Je me réjouis que même ceux qui s'opposent à ma nomination ne semblent pas douter de ma compétence. C'est pour moi l'essentiel, car la compétence doit être le premier critère de nomination aux emplois publics.
Il faudrait interroger l'opinion publique s'agissant de « l'image renvoyée » par ma nomination, pour reprendre l'expression utilisée par M. Bricout. J'espère qu'elle n'est pas mauvaise.
Madame Keloua Hachi, je n'ai pas du tout le sentiment de participer à un jeu de chaises musicales. J'ai toujours eu une appétence très forte pour les transports. La presse a d'ailleurs rappelé que j'avais déjà été candidat, en 2019, à la présidence de la SNCF, mais je n'avais alors pas eu le bonheur d'arriver jusqu'à vous – c'est normal, on ne gagne pas à tous les coups ! Si vous ne m'accordez pas votre suffrage, accordez-moi au moins le bénéfice de la cohérence. Je ne recherche ni un poste ni un salaire – ce n'est pas moi qui ai fixé la rémunération du PDG de la RATP. Ma motivation est d'œuvrer pour le service public et de servir mon pays. La présidence de la RATP s'est trouvée vacante dans les conditions que chacun a rappelées. Pour être très honnête avec vous, cela a allumé une petite lueur en moi, mais je n'ai pas pris l'initiative de me porter candidat. J'étais alors à l'Afit France, et je précise bien que ma candidature à la RATP ne s'explique pas par une insatisfaction liée à mon action au sein de cette agence. J'ai pensé que la présidence de la RATP revêtait des enjeux encore plus importants, et que je pouvais y être encore plus utile qu'à l'Afit France. Mais vous êtes parfaitement libres de penser le contraire – je partage les propos de M. Vermorel-Marques, c'est une bonne innovation que le Parlement se prononce sur ma nomination.
D'habitude, lorsqu'on veut recaser des amis, on leur propose plutôt une sinécure. Je ne suis pas certain que la présidence de la RATP puisse être qualifiée ainsi.
Serai-je à la hauteur de la tâche ? Je me suis évidemment posé cette question et si j'ai pris la décision de me présenter devant vous, c'est parce que j'ai la conviction que je peux apporter quelque chose à la RATP.
S'agissant de l'avis de la HATVP, celle-ci précise que je ne peux pas prendre l'initiative de contacter des ministres qui faisaient partie de mon gouvernement concernant l'ouverture à la concurrence. Toutefois, cela ne concerne pas les ministres eux-mêmes, à commencer par la première d'entre eux, qui peuvent entrer en relation avec moi à ce sujet. Je ne serai donc pas sans contact mais les liens qui seront établis le seront dans le cadre fixé par la HATVP. Si j'avais le sentiment que cet avis m'empêchait d'agir, je ne serais pas présent devant vous ce matin.
La politique de diversification et de filialisation, entamée il y a plusieurs décennies, doit être poursuivie sur la base de ce que nous savons faire. À l'étranger, nous devons privilégier le métro automatique car notre savoir-faire en la matière est incontestable. Il faut également bien choisir ses zones : la RATP est intervenue dans quelques pays qui se sont révélés particulièrement difficiles.
J'aime beaucoup le concept de RATP Solutions Ville car une entreprise de transport ne fait pas que cela : elle restructure également le paysage urbain ou rural. La RATP apporte sa contribution à la conception du tissu urbain autour des gares ; elle a également développé une expertise dans certains métiers, qu'elle doit exporter. Toutefois, on ne peut pas, d'un côté, chercher à vendre notre technologie et à exploiter des réseaux de bus ou de métro à l'étranger et, de l'autre, refuser qu'il en aille de même chez nous. La progression massive des transports en commun devrait nous réconcilier sur ce sujet.
