Intervention de Christine Pires Beaune

Réunion du mardi 25 octobre 2022 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune, rapporteure spéciale :

La mission Remboursements et dégrèvements occupe une place à part dans le budget général de l'État. En effet, ses crédits ne correspondent pas, à proprement parler, à des dépenses mais à des moindres recettes. C'est pourquoi ils ne sont qu'évaluatifs et non pas limitatifs.

La mission retrace l'ensemble des restitutions que l'administration fiscale est conduite à verser aux contribuables, qu'il s'agisse du fonctionnement normal de l'imposition en question, de l'application d'un avantage fiscal comme le crédit d'impôt ou encore d'une correction du montant dû par le contribuable, ce qui arrive notamment à la suite de contentieux.

Le PLF pour 2023 prévoit que les remboursements et dégrèvements s'élèveront à plus de 128 milliards, soit l'équivalent de 29 % des recettes fiscales brutes. Il s'agit d'un montant comparable à celui prévu par la précédente loi de finances, qui chiffrait ces restitutions à 130 milliards.

Les 2 milliards de baisse concernent principalement les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, retracés sur le programme 201 du même nom. L'anticipation de la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) diminuera mécaniquement de 1,6 milliard les restitutions auxquelles les entreprises peuvent prétendre.

Il faut noter également le recul de 500 millions des dégrèvements de taxe d'habitation, là encore en raison d'une réforme fiscale que nous connaissons bien.

Sur le programme 200, qui retrace les remboursements et dégrèvements des impôts d'État, les crédits ne varient que de 0,2 % par rapport à la dernière loi de finances. Néanmoins, cette apparente stabilité cache des évolutions très différentes mais qui se compensent sur l'ensemble du programme.

Par exemple, les remboursements liés à la mécanique de l'impôt – tels la restitution à une entreprise de trop-versés d'acompte sur l'impôt sur les sociétés (IS) ou le versement à son profit de crédits de TVA – devraient augmenter d'environ 6,5 milliards en 2023, ce qui résulte de la diminution des bénéfices des entreprises en 2022 et d'une propension des sociétés à davantage mobiliser leurs créances vis-à-vis de l'État.

À l'inverse, le total des crédits d'impôt qui s'imputent sur cette mission est en diminution de 5 milliards, en raison de l'extinction, en 2022, des dernières créances du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), à la suite de son abrogation en 2019.

Enfin, on observe une diminution de 1,8 milliard du coût engendré par les contentieux dits de série par rapport à 2022. Cette baisse aurait pu être illusoire si le Conseil constitutionnel n'avait pas rejeté, le 14 octobre dernier, la question prioritaire de constitutionnalité posée par plusieurs grandes entreprises au sujet du précompte mobilier – une bonne nouvelle, donc, pour les finances de l'État.

Plusieurs sujets ont retenu mon attention, à commencer par la progression fulgurante de deux crédits d'impôt à propos desquels je ne cesse d'appeler à une réforme depuis plusieurs années.

Le crédit d'impôt pour l'emploi à domicile devrait devenir la première dépense fiscale, en 2023, avec 7,95 milliards. Il est vrai que l'institution du crédit d'impôt contemporain, qui se traduit par sa prise en compte dès le paiement de la prestation par le contribuable, accroît mécaniquement son impact budgétaire. Il n'en demeure pas moins urgent d'engager une réflexion sur la pertinence et l'efficience de cet avantage fiscal, afin d'aboutir, éventuellement, à une réforme, que celle-ci concerne les activités éligibles, les conditions de ressources, le plafond ou simplement le taux applicable. Nous devrions savoir, dorénavant, à quoi sert ce crédit d'impôt, ce dont je me félicite.

L'autre avantage fiscal qui connaît un certain dynamisme – pour employer un euphémisme – est le crédit d'impôt recherche (CIR), qui semble s'installer durablement au-delà des 7 milliards. Là encore, malgré les avis critiques formulés assez récemment par France Stratégie puis par le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), le Gouvernement se refuse à réformer ce dispositif qui, à mes yeux, doit être recentré sur les petites et moyennes entreprises.

Je suis également préoccupée par les règlements d'ensemble, au sujet desquels j'ai déposé un amendement. Je vous proposerai un second amendement concernant les dégrèvements contentieux de taxes foncières.

Malgré ces réserves, je vous invite à voter les crédits de cette mission qui, je le répète, sont évaluatifs et ne sont que la conséquence des mesures fiscales en vigueur.

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