Intervention de Sophia Chikirou

Réunion du mercredi 12 octobre 2022 à 15h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophia Chikirou :

Depuis quinze ans, le commerce extérieur français sombre : la balance commerciale est structurellement négative et la conjoncture actuelle ne fait que dégrader de façon exponentielle la situation. Nous connaissons l'ampleur des dégâts : – 85 milliards en 2021, – 156 milliards prévus en 2022 et – 154 milliards en 2023. Ce problème perdure, car ce sont les mêmes logiques qui sont répétées à l'envi. Depuis plus de quinze ans, la France dépense des centaines de millions d'euros pour aider des entreprises françaises à l'international sans aucune évaluation des politiques publiques de compétitivité, sans objectifs ni indicateurs clairs, sans fixer de conditions sociales et écologiques, sans même élaborer de plan stratégique.

Dans son rapport publié en octobre 2022, la Cour des comptes souligne les lacunes du contrat d'objectifs et de moyens conclu entre l'État et Business France pour la période 2018-2022, ce contrat ne mentionnant aucun secteur à accompagner de manière préférentielle, aucun objectif stratégique ni aucun indicateur. La méthode Business France consiste à laisser aux entreprises, par l'intermédiaire du Conseil national de l'industrie, le soin de déterminer leurs priorités en matière d'export. Autrement dit, l'argent public ne sert pas à mettre en œuvre une politique publique de commerce extérieur mais à financer des projets privés dont on se demande bien quels sont les critères de leur sélection. C'est là que le bât blesse : nous soutenons des entreprises dans des secteurs polluants, dans des zones et dans des pays socialement et humainement hautement critiquables. Comment justifie-t-on de financer des start-up à Dubaï dans le cadre du programme Booster ? En quoi le fait d'encourager l'évasion fiscale à Dubaï améliorerait-elle la balance commerciale française et la situation de l'emploi en France ?

Par ailleurs, comment intègre-t-on les exigences de l'accord de Paris dans la stratégie d'exportation ? Que voulons-nous produire en France, relocaliser à tout prix ou au contraire exporter ? Il faut un plan de souveraineté agricole, il faut un plan de relocalisation des productions stratégiques comme les médicaments, il faut travailler à notre souveraineté énergétique par le développement des énergies renouvelables. Enfin, il faut cesser de financer à vue et Business France doit répondre à un cahier des charges précis. En dépit de l'alerte de la Cour des comptes, rien n'est envisagé pour y remédier. Business France et BPIFrance coûtent donc 180 millions d'euros d'argent public, sans évaluation environnementale ni sociale, sans objectifs et sans indicateurs.

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