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Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du jeudi 17 novembre 2022 à 9h00
Orientation et programmation du ministère de l'intérieur — Article 9

Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer :

…comme j'en ai encore rencontré il y a trois semaines à leur sortie de l'école de police, ou à ce clerc de notaire du sud de la France dont je me souviens très bien, tous bien plus qualifiés en droit que ne l'exige l'examen d'OPJ, qu'ils doivent attendre trois ans pour acquérir suffisamment d'expérience avant de s'y soumettre. Ce système est absurde et prive le ministère de l'intérieur d'un grand nombre de compétences. Partout, on recourt à la validation des acquis de l'expérience (VAE), mais le ministère de l'intérieur s'en dispenserait !

En outre, il faut savoir ce que nous voulons. Le ministère de l'intérieur ne peut affecter dans les commissariats que des agents qui sortent de l'école. Pour le reste de leur carrière, ils dépendent du statut de la fonction publique, donc on ouvre des postes, mais si les gens n'y vont pas, nous ne pouvons que constater qu'ils sont restés vacants. Vous m'écrivez tous – certains des intervenants m'ont écrit à ce sujet – que vous voulez des OPJ dans vos commissariats. Connectons les deux parties de notre cerveau ! Je ne peux pas vous les affecter de force, à l'exception de la sortie de l'école. À ce moment-là, je peux décider d'en affecter dix au commissariat de Lille, et quatre à Tourcoing, par exemple.

Si certains sortent de l'école avec la qualification d'OPJ, je pourrai les affecter dès que la loi sera promulguée, puisqu'il existera des sorties d'école classique, si je puis dire, et des sorties d'école « OPJ », et ainsi compenser le manque d'effectif dans les territoires les plus affectés. Je pense aux violences intrafamiliales dans le Pas-de-Calais : à Lens, on manque cruellement d'OPJ pour les prendre en charge. Pour le moment, je ne peux que constater avec les forces de police qu'elles manquent d'enquêteurs : grâce au dispositif que vous allez voter, je pourrai affecter des jeunes enquêteurs directement au commissariat de Lens.

Enfin, le texte encadre fermement le dispositif. La formation est allongée de quatre mois, l'examen reste inchangé, il se déroulera toujours sous l'autorité d'un magistrat et il faudra avoir acquis trente mois d'expérience sous le contrôle de ceux qui valident l'examen d'OPJ.

Franchement, monsieur Vicot, avouez qu'il n'y a pas de grande différence entre trente mois et trois ans ! Il nous faut faire confiance aux policiers, qui passent le même examen que tout le monde, en les libérant de contraintes héritées d'un autre temps. Soit on comprend que la sociologie des policiers qui intègrent l'école de police a changé, soit on ne le comprend pas. Soit on veut des OPJ plus nombreux pour mener des enquêtes, soit on continue à se lamenter quand il n'y en a pas assez, sans en tirer les conséquences.

Faire obstacle à l'article 9 revient à refuser beaucoup de vocations. Plein de gens souhaitent entrer dans la police nationale pour devenir enquêteurs, et non pas agents de sécurité publique : c'est compréhensible. Quand on passe un concours, on consulte les évolutions de carrière possibles. Ainsi, avant de se décider à entrer dans la police nationale, un juriste de 30 ou 35 ans chargé de famille pèsera le pour et le contre : en passant un concours de la fonction publique, il peut devenir gardien de la paix, ce qui n'est pas évident quand on a déjà un métier, mais le service public peut être une vocation. Si, après avoir passé douze mois à l'école de police, sans rémunération, il ne peut pas exercer le métier pour lequel il aura consacré plusieurs mois, parce qu'on lui demandera d'attendre trois ans pour repasser un concours, alors plein d'avocats, de juristes ou de gens désireux de servir les forces de l'ordre se diront qu'on ne veut pas d'eux dans cette belle administration.

Votre position me semble décalée dans le temps par rapport à la sociologie de la police nationale, ainsi que par rapport au besoin de disposer rapidement d'enquêteurs plus nombreux et affectés plus efficacement par le ministère de l'intérieur. Avis défavorable.

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