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Intervention de Hervé Berville

Séance en hémicycle du jeudi 17 novembre 2022 à 9h00
Accord france-royaume-uni relatif à la sureté des navires à passagers dans la manche — Présentation

Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer :

Je suis très heureux d'être ici devant vous, au nom du gouvernement français, pour vous présenter le projet de loi visant à autoriser l'approbation de l'accord entre la France et le Royaume-Uni sur la coopération en matière de sûreté maritime et portuaire, concernant plus spécifiquement les navires à passagers battant pavillons français et britannique dans la Manche.

Cet accord vient donner à la coopération bilatérale entre nos deux États un cadre juridique robuste en matière de sûreté maritime et portuaire. Le processus de ratification au Royaume-Uni arrivant à son terme, ce qui est une bonne chose, c'est désormais à la France de ratifier ce texte très important.

Avant toute chose, permettez-moi de vous expliquer le grand objectif de cet accord : anticiper la menace terroriste, réalité indéniable et concrète, surtout depuis les attentats de 2015. Nul besoin de rappeler que nous venons tout juste de célébrer le septième anniversaire de ces attaques dues au terrorisme islamiste.

Nous voulons donc mieux structurer la coopération entre nos États s'agissant de la sûreté à bord des navires battant pavillon français ou britannique – je pense notamment à des situations d'actes illicites au sein d'un navire à passagers pouvant mettre en danger la vie ou l'intégrité physique des personnes ainsi que la sécurité de la navigation. C'est tout l'objet de l'article 1er de cet accord.

Pourquoi passer par un accord ? Parce que les réalités opérationnelles sont particulières en mer lorsqu'il s'agit de navires à passagers : l'éloignement des côtes – et donc du temps incompressible nécessaire aux forces de sécurité pour venir sur le navire – ne permet pas de traiter les menaces, surtout les menaces terroristes, comme sur la terre ferme. Cette réalité opérationnelle a d'ailleurs été rappelée par le Conseil d'État dans son avis du 3 septembre 2019. La prise en compte de cette vulnérabilité est l'objet du travail effectué avec le gouvernement britannique.

L'accord prévoit notamment de déployer des agents de l'État et des agents privés à bord des navires à passagers. L'idée est qu'ils soient déjà à bord en cas de besoin, pour qu'ils puissent réagir le plus rapidement possible en cas d'actes illicites pouvant mettre en danger la vie ou l'intégrité physique des personnes ainsi que la sécurité de la navigation.

Nous voulons apporter des réponses concrètes sur deux volets : la prévention et la réaction. Nous voulons prévenir autant que possible ces actes illicites, en encadrant le partage des informations sur d'éventuelles menaces dans le domaine maritime de la Manche. Nous voulons aussi réagir tout de suite en cas de commission d'actes illicites, surtout lorsqu'il n'est pas possible d'attendre le déploiement des forces d'intervention spécialisées de l'État côtier, par exemple lors d'attentats en cours. La présence d'agents à bord est dissuasive et elle permet de gagner du temps, ce que l'on appelle la guerre du temps, lorsque la vie ou l'intégrité physique de personnes est en jeu.

Cet accord prévoit aussi des dispositions pour une intervention conjointe franco-britannique de contre-terrorisme maritime avec nos forces d'intervention spécialisées – côté français, il s'agit du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et des forces spéciales de la marine nationale.

Une fois posé le cadre global de cet accord, permettez-moi de vous rappeler les principales étapes de son élaboration. Il s'inscrit dans la lignée de tous les travaux engagés depuis 2015 sur le renforcement de la lutte contre la menace terroriste.

Après la vague d'attentats terroristes commis en France, et plus largement en Europe, le Gouvernement a souhaité, dès 2016, déployer des agents armés de l'État à bord des navires à passagers battant pavillon français. Mais puisqu'il n'y avait pas d'accord avec les autorités du Royaume-Uni, ces agents devaient cesser leur mission lors de l'entrée des navires dans les eaux sous souveraineté britannique. Afin de leur permettre de poursuivre leur mission pendant la totalité du transit, un arrangement technique avait été conclu entre la France et le Royaume-Uni en décembre 2016. Le principe d'un accord intergouvermemental pour une coopération bilatérale structurée et pérenne avait ensuite été validé par nos deux États en décembre 2017, puis annoncé lors du sommet de Sandhurst en janvier 2018.

Ce projet de loi sur l'approbation d'un accord entre la France et le Royaume-Uni, que nous vous soumettons aujourd'hui, est le fruit de toutes ces discussions. L'accord se veut donc, d'abord et avant tout, opérationnel et technique. L'objectif final est, très concrètement, d'éviter la commission d'actes illicites qui pourraient porter gravement atteinte à la sûreté de la navigation maritime, à la vie des équipages et des passagers.

L'accord entre la France et le Royaume-Uni sur la sûreté maritime des navires de passagers battant pavillon français ou britannique dans la Manche constitue une véritable avancée opérationnelle, diplomatique et technique. Bien sûr, en parallèle, nos travaux bilatéraux se poursuivent, notamment dans le cadre de l'élaboration du plan d'intervention conjointe. Des observateurs britanniques assisteront par exemple au prochain exercice français de contre-terrorisme maritime en décembre prochain – c'est la traduction concrète de notre engagement à lutter ensemble sans relâche contre le terrorisme.

Cet accord entre la France et le Royaume-Uni sera donc un levier indiscutable de la lutte que nous menons avec les autres États contre le terrorisme. Pour qu'il soit mis en œuvre, j'appelle de mes vœux l'adoption du projet de loi.

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