Notre assemblée est saisie ce matin d'un projet de loi relatif à un accord franco-britannique signé le 26 juillet 2021 à Paris, qui porte sur la coopération en matière de sûreté maritime et portuaire concernant les navires qui traversent la Manche avec plus de douze passagers à bord.
Sept compagnies sont concernées. En France, elles embarquent et débarquent des passagers depuis onze ports : Dunkerque, Calais, Dieppe, Le Havre, Caen, Cherbourg, Diélette, Barneville-Carteret, Granville, Saint-Malo et Roscoff.
Ce texte traite d'un sujet majeur : la lutte contre le terrorisme. Nous avons tous en tête les attentats perpétrés sur le territoire français, dont le bilan humain est très lourd : 271 morts et 1 200 blessés depuis 2012. Quant au Royaume-Uni, il a été touché par seize attentats depuis 2015, notamment celui de la Manchester Arena qui a fait 22 morts et 139 blessés le 22 mai 2017.
La menace terroriste n'a malheureusement pas disparu dans nos deux pays. Le risque est désormais moins celui d'une attaque de grande ampleur organisée depuis l'étranger que d'actes commis par des individus isolés souvent autoradicalisés.
Dans un tel contexte, il est essentiel de s'intéresser aux navires qui traversent la Manche car ils accueillent un nombre élevé de passagers. En 2019, avant la crise sanitaire, on comptait 14,3 millions de passagers dans la Manche et en mer du Nord, dont 8,5 millions transitaient par le port de Calais, dans ma circonscription. On estime que l'on reviendra à des chiffres similaires d'ici à l'année prochaine. En outre, de grands événements sportifs seront organisés en France très prochainement – la Coupe du monde de rugby en septembre et en octobre 2023, les Jeux olympiques d'été en 2024 –qui augmenteront nécessairement les flux de passagers.
Les ferries doivent donc disposer d'équipes pour assurer la sécurité des passagers et des équipages. Depuis 2016, la France déploie des équipes de protection de navires à passagers (EPNAP) à bord des navires battant pavillon français. Un arrangement technique avait été signé par la France et le Royaume-Uni le 9 décembre 2016, incluant les eaux britanniques. Toutefois, cet arrangement ne devait être que transitoire car il ne concerne que les EPNAP françaises, ce qui le rend incomplet sur le plan juridique.
C'est pourquoi, le 26 juillet 2021, la France et le Royaume-Uni ont signé l'accord que nous examinons, composé d'un préambule et de dix-huit articles dont j'ai détaillé le contenu dans mon rapport.
Ce texte permet à la coopération bilatérale de disposer d'un cadre juridique beaucoup plus précis et complet, ainsi que de nouveaux outils. Il autorise, en effet, chaque État partie à déployer ses agents dans les navires battant son propre pavillon, ce qui inclut donc désormais la partie britannique. Il renforce également les échanges d'informations et de bonnes pratiques, et il autorise des interventions conjointes ou coordonnées à bord des navires. Enfin, il organise des priorités de juridiction et le règlement des dommages.
Cependant, la portée de cet accord dépendra des moyens déployés pour sa mise en œuvre. Or ce point pose souvent problème avec le Royaume-Uni, j'en veux pour preuve la gestion de la crise migratoire ou encore le déversement des eaux usées britanniques dans la Manche, véritable scandale écologique auquel les autorités britanniques n'apportent pas de solution convenable.
Revenons à la mise en œuvre de l'accord que nous examinons ce matin. Le Royaume-Uni devra déployer des agents d'État sur les navires battant son pavillon, ce qui n'est pas le cas actuellement, seule la France étant mobilisée. Pour la France, je recommande une augmentation de la fréquence de déploiement des EPNAP, notamment au moment des pics touristiques, ce qui implique évidemment une hausse des effectifs mobilisés.
Cela étant, même si l'octroi de moyens supplémentaires n'est pas garanti à ce stade, cet accord est incontournable. Comme je l'ai démontré, il contribue à renforcer la sécurité des nombreux passagers qui utilisent les ferries pour traverser la Manche. Il pourrait d'ailleurs en inspirer d'autres : des réflexions sont en cours pour développer une coopération bilatérale sur la même thématique avec l'Italie pour les navires effectuant la liaison entre le continent et la Corse.
C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter sans réserve en faveur de l'approbation de cet accord.