Je tiens tout d'abord à rappeler les ordres de grandeur de ces deux budgets dédiés à l'administration pénitentiaire et à la protection judiciaire de la jeunesse.
Pour cette dernière, le budget global représente 1 087 millions d'euros en crédits de paiement, en augmentation de 10,5 %, soit 103 millions d'euros de plus par rapport à l'année précédente. Dans ce budget, les dépenses de personnel augmentent de 13,6 % et les crédits hors masse salariale de 6 %.
Quant à l'administration pénitentiaire, son budget global s'élève à 4,9 milliards d'euros en crédits de paiement, en augmentation de 7,5 %, soit 343 millions d'euros, par rapport à l'année 2022. Dans ce budget, les dépenses de personnel augmentent de 8,6 % et les crédits hors masse salariale de 5,7 %.
Ces deux budgets ont été en constante augmentation au fil des projets de lois de finances de la précédente législature. Ce nouveau projet s'inscrit donc dans la continuité de cette dynamique de progrès, que nous devons saluer car elle montre que notre majorité et le Gouvernement ont pris la pleine mesure des enjeux cruciaux que représentent la politique pénitentiaire et celle de la protection judiciaire de la jeunesse.
Avant d'en venir à la partie thématique de mon rapport, je tiens à rappeler que nous avons été confrontés, en 2017, au mauvais état d'entretien des établissements pénitentiaires, les budgets alloués à cette fin ayant été sous-évalués pendant des années, voire des décennies. En effet, alors que, selon une étude de la direction de l'administration pénitentiaire, le budget nécessaire à la maintenance du parc pénitentiaire est estimé à 140 millions d'euros par an, 60 à 80 millions d'euros seulement y ont été consacrés entre 2014 et 2016. Le résultat était désastreux, notamment parce que la vétusté de certains bâtiments menaçait la dignité des conditions de détention.
Je me réjouis de constater que nous avons redressé la barre : ces budgets ont été en constante augmentation depuis 2017, avec 80,7 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2018, 100,6 millions pour 2019, 110 millions pour 2020, 110 millions pour 2021 et 120 millions pour 2022. Cette année encore, le budget continue dans cette direction avec 124,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement pour la maintenance et l'entretien des établissements. Gageons que les prochaines années nous permettront d'atteindre le niveau approprié, selon l'évaluation réalisée par l'administration pénitentiaire.
J'en viens à présent à la seconde partie de mon rapport, que j'ai choisi cette année de consacrer aux activités de réinsertion, en milieu fermé comme en milieu ouvert. Je tiens à préciser que j'avais choisi ce sujet avant l'été, car je souhaitais notamment travailler sur les missions des services pénitentiaires d'insertion et de probation – SPIP. La polémique de cet été n'a fait que prouver la pertinence de ce choix, car nous devons visiblement faire encore preuve de pédagogie pour expliquer l'importance de la politique de réinsertion et des activités proposées aux personnes placées sous main de justice.
Du reste, le budget demandé pour 2023 ne s'y trompe pas, puisque les crédits destinés à cette politique sont, eux aussi, en augmentation, notamment pour le déploiement du bracelet anti-rapprochement, dont le budget augmente de près de 145 %, le développement du placement à l'extérieur, avec une augmentation de 67,5 %, et la mise en œuvre des réformes liées au travail en détention et au nouveau statut du détenu travailleur, avec un budget en hausse de 28 %. Je me réjouis de ces augmentations, qui montrent que la politique de réinsertion est aujourd'hui l'une des facettes essentielles de la politique pénitentiaire.
En milieu ouvert, nous devons continuer à développer toutes ces formes de suivi qui permettent de s'adapter au profil des personnes condamnées et, ainsi, de construire avec elles un parcours de réinsertion aussi adapté que possible. En milieu fermé, les activités proposées aux personnes détenues recouvrent plusieurs domaines : travail, formation professionnelle, insertion par l'activité économique, enseignement et activités éducatives, culturelles, socioculturelles, sportives et physiques. Toutes ces activités organisées dans le cadre de la détention contribuent au quotidien carcéral et aux parcours de réinsertion des personnes détenues. Si l'on comprend aisément l'apport des activités de formation, d'enseignement ou de travail, il ne faut pas perdre de vue que les autres activités ont également leur rôle à jouer. En effet, les apports socio-culturels permettent aux personnes détenues de développer notamment leurs compétences sociales et leurs capacités relationnelles, qui sont un maillon essentiel de la réinsertion.
En conclusion, il me semble important de rappeler que la politique de réinsertion est mise en œuvre notamment par les services pénitentiaires d'insertion et de probation, souvent bien moins connus de nos concitoyens que les personnels de surveillance, alors qu'ils exercent des missions essentielles, assurant à la fois le contrôle des obligations prononcées par l'autorité judiciaire, notamment en milieu ouvert, et l'accompagnement personnalisé des personnes placées sous main de justice. Ils sont ainsi au premier rang de la lutte contre la récidive.
Monsieur le ministre, au cours des auditions et des déplacements que j'ai effectués, j'ai été alerté à plusieurs reprises par le manque d'attractivité des services pénitentiaires d'insertion et de probation. Les directrices et directeurs de ces services ont d'ailleurs engagé récemment un mouvement social pour réclamer une amélioration de leur statut. Je les ai reçus et j'ai pu échanger avec eux sur ce sujet. Comment le Gouvernement prend-il en compte ces enjeux et quelles mesures catégorielles sont – ou seront – adoptées en faveur de ces personnels dédiés à la réinsertion ? Envisagez-vous de continuer le recrutement des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation sur le reste de la durée du quinquennat ?
Je m'interroge également sur la mise en œuvre, en janvier prochain, de la nouvelle procédure de libération sous contrainte – LSC – de plein droit. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit à ce titre le « fléchage » de trente agents de surveillance électronique, nombre qui, selon plusieurs syndicats, risque d'être insuffisant pour prendre en charge les nouvelles mesures de détention à domicile sous surveillance électronique qui seront mises en œuvre dans ce cadre. Comment seront gérées les mesures prononcées en application de cette nouvelle LSC ?