de M. le député, l'ESAT des Gardons a annoncé au printemps la fermeture de son site du Rouret sans associer à la décision les ouvriers de l'ESAT, déclenchant parmi eux un mouvement social sans précédent. 3 journées d'action ont déjà eu lieu pour revendiquer le maintien du site, à cette revendication locale sont immédiatement venues s'ajouter des revendications sociales qu'ils m'ont présentées. M. le député a notamment pu rencontrer Jérôme, qui ouvre seul l'entreprise à 5 heures du matin pour charger son camion avant d'entamer une tournée de livraison de plus de 150 km, toujours seul et en responsabilité. Jérôme travaille comme livreur 35 h par semaine, pour un salaire dépassant à peine 800 euros net par mois. Ces ouvriers revendiquent, lors de leur mise à disposition en entreprise, d'avoir les mêmes droits et rémunérations que leurs collègues. Ils demandent aussi l'augmentation de la rémunération garantie et son indexation sur l'inflation, la revalorisation des pensions de retraite, le remboursement des déplacements, le retour de la prime repas, l'augmentation des chèques vacances, la participation au CSE, ainsi que le droit à la formation, à la représentation syndicale et à la grève. L'article 27 de la convention internationale des droits des personnes handicapées, ratifiée par la France, précise que les personnes handicapées ont « le droit au travail, notamment à la possibilité de gagner leur vie en accomplissant un travail librement choisi ou accepté sur un marché du travail et dans un milieu de travail ouverts, favorisant l'inclusion et accessibles aux personnes handicapées ». Certaines des dispositions pour favoriser l'accès à l'emploi des personnes en situation de handicap du projet de loi n° 1528 pour le plein emploi vont dans le sens des revendications de ces travailleurs handicapés. M le député alerte Mme la ministre sur l'importance de la mise en œuvre rapide des nouveaux droits prévus par ce texte. Il lui demande également comment elle compte agir pour répondre à leur demande légitime de revalorisation des salaires et de rapprochement de leur statut et de celui des travailleurs en milieu ordinaire tout en maintenant le nécessaire accompagnement dont ils bénéficient en milieux protégés.

Réponse émise le 23 avril 2024

Le plan de transformation des Etablissements et services d'accompagnement par le travail (ESAT) impulsé en 2021 par les pouvoirs publics en concertation avec les représentants du secteur vise à créer les conditions d'une dynamique de parcours au bénéfice des personnes en situation de handicap orientées et accueillies en ESAT et à renforcer les droits sociaux de ces travailleurs. La mise en œuvre du plan a donné lieu depuis 2022 à l'adoption de plusieurs dispositions législatives et réglementaires, à savoir : - la loi 3DS du 21 février 2022 et les décrets des 13 et 22 décembre 2022 modifiant le Code de l'action sociale et des familles (CASF) ainsi que le code du travail et consistant notamment à permettre aux travailleurs d'exercer simultanément une activité à temps partiel en milieu protégé et une activité salariée à temps partiel, à leur ouvrir de nouveaux droits individuels et collectifs et à faire bénéficier les travailleurs sortant d'ESAT d'un parcours renforcé en emploi ; - l'article 1er de la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, qui ouvre la possibilité aux ESAT de faire bénéficier leurs travailleurs d'une prime de partage de la valeur avec une exonération associée ; - l'article 14 de la loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein emploi dont l'objectif est de permettre aux 120 000 travailleurs handicapés accompagnés par environ 1 400 ESAT de bénéficier de l'essentiel des droits individuels et collectifs des salariés tout en restant usagers d'une structure médico-sociale et titulaires d'un contrat qui n'a pas la nature d'un contrat de travail et qui leur offre en réalité une protection renforcée puisque l'ESAT ne peut exercer de pouvoir disciplinaire à leur encontre ou les licencier. Le renvoi aux articles du code du travail permettra d'assurer une évolution parallèle des droits, sans qu'il soit besoin de repasser par un décret. Sur un strict plan juridique, ces dispositions s'inscrivent dans le cadre de l'application de la convention de l'Organisation des Nations unies sur les droits des personnes handicapées et contribuent également à la mise en œuvre du droit de l'Union européenne ainsi qu'à la prise en compte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne sur les personnes handicapées accueillies en ESAT. Les nouveaux droits reconnus aux travailleurs d'ESAT par l'article 14 précité de la loi du 18 décembre 2023 couvrent un large champ : - l'inscription de « droits collectifs fondamentaux » dans le CASF : le droit syndical et le droit de grève, le droit d'alerte et de retrait ainsi que le droit d'expression directe et collective ; - le renforcement de l'association aux travaux du comité social et économique de l'ESAT de représentants de l'instance mixte usagers-salariés spécifique aux ESAT ; - la prise en charge des frais de transports domicile-travail ; - l'extension du bénéfice des titres-restaurant et des chèques-vacances ; - le bénéfice d'une complémentaire santé. Ces nouveaux droits sont en vigueur depuis le 1er janvier 2024, à l'exception de la prise en charge des frais de transport domicile-travail, du bénéfice des titres-restaurant et des chèques vacances, ainsi que de la complémentaire santé, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er juillet 2024. Par ailleurs, les modalités de mise en œuvre de certains des droits prévus par l'article 14 devront être précisées par décret, en particulier pour ce qui concerne la participation de représentants de l'instance spécifique aux réunions du comité social et économique de l'établissement ou du service et la complémentaire santé. Le Gouvernement porte une attention particulière à ce que ces nouveaux droits ne mettent pas en difficulté les ESAT et leurs missions d'accompagnement. Il en évaluera à ce titre les impacts économiques dans la suite de la mission menée par l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales sur les ESAT. Il est essentiel que les ESAT continuent de contribuer à l'autonomie et à l'inclusion sociale et professionnelle des travailleurs handicapés les plus éloignés de l'emploi, et de leur offrir des opportunités d'évolutions de parcours et de statut, via une employabilité et des compétences et qualifications accrues. Pour cela, ils doivent continuer à se transformer, dans la continuité des travaux engagés depuis plusieurs années. La modernisation de leur outil de production, les partenariats avec le milieu ordinaire, le développement d'activités pérennes, vont dans le sens à la fois d'un meilleur accompagnement des travailleurs et d'une plus grande adaptation des ESAT au tissu économique.

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