…et distribués sur le territoire national. Le point de deal à Tourcoing ou à Lomme est la résultante d'une technologie numérique et d'une situation internationale auxquelles notre organisation a du mal à répondre. Cette réforme, comme toutes les réformes de la police, doit nous permettre de nous adapter à la criminalité à laquelle nous faisons face. Peut-être que dans quinze, vingt ou trente ans, la criminalité aura changé et qu'il faudra de nouveau adapter notre modèle ; c'est normal.
La difficulté principale, c'est que nous avons un taux d'élucidation en baisse, un trafic et un taux d'homicide en hausse ; en même temps, la justice elle-même saisit de plus en plus la direction centrale de la sécurité publique pour conduire les enquêtes. Pour montrer que nous n'avons rien à craindre puisque tout est réglementaire et rien n'est législatif dans cette réforme, nous accepterons l'amendement de Mme Vichnievsky, entérinant le texte qui a déjà été modifié au Sénat et en commission des lois. Le procureur continuera à choisir le service de police qu'il souhaite – la police judiciaire, la sécurité publique ou un autre service –, conformément à l'article 12-1 du code de procédure pénale. Cela sera prévu dans l'arrêté que nous prendrons, qui sera évidemment soumis – je le dis à l'intention de M. Houlié – à l'approbation des deux commissions des lois. Je reprends devant vous le même engagement que celui que j'avais pris devant la commission des lois du Sénat.
Aujourd'hui, monsieur Vicot, 90 % des enquêtes judiciaires sont menées par les commissariats, c'est-à-dire par la sécurité publique, et seulement 10 % par la police judiciaire – voire un peu moins car quelques-unes sont suivies par la police aux frontières. Ce nombre a été divisé par trois.
Devant l'incroyable diversité de la criminalité actuelle, parfois devant sa répétition, il n'est pas rare que des policiers relevant des directions départementales de la sécurité publique, ceux qui travaillent au sein des commissariats de vos secteurs, saisissent 40, 50, voire 100 kilogrammes de drogue. Il leur arrive quelquefois d'interpeller des personnes qui, jadis, relevaient exclusivement de la « clientèle » – pardon de le dire comme cela – de la police judiciaire. Bref, en quelques années, les choses ont profondément changé.
Voilà un an que j'ai annoncé cette réforme. Notre pays compte 150 000 policiers, dont 5 000 à la DCPJ, parmi lesquels 2 500 sont en réalité concernés. Nous nous intéressons, et c'est bien normal, à ces derniers, qui se posent des questions : nous devons y répondre, ce que nous faisons notamment au travers du présent texte ; dans cette perspective, nous retiendrons d'autres amendements.
J'observe toutefois que certaines propositions, ici, relèvent d'un débat idéologique, qui n'est pas pour autant médiocre. En témoigne celui que j'ai eu avec M. Bernalicis au début de nos discussions lorsqu'il a suggéré de placer la police judiciaire sous l'autorité des magistrats. Tout le monde ne partage pas cette position, j'en suis sûr. Mais certaines personnes, notamment des hommes et des femmes politiques, mais aussi des magistrats, pensent la même chose que lui. Ce n'est pas du tout le modèle français ; ce n'est pas du tout ce que préconise le Gouvernement. On peut partager des avis différents sur la question, mais il est certain qu'avec M. Bernalicis, nous serons jusqu'au bout en désaccord.
Certains se sont inquiétés que le préfet puisse commander la police judiciaire dans son département. Pour leur répondre, je citerai un exemple relevant d'un autre domaine. Avant la réforme de la direction générale des finances publiques – lancée par un précédent gouvernement, et que j'ai dû achever –, deux directions de Bercy travaillaient non pas de façon pyramidale, mais en silo : la direction générale de la comptabilité publique et la direction générale des impôts. La réforme a suscité beaucoup de contestations, et parfois des grèves.