Un tel diagnostic montre votre aveuglement. Alors que nos compatriotes, y compris les classes moyennes, se sacrifient et se restreignent depuis des années, jamais la pauvreté et la précarité énergétique n'ont été aussi fortes. Avez-vous oublié la révolte des gilets jaunes ? N'avait-elle pas montré que les Français étaient déjà au bout des efforts qu'ils pouvaient fournir ?
L'énergie n'est pas un bien comme un autre : elle est le cœur battant de l'économie et des sociétés humaines. Toute l'aventure humaine est une quête sans cesse renouvelée pour la maîtrise des ressources naturelles et des lois de la physique qui nous permet de prospérer. L'ensemble des révolutions productives de l'humanité, des plus anciennes aux plus contemporaines, ont toutes été fondées sur la maîtrise d'une ou plusieurs formes d'énergie. Ces acquis technologiques se sont toujours cumulés, sans jamais se substituer les uns aux autres. L'humanité a toujours besoin de plus d'énergie pour améliorer ses conditions de vie, soulager la dureté du travail, conquérir de nouveaux territoires, y compris la mer et l'espace. Le choix du modèle énergétique conditionne aussi notre rapport au monde. Les ressources naturelles ne sont pas réparties équitablement sur la Terre. Plus elles sont rares, plus elles seront âprement disputées. La crise du covid a rompu l'illusion que la mondialisation pouvait offrir des richesses au monde entier. À la moindre tension, les pays dépendants se retrouvent dépourvus, à la merci des pays autonomes, pour ne pas dire parfois hégémoniques.
La mondialisation heureuse a vécu et nous sommes renvoyés à la triste réalité : ne sont libres que les peuples qui maîtrisent leurs ressources vitales. Avons-nous donc oublié les racines de notre civilisation, quand les cités grecques refusaient de céder à l'envahisseur perse « la terre et l'eau », symboles de leur liberté face à la soumission ?