Par ailleurs, il ne faut jamais laisser accroire que l'ouverture à la concurrence se ferait au détriment de notre cœur de métier. Je ne pourrais pas expliquer qu'on exploite très bien un réseau de transport en commun dans n'importe quelle ville du monde sous l'étiquette RATP, et pas celui de l'Île-de-France : les gens ne comprendraient pas et ils auraient raison. Je ne souhaite donc pas l'arrêt de ce processus, mais je veillerai à agir dans le bon ordre. L'ouverture à la concurrence est un moyen et non une religion. Elle ne peut porter atteinte à la qualité du service ni aux conditions de travail.
Le cadre social territorialisé nécessitera des négociations dont l'enjeu est loin d'être négatif puisqu'il porte sur un quatorzième mois, notamment pour les conducteurs de bus. Dans la mesure où il a vocation à s'appliquer à tous les opérateurs, il pourrait en outre constituer un progrès pour leurs salariés puisqu'il vise à harmoniser les conditions de la concurrence. Je comprends que cela inquiète car tout n'est pas réglé mais je ne pars pas battu d'avance. Il faut être très pragmatique : la finalité n'est pas la concurrence mais l'amélioration du service. Je ne connais pas de service qui se soit amélioré si les usagers ou les agents y perdent.
La question de l'accessibilité, à peu près réglée pour toutes les lignes de bus et de RER, la ligne 14 et les nouvelles lignes du Grand Paris Express, ne se pose plus que pour le métro historique. Lorsque j'étais délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques 2024, nous avions ambitionné de progresser un peu dans ce domaine, la ligne 6 ayant été choisie pour en être le laboratoire. Toutefois, cela posait un problème financier considérable et soulevait la question des autorités de l'État, notamment la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, qui exigeaient de mettre en accessibilité l'ensemble de la ligne et non simplement quelques stations, alors que les exigences n'étaient pas les mêmes pour le métro de Marseille.
Les décisions sur les investissements nécessaires seront liées aux capacités financières d'Île-de-France. Elles seront prises dans le cadre du contrat signé avec IdFM. Le contrat en cours, particulièrement ambitieux en matière d'investissement, devra faire l'objet d'un avenant pour intégrer les JO. Il faudra également préparer le contrat suivant. La question de l'accessibilité ne sera pas réglée d'un seul coup mais le métro historique doit concourir à la réalisation de cet objectif : cela enverra un signal fort en direction des personnes en situation de handicap.
S'agissant de la réforme des retraites, je ne renie rien de ce que j'ai dit et fait en la matière. À l'époque de la première réforme des régimes spéciaux, qui portait sur la disparition des bonifications, à l'automne 2007, j'étais le directeur de cabinet de M. Xavier Bertrand et nous avions, après de sérieuses discussions et des conflits sociaux, obtenu une première avancée sur ce sujet. Ce sera au Président de la République, au Gouvernement et aux parlementaires de décider des contours de la future réforme des retraites, en particulier des régimes spéciaux. Ma demande est d'être consulté en amont sur les modalités et les conditions de faisabilité et de participer aux négociations indispensables.
La sécurité est un sujet essentiel sur lequel nous devons encore faire des efforts. Je me rendrai très rapidement au centre de coordination opérationnelle ouvert en juillet dernier. Le groupement interne à la RATP dédié à la sécurité connaît lui aussi des problèmes de recrutement, les effectifs budgétaires n'étant pas tous pourvus – seuls 920 agents sur les 1 000 envisagés par IdFM devraient être recrutés fin 2022. Il faut à tout prix identifier les obstacles et définir les moyens nécessaires. Il faudra également travailler à la coordination avec la police nationale et avec la région, qui veut créer son propre dispositif de sécurité. Tout cela doit être bien articulé : la finalité, c'est l'efficacité. Mais j'ai parfaitement conscience que la sécurité est un enjeu majeur dans le quotidien des usagers.
Concernant le RER B, IdFM a adopté un grand programme pour remédier aux problèmes constatés sur les voies et sur le système d'exploitation, ainsi que pour remplacer l'ensemble des rames. Sa réalisation s'étalera dans le temps mais elle entraînera d'importantes perturbations du trafic, qui nécessiteront beaucoup de patience de la part des usagers. Nous devons en effet rattraper les retards d'investissement accumulés depuis plusieurs décennies.