Intervention de Dominique Simonnot

Réunion du mercredi 26 octobre 2022 à 10h10
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Dominique Simonnot, Contrôleure générale des lieux de privation de liberté :

La question des CEF nous préoccupe considérablement et je suis heureuse qu'elle vous préoccupe également. Certains d'entre vous ont été choqués par mes propos, mais ne vous méprenez pas. Nous avons certes visité des CEF absolument formidables. Toutefois, il faut bien être conscient que les problèmes de ces centres sont de plusieurs ordres. Tout d'abord, bien que dans certains CEF on dénombre 26 ETP pour 12 mineurs, il convient de se demander qui sont ces ETP. En effet, si dans certains centres on a su créer et conserver des équipes pérennes, formées, solides, compétentes et bien dirigées, d'autres subissent un turnover permanent, le travail n'étant pas attractif. Dans le centre dont je vous parlais précédemment, où tout se passait très bien, l'équipe était stable et les professionnels mieux payés, ce qui compte certainement aussi. Ensuite, les enfants et adolescents qui entrent en CEF ont un passé. Curieusement, il n'existe pas d'étude longitudinale portant sur les enfants placés à l'aide sociale à l'enfance (ASE) – dont sont issus la majorité des jeunes placés en CEF. On ignore donc d'où ils viennent, les éducateurs n'ont aucun renseignement sur le passé de l'enfant et, pire encore, ne connaissent pas leur avenir une fois partis. Ainsi, il est impossible d'évaluer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. On ne peut que déplorer ce manque de sérieux dans le suivi des politiques publiques.

Je ne saurais vous répondre sur la question des mineurs arrivés trop tardivement en CEF. Néanmoins, dans le centre que je viens de citer en exemple, était pris en charge un jeune de dix-sept ans qui n'avait plus de dents, suçait son pouce, avait un doudou et dormait avec une tétine. Avant son arrivée, il vivait dans une voiture avec ses parents. Dans ce cas, on peut raisonnablement affirmer qu'il est arrivé un peu tardivement dans le système social. Pour ma part, je ne parviens pas à comprendre comment personne dans son entourage, notamment en milieu scolaire, ne s'était soucié du sort de cet enfant pour le moins différent. On n'évoque jamais le contrôle absolument défaillant des familles d'accueil et des foyers de l'enfance. Il existe à mon sens un énorme problème de l'enfance en danger dans notre pays. On constate une désaffection très nette pour les métiers de l'ASE et équivalents, ainsi qu'un manque de contrôle des endroits où les enfants sont envoyés et où ils sont parfois extraordinairement maltraités. Ce sont nos enfants, notre avenir à tous et nos concitoyens bientôt. Nous allons donc devoir nous pencher sur le problème et je constate avec plaisir que le sujet commence à émerger.

Je n'ai pas d'idée sur le ratio entre bonnes et mauvaises expériences. C'est tout à fait fluctuant.

